16ème législature

Question N° 18576
de M. Emmanuel Fernandes (Non inscrit - Bas-Rhin )
Question écrite
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > lieux de privation de liberté

Titre > Absence de décret sur loi permettant prévention addiction/VIH en milieu carcéral

Question publiée au JO le : 11/06/2024 page : 4662
Question retirée le: 11/06/2024 (fin de mandat)

Texte de la question

M. Emmanuel Fernandes alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur l'absence de publication du décret d'application de la loi de 2016, qui prévoit d'agir à la fois sur l'équivalence des soins et sur la réduction des risques entre le milieu ouvert et le milieu carcéral. Partant du constat que les maladies ont une prévalence bien plus élevée en milieu carcéral qu'en liberté, la loi du 18 janvier 1994 a confié au ministère chargé de la santé, en lien avec le ministère chargé de la justice, la prise en charge sanitaire des personnes détenues dans l'ensemble des établissements pénitentiaires, afin de garantir l'égal accès aux soins de ces personnes. Cette avancée majeure a ouvert la possibilité à des centaines de milliers de personnes incarcérées de bénéficier d'une amélioration notable des soins en détention. La conséquence directe de cette décision est la diminution drastique du nombre d'épidémies en milieu fermé, qui étaient un véritable fléau et un danger pour la santé publique en général, y compris en milieu ouvert. Malheureusement, la loi de 1994 n'allait pas assez loin en matière de prévention des addictions et de transmission des infections sexuellement transmissibles (IST). Le constat est glaçant : un tiers des personnes qui entrent en prison présentent une problématique d'addiction (hors tabac) et la consommation des produits stupéfiants continue en établissement pénitentiaire. Plus de 40 % des détenus partagent le matériel de consommation (tout particulièrement les seringues) et pratiquement aucune protection n'est disponible lors des rapports sexuels. Le résultat est dramatique : la prévalence du VIH et des hépatites virales est aujourd'hui 6 à 10 fois plus importante en milieu carcéral qu'à l'extérieur. Par ailleurs, ces personnes étant amenées à sortir de prison et à se réinsérer dans la société, c'est un véritable sujet de santé publique qui se présente et qui dépasse largement les frontières des cellules. Pour faire face à ces risques, le 26 janvier 2016, la loi de modernisation du système de santé français a été adoptée. Elle prévoit une politique ambitieuse de réduction des risques en direction des usagers de drogue pour les personnes détenues. Cette politique inclut par exemple, la distribution gratuite de matériel, notamment des seringues stériles et des antidotes en cas de surdose, mais également des distributions de préservatifs ainsi qu'un programme de sensibilisation et de prévention en milieu fermé, assuré par des associations habilitées. M. le ministre l'aura compris, la mise en place de cette prévention est à la fois indispensable et urgente pour lutter efficacement contre les addictions et la diffusion de maladies mortelles. De manière totalement incompréhensible, huit ans plus tard, le décret d'application n'est toujours pas publié et la loi n'est donc pas appliquée. En conséquence, l'accès aux outils de prévention et d'évitement des maladies est quasiment inexistant en prison. Aussi, il lui demande d'alerter le Président de la République ou le Premier ministre au plus vite, afin que ce décret d'application soit publié et de permettre enfin la mise en place des actions de prévention à destination des détenus du pays.

Texte de la réponse