16ème législature

Question N° 189
de Mme Sophie Blanc (Rassemblement National - Pyrénées-Orientales )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur et outre-mer
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > police

Titre > Conditions de travail des fonctionnaires de police dans les Pyrénées-Orientales

Question publiée au JO le : 21/02/2023
Réponse publiée au JO le : 01/03/2023 page : 1856

Texte de la question

Mme Sophie Blanc attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur le sujet suivant : son département des Pyrénées-Orientales subit depuis plusieurs années déjà, une explosion des flux de clandestins, engendrée par le laxisme du gouvernement espagnol, adepte du « laisser-faire laisser passer » en matière migratoire, et la proximité géographique des points de passage au travers de la chaîne pyrénéenne. Concrètement cela s'est traduit par plus de 30 000 non-admissions recensées depuis le début de l'année. Les services de la police aux frontières sont débordés. En effet, selon les syndicats, il manque dans le département l'équivalent de 50 fonctionnaires. De plus, au col du Perthus, du fait de locaux inadaptés aux contrôles, la barrière de péage de Le Boulou est devenue la nouvelle frontière administrative, frontière où les fonctionnaires de la police nationale, mais aussi des douanes ou de la gendarmerie, sont réduits à se partager de simples algecos ; sachant que la configuration des lieux et l'absence de voies spécialement aménagées ne permettent pas aux agents d'effectuer les contrôles dans les conditions dignes d'une grande démocratie et, surtout, compatibles avec la sécurité de telles actions. Dans le département des Pyrénées-Orientales, il manque l'équivalent de 30 OPJ afin d'assurer, dans des délais impartis, le traitement judiciaire des affaires, qui augmentent suite à l'arrivée et à la présence efficace d'unités mobiles déployées en renfort sur la voie publique à Perpignan depuis septembre 2022 dans des opérations anti-stup. Ce manque venant s'ajouter à la carence structurelle en policiers titulaires. La pyramide des âges n'est pas non plus très favorable avec des départs à la retraite de policiers confirmés et une inquiétude forte de les voir remplacés par des policiers-adjoints ou bien des réservistes. Mme la députée attire également l'attention de M. le ministre sur l'insalubrité et l'inadaptation de l'hôtel de police de Perpignan, où là aussi, les fonctionnaires ne peuvent assurer dans des conditions dignes l'accueil des victimes et la prise de plaintes, où les avocats et les médecins ne disposent pas de locaux dédiés leur permettant de recevoir clients et patients. Actuellement, les services de la police nationale sont éparpillés en 3 sites, ce qui freine la coordination et l'efficacité des différentes unités et services, générant des surcoûts non négligeables quant aux dépenses de fonctionnement. Il y a donc urgence à voir sortir de terre un nouveau commissariat. La municipalité de Perpignan et son maire Louis Aliot soutiennent le projet sur le site des « Courriers catalans », les services de l'État y travaillent mais quid des délais ? Sur ces deux points de manque d'effectifs et de conditions de travail d'un autre siècle, elle le remercie de sa réponse. Avec ces deux questions et en guise de conclusion, elle lui rappelle ses deux questions écrites : la première, n° 2536, du 25 octobre 2022, sur l'état matériel et humain inquiétant du centre de rétention administrative de Perpignan, qui reçoit des populations d'auteurs de troubles à l'ordre public, de trafics, radicalisés ou sortant de prison, mettant à mal les agents affectés au gardiennage ni assez nombreux ni assez équipés pour faire face à ce nouveau type de public. La seconde, n° 3279, du 22 novembre 2022 traitant de l'augmentation exponentielle de la vente de crack dans la ville de Perpignan. Ce trafic et la population qu'il draine engendre des problématiques de santé publique, une insécurité et des désordres induits qui dépassent aujourd'hui les capacités de la ville, la vente de Stéribox y est de 15 % supérieure à la moyenne observée dans les villes de taille équivalente à Perpignan. Délinquance et prostitution augmentent dans la population de sans domiciles fixe attirée par cette drogue peu chère et extrêmement addictive. Ces deux questions, restées sans réponses à ce jour, traitent, elles aussi de la disparité grandissante des effectifs et des moyens de police face à une situation de sécurité publique en dégradation constante. Mme la députée n'est malheureusement pas certaine, même si elle l'espère, que le projet de loi « immigration » arrive à donner des réponses efficaces à cette situation qui voit, encore une fois, immigration, délinquance et engorgement des services de l'État intiment liés. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.

Texte de la réponse

MOYENS DE LA POLICE DANS LES PYRÉNÉES-ORIENTALES


Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Blanc, pour exposer sa question, n°  189, relative aux moyens de la police dans les Pyrénées-Orientales.

Mme Sophie Blanc. Mon département des Pyrénées-Orientales est, en matière de sécurité, le parent pauvre de la politique du ministère de l'intérieur et des outre-mer. Il subit en effet depuis plusieurs années déjà une explosion des flux de clandestins, causée par le laxisme du gouvernement espagnol en matière migratoire. Concrètement, cela s’est traduit l’année dernière par plus de 30 000 non-admissions recensées.

Les services de la police aux frontières (PAF) sont débordés alors même que, selon les syndicats, il manque depuis longtemps dans le département environ cinquante fonctionnaires affectés à cette mission. De plus, du fait des locaux inadaptés aux contrôles, au Perthus et à Cerbère, points de passages de frontière administrative, c’est la barrière de péage du Boulou, située 10 kilomètres en aval de celle-ci, qui est devenue cette nouvelle frontière, un point de passage autorisé où les fonctionnaires de la police nationale, mais aussi ceux des douanes ou de la gendarmerie, en sont réduits à se partager de simples Algecos, alors que la configuration des lieux et l’absence de voies spécialement aménagées ne permettent pas aux agents d’effectuer les contrôles dans les conditions de sécurité qu’exigent de telles opérations.

Dans le département des Pyrénées-Orientales, il manque l’équivalent de trente officiers de police judiciaire (OPJ) afin d’assurer, dans des délais raisonnables, le traitement judiciaire des crimes et délits qui augmentent de façon importante – crimes et délits liés en partie, et je peux en témoigner en tant qu'avocat, par l’arrivée massive de mineurs non accompagnés (MNA). Ceux-ci se retrouvent très régulièrement mis en cause dans des affaires de délinquance qui fatiguent les habitants de nos quartiers, puisque nous comptons en moyenne trois OPJ pour vingt gardes à vue (GAV).

Face au manque d’effectifs du commissariat de Perpignan, il est vrai que vous avez mis à disposition du préfet un escadron de gendarmerie mobile qui, déployé en renfort sur la voie publique depuis septembre 2022, mène régulièrement des opérations de sécurisation et de lutte contre les trafics en tout genre. Mais la fidélisation de cette unité mobile, prévue pour durer jusqu’au mois de juin et que nous souhaitons voir perdurer, ne doit pas faire oublier la carence structurelle en effectifs de policiers titulaires, affectés à la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) des Pyrénées-Orientales. En outre, la pyramide des âges n’est pas favorable, avec des départs à la retraite de policiers confirmés. Nous sommes inquiets de les voir remplacés par des policiers adjoints ou, même, de les voir compensés par des réservistes.

J’appelle également votre attention sur l’état d’insalubrité de l’hôtel de police de Perpignan : les fonctionnaires ne peuvent assurer l’accueil des victimes ni enregistrer le dépôt des plaintes dans des conditions dignes ; avocats et médecins ne disposent pas de local spécifique leur permettant de recevoir les prévenus et de garantir à chacun la confidentialité qui lui est due. Concrètement, les services de la police nationale sont éparpillés sur trois sites, ce qui nuit à la coordination et à l’efficacité des différentes unités, et provoque un surcroît non négligeable de dépenses de fonctionnement.

Il y a donc urgence à voir sortir de terre un nouveau commissariat où tous les services de la police nationale seraient regroupés, ce qui permettrait d'améliorer leur coordination. Le maire de Perpignan, Louis Aliot, soutient le projet envisagé sur le site des Courriers catalans.

Enfin, je vous rappelle ma question écrite du 25 octobre dernier, restée sans réponse à ce jour, sur l’état matériel et humain inquiétant du centre de rétention administrative (CRA) de Perpignan, qui fait de façon récurrente la une de la presse locale laquelle met régulièrement en exergue l'augmentation du danger pour le personnel encadrant. La situation y est de plus en plus ingérable pour les fonctionnaires, en raison non seulement des nouvelles dispositions nationales visant à placer en rétention les étrangers auteurs de troubles à l'ordre public, de trafics en tous genres, les étrangers radicalisés ou sortant de prison, mais encore de l'inadaptabilité du site.

Je vous remercie, madame la secrétaire d'État, de répondre à ces nombreuses attentes de mon territoire par des actes forts car la situation à la frontière, à l'hôtel de police de Perpignan et au CRA, nous presse.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté.

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté. Nous avons entrepris un renforcement exceptionnel des moyens des forces de l'ordre dans les Pyrénées-Orientales comme partout en France. La circonscription de police de Perpignan dispose désormais d'un effectif de 250 gradés et gardiens de la paix, alors qu'il était de 215 fin 2016. S'y ajoutent trente policiers adjoints. Dans l'ensemble du département, la police nationale s'appuie sur 1 011 agents alors que cet effectif était de 930 fin 2016. Par ailleurs, Perpignan a bénéficié à plusieurs reprises, en 2022, du renfort de forces mobiles et dispose depuis septembre d'une unité de force mobile en sécurisation.

En ce qui concerne le trafic de stupéfiants, au niveau départemental, le nombre d'opérations de démantèlement de points de deal est passé de 114 en 2021 à 392 en 2022. Quatre cent quatre-vingt-dix trafiquants ont été mis en cause, soit une hausse de près de 35 % par rapport à 2021. Pour assécher les points de deal, notre ligne de conduite est claire : harceler les clients grâce au dispositif de l'amende forfaitaire délictuelle : 908 ont été dressées en 2022, soit une hausse de près de 20 %.

Pour ce qui est de l'immigration irrégulière, la récente création d'un nouvel office central spécialisé et les crédits de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi) vont permettre d'accroître les capacités de rétention. Quant au projet de loi que vous évoquez, il va concrétiser notre intransigeance face aux étrangers délinquants mais aussi notre volonté d'améliorer l'intégration.

J'en viens au CRA de Perpignan : priorité a été donnée à des travaux destinés à améliorer ses capacités et sa sécurisation.

En outre, dans votre département, la police aux frontières dispose de 265 gradés et gardiens de la paix, contre 242 en 2017, auxquels s'ajoutent trente-cinq policiers adjoints. Tous corps confondus, ce sont donc 347 agents qui travaillent à la PAF.

Enfin, concernant le projet d'extension de l'hôtel de police de Perpignan, je remercie la mairie d'avoir proposé de céder un terrain pour 1 euro symbolique. Le sujet est encore à l'étude, mais nous y serons attentifs, car il y va des conditions de travail des policiers et d'accueil des victimes.