Question au Gouvernement n° 1864 :
Situation en Nouvelle-Calédonie

16e Législature

Question de : Mme Mélanie Thomin
Finistère (6e circonscription) - Socialistes et apparentés

Question posée en séance, et publiée le 22 mai 2024


SITUATION EN NOUVELLE-CALÉDONIE

Mme la présidente . La parole est à Mme Mélanie Thomin.

Mme Mélanie Thomin . Lorsqu'il a eu lieu, à une heure tardive de la nuit, nous savions déjà que le vote du projet de loi constitutionnelle portant modification du corps électoral pour les élections au Congrès et aux assemblées de province de la Nouvelle-Calédonie ne mettrait pas fin à la situation chaotique de l'archipel, pas plus qu'il n'empêcherait son embrasement. Depuis ce vote, six personnes sont mortes et d'autres seraient décédées faute d'avoir pu accéder aux soins dont elles avaient besoin. Mes pensées vont donc vers les familles et les proches des Calédoniens et des gendarmes qui ont perdu la vie, dont fait malheureusement partie l'adjudant-chef finistérien Xavier Salou.

En tant que membre d'une force politique républicaine, je ne peux me résoudre au fait que le vote d'une loi provoque des morts. Les priorités du groupe Socialistes sont de restaurer la paix civile, la paix et la cohésion nationale, mais sans laisser s'écrire le scénario du pire. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Or l'exécutif a tardé à prendre ses responsabilités, alors qu'il avait lui-même contribué à réunir les conditions du cauchemar que vivent en ce moment même les Calédoniens.

Pour cette raison, nous prenons acte – avec soulagement mais sans renoncer à notre vigilance – de la décision du Président de la République de se rendre enfin sur place pour y installer une mission. Ces derniers jours, une grande partie des formations politiques de cette assemblée vous ont exhorté, monsieur le Premier ministre, à tout mettre en œuvre pour apaiser la situation – le retrait du processus constitutionnel, la reprise en main par Matignon ou encore la création d'une mission impartiale.

Alors que votre majorité au Congrès n'est plus assurée, il ne peut plus suffire de rétablir l'ordre. Il est indispensable de faire cesser les violences, mais vous savez aussi que l'accalmie n'adviendra qu'au sein d'un cadre de compromis et de consensus politique. Artisan majeur des accords de Matignon en 1988, Louis Le Pensec avait eu des paroles lumineuses en affirmant « s'apercevoir que la parole politique peut parfois faire taire les fusils. »

Il n'est plus l'heure de soutenir ceux qui prônent le passage en force, mais celle de marcher dans les pas de ceux qui vous ont précédé, de ceux qui ont bâti, grâce à des accords, un destin commun et l'espoir d'une paix durable.

Les escadrons de gendarmerie et les renforts militaires ne peuvent suffire. Dès lors, comment comptez-vous renouer le dialogue empreint de patience qui se conclura par la paix civile en Nouvelle-Calédonie ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

Mme la présidente . La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer . Comme l'a dit le Premier ministre et comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire en réponse à une question précédente, il faut d'abord saluer, comme vous l'avez fait, le travail accompli par les forces de l'ordre en Nouvelle-Calédonie. Il faut également considérer que la reprise du dialogue est conditionnée au retour à la paix civile et à l'ordre public républicain, retour que nous n'obtiendrons qu'en restaurant la liberté de circulation et faisant cesser les menaces de morts qu'essuient les élus, indépendantistes ou non. Pour cette raison, vingt-trois unités de force mobile (UFM) et des agents du Raid – recherche assistance intervention dissuasion – et du GIGN, le groupe d'intervention de la gendarmerie nationale, seront bientôt dépêchés en Nouvelle-Calédonie. De très nombreux fonctionnaires du ministère de l'intérieur, du ministère des armées et d'autres ministères y interviendront également, afin de participer à la reconstruction et de concourir au retour à la normale en Nouvelle-Calédonie, territoire de la République à part entière.

J'entends votre question politique, madame la députée, mais vous ne semblez pas avoir tiré les conclusions des trois référendums qui ont déjà été courageusement organisés sous l'autorité du Président de la République.

M. Sylvain Maillard . Eh oui !

M. Jérôme Guedj . Si vous allez dans cette direction, ça ne va pas le faire !

M. Gérald Darmanin, ministre . Par trois fois, les Calédoniens se sont prononcés contre l'indépendance.

M. Jérôme Guedj. Il fallait organiser le troisième référendum à une autre date !

M. Gérald Darmanin, ministre . Que faut-il faire d'autre que de constater leur expression libre, démocratiquement recueillie à l'occasion des référendums prévus par les accords de Matignon et de Nouméa. Ces accords, vous les citez sans cesse, mais faites fi de leur conclusion, à savoir le refus, répété trois fois, de l'indépendance de la Nouvelle-Calédonie.

Il faut désormais organiser des élections provinciales, car les Calédoniens, comme tous les Français, ont le droit d'exercer le plus beau droit qui soit, celui de voter. J'espère que vous soutiendrez cette démarche, qui n'est que la manifestation de notre démocratie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

M. Sylvain Maillard . Très bien !

Données clés

Auteur : Mme Mélanie Thomin

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Outre-mer

Ministère interrogé : Intérieur et outre-mer

Ministère répondant : Intérieur et outre-mer

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 22 mai 2024

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