16ème législature

Question N° 18512
de Mme Clémentine Autain (Non inscrit - Seine-Saint-Denis )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > enfants

Titre > Accompagnement des mineurs non accompagnés délinquants

Question publiée au JO le : 11/06/2024 page : 4659
Question retirée le: 11/06/2024 (fin de mandat)

Texte de la question

Mme Clémentine Autain interroge M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'accompagnement des mineurs non accompagnés (MNA) délinquants. Le 30 novembre 2023, Mustapha, adolescent marocain de 16 ans, est décédé après plusieurs semaines de coma, à la suite d'une décision d'arrêt des soins des médecins. Son décès fait suite à sa tentative de suicide dans sa cellule au lendemain de son incarcération à la prison de Villepinte. Usé par une vie faite de fuite et d'errance, il avait signifié à plusieurs reprises sa détresse psychologique et ses pulsions suicidaires. Un rapport de Mme Alice Simon sur « Les effets de l'enfermement sur les mineurs détenus » rendu en septembre 2023 au ministère de la justice indiquait que l'incarcération des mineurs présentait « d'importants risques psycho-sociaux sur les mineurs, en raison notamment de l'encellulement très important et de l'isolement qui y est associé, mais aussi de la séparation des mineurs avec leur famille, ou encore du climat parfois hostile qui prévaut entre les jeunes détenus ». Parmi ceux-là, les mineurs non accompagnés, déjà isolés d'un point de vue social et familial, doivent recevoir notre totale attention. Les mineurs non accompagnés constituent à ce jour entre un cinquième et un quart de la population carcérale mineure. Au 1er avril 2021, 173 MNA étaient incarcérés dans les prisons françaises. Les MNA ont des trajectoires de vie marquées par des ruptures et des situations polytraumatiques, par la violence physique ou psychologique, par l'abandon familial, social voire institutionnel. Partis en raison des dangers auxquels ils étaient exposés dans leur pays d'origine, de difficultés économiques, en raison de leur isolement ou parce qu'ils ont été missionnés par leur famille pour trouver une meilleure situation en Europe, ils sont amenés à résider ou à traverser différents pays, parfois en guerre, souvent dans des conditions très éprouvantes ou en étant pris dans des réseaux de traite des êtres humains. Face à de tels parcours, leur santé mentale, leur intégrité physique et l'espoir d'une pleine insertion ou réinsertion dépendent de politiques publiques fortes et adaptées à un public aujourd'hui en détresse. Or le code de justice pénale des mineurs ne dispose actuellement d'aucune disposition relative à l'accompagnement et la prise en charge de des mineurs non accompagnés. Les conséquences de la non-prise en charge spécifique de ces publics en prison sont délétères. Isolement, troubles et comportements additictifs, automutilations, tentatives de suicide : les faits présentés par Mme Simon sont à prendre avec le plus grand des sérieux. Ainsi, en matière de mesures judiciaires éducatives pour les MNA et alors que la surpopulation carcérale se fait chaque jour ressentir un peu plus, pourquoi ne pas opter pour davantage de placements en centre éducatif fermé ? Pourquoi ne pas investir drastiquement dans cette prise en charge alternative à l'incarcération qui correspond à l'accompagnement médical, psychologique et social adapté aux mineurs non-accompagnés comme à d'autres mineurs faisant l'objet d'une mesure judiciaire éducative ? En Seine-Saint-Denis, les professionnels de la protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) dénoncent un manque criant de moyens afin de suivre les mineurs au sein des maisons d'arrêt comme dans les structures en milieu fermé et ouvert. Leurs justes revendications vont-elles être écoutées ? L'État doit aux MNA un accompagnement afin de garantir leur réinsertion. En effet, l'article 11-2 du code de la justice pénale des mineurs dispose que « les décisions prises à l'égard des mineurs tendent à leur relèvement éducatif et moral ainsi qu'à la prévention de la récidive et à la protection de l'intérêt des victimes ». Or les chiffres le montrent : le placement en centre spécialisé de la protection judiciaire de la jeunesse ou en centre éducatif fermé réduit considérablement les risques psychosociaux et améliore nettement la capacité à se réinsérer et élaborer un véritable projet éducatif et de formation. À l'inverse, les mineurs non accompagnés sortant de détention développent des traumatismes et des troubles psychiatriques aigus, parfois irréversibles et récidivent beaucoup plus. Ainsi, elle l'interroge sur la prise en charge des mineurs non accompagnés en prison et sur les mesures spécifiques à apporter afin de conformer les engagements de l'État aux dispositions de l'article 11-2 du code de la justice pénale des mineurs.

Texte de la réponse