16ème législature

Question N° 18166
de M. Ugo Bernalicis (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Nord )
Question écrite
Ministère interrogé > Intérieur et outre-mer
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > police

Titre > Avenir du Comité d'évaluation de la déontologie policière et de son rapport

Question publiée au JO le : 28/05/2024 page : 4175
Question retirée le: 11/06/2024 (fin de mandat)

Texte de la question

M. Ugo Bernalicis appelle l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le Comité d'évaluation de la déontologie policière (CEDPN) rattaché à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). Créé en octobre 2020, le CEDPN ne s'est réuni qu'à 7 reprises entre le 21 novembre 2021 et le 13 décembre 2023. M. le député déplore d'abord la composition du comité : déterminée par un arrêté du ministre de l'intérieur, elle apparaît problématique du point de vue de sa faible mixité entre membres policiers et non-policiers. Alors que le comité était pensé, selon les propres termes de l'ancienne directrice de l'IGPN, Brigitte Jullien, comme « une façon d'ouvrir l'IGPN vers l'extérieur », les membres non-policiers y demeurent minoritaires. Certaines ONG comme Amnesty France et l'Action des chrétiens pour l'abolition de la torture (Acat) avaient d'ailleurs refusé de siéger au sein du comité, estimant pour certaines que la place des ONG était trop réduite, ce dont M. le député s'alarme compte tenu du rôle joué par ces associations dans la dénonciation des atteintes aux libertés fondamentales. En outre, dans un article publié le 29 avril 2024, Médiapart révélait que le premier rapport établi par le CEDPN avait été enterré par le ministère de l'intérieur. Portant sur les contrôles d'identité dans la police, le rapport se veut porteur d'une réflexion sur leur opportunité et sur les conditions de leur usage, dans un contexte de visibilisation accrue des contrôles discriminatoires. Il s'ajoute aux constats établis par un rapport de la Cour des comptes du 6 décembre 2023 qui dénombre 47 millions de contrôles d'identité sur l'année 2021. Ce rapport soulignait, outre la complexité de leur cadre juridique, la nécessité de clarifier les règles qui encadrent les contrôles d'identité et de renforcer leur contrôle par l'autorité judiciaire, de même qu'il relevait les difficultés à déterminer les objectifs poursuivis par les policiers ainsi que l'efficacité des contrôles. En ce qui concerne le rapport du CEDPN, M. le député constate qu'il n'est signé que par la directrice de l'IGPN ; ni la Défenseure des droits ni le Conseil national des barreaux n'ont souhaité s'y associer, ce qui l'interroge sur l'effectivité de la concertation avec les membres non-policiers du comité. Dans le même temps, M. le député prend acte des constats établis par un dossier thématique plus récent de la Défenseure des droits (28 février 2024), qui rappelle d'une part l'incidence de la faible prescriptivité du cadre juridique et de l'insuffisante traçabilité des contrôles sur la dynamique des contrôles discriminatoires, dont la réalité a d'ailleurs été reconnue à plusieurs reprises par le juge judiciaire et le juge administratif et d'autre part la nécessité de concilier plus généralement les contrôles d'identité « avec les droits et libertés des personnes contrôlées, notamment la liberté d'aller et venir et le droit au respect de la vie privée ». Après la transmission du rapport du CEDPN au ministre de l'intérieur en décembre 2023, celui-ci a refusé de le rendre public et ce malgré l'avis favorable de la Commission d'accès aux documents administratifs (Cada) rendu le 28 mars 2024. M. le député s'interroge sur les motivations du ministre de l'intérieur visant à dissimuler un tel rapport, dont les recommandations apparaissent pourtant relativement modérées. À cet égard, il rappelle que l'encadrement des contrôles d'identité par un cadre légal strict et renouvelé est un enjeu majeur du rétablissement du lien de confiance entre la police et les citoyens et que cette question devrait en ce sens faire l'objet d'un traitement politique à part entière. Par ailleurs, le comité ne s'est plus réuni depuis la transmission du rapport au ministère, alors même qu'il devait poursuivre ses réflexions sur des thématiques comme l'identification des forces de l'ordre et l'intelligence artificielle. M. le député craint qu'une telle dynamique engage le CEDPN sur la même voie que l'éphémère « Comité d'orientation et de contrôle interne de la police nationale » ; il ne s'était réuni que 9 fois entre 2014 et 2017 avant de tomber en désuétude. Ainsi, M. le député aimerait obtenir des précisions sur les éléments suivants : les raisons pour lesquelles l'activité du CEDPN est interrompue depuis décembre 2023 ; les motifs du refus par le ministère de l'intérieur de publier le rapport, malgré l'avis favorable du CADA. En outre, M. le député aimerait connaître les intentions de M. le ministre sur les propositions visant à renouveler la composition du CEDPN, notamment celles conduisant à élargir la proportion de membres non-policiers et à laisser une place plus importante au contrôle citoyen ; les suites qu'il entend donner aux recommandations établies par le rapport du CEDPN, notamment l'ouverture d'un « chantier conjoint entre ministère de l'intérieur et des outre-mer et ministère de la justice [...] pour interroger la lisibilité du cadre légal existant et portant sa possible modification » de même que le renforcement de la formation initiale et continue des policiers (proposition 6.2) ou la réalisation d'une évaluation qualitative sur « l'efficacité des contrôles d'identité dans la poursuite des différentes finalités qui lui sont assignées » (propositions 6.5 et 6.6) ; l'application de mesures préconisées par d'autres rapports d'associations ou émanant de sources institutionnelles, telles que l'expérimentation du récépissé de contrôle d'identité ou l'interdiction explicite des contrôles discriminatoires dans le code de procédure pénale. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Texte de la réponse