16ème législature

Question N° 191
de M. Daniel Grenon (Rassemblement National - Yonne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Collectivités territoriales et ruralité
Ministère attributaire > Collectivités territoriales et ruralité

Rubrique > enseignement secondaire

Titre > Fermeture du collège de Bléneau dans l'Yonne

Question publiée au JO le : 21/02/2023
Réponse publiée au JO le : 01/03/2023 page : 1858

Texte de la question

M. Daniel Grenon attire l'attention de Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, sur la fermeture prévue du collège de Bléneau dès la fin de cette année scolaire, annoncée le 10 novembre 2022 par le président du conseil départemental de l'Yonne. Cette décision se justifierait par l'état du collège, qui nécessiterait six millions de travaux et deux ans de fermeture pour les réaliser, le petit nombre d'élèves et « l'intérêt des enfants ». Le rectorat de Dijon a exposé que la baisse démographique dans l'Yonne entraînait mécaniquement la fermeture d'un certain nombre de collèges. Or Bléneau compte 130 collégiens et ce chiffre est stable depuis plus de vingt ans. Le coût de destruction du collège de Bléneau, pourtant fonctionnel et dont la structure est de bonne qualité, est estimé à 600 000 euros et les transports scolaires supplémentaires en car à 300 000 euros par an au moins : la rénovation du collège, qui peut être remis en état pour moins de 1,5 million d'euros, est vite amortie. Le bilan humain, social, économique et environnemental de cette décision semble entièrement négatif : enfants arrachés de leur collège à taille humaine, plus grande fatigue avec les trajets en car, cars plus nombreux sur les routes étroites de la Puisaye, gymnase et piscine privés de leurs usagers. Et surtout, mort annoncée, à plus ou moins court terme, du village de Bléneau, déjà fragilisé. M. le député, soutenu par les parents d'élèves, les commerçants et les associations de Bléneau, demande à Mme la ministre s’il serait possible de surseoir à toute décision définitive en attendant d'examiner, avec toutes les parties prenantes, les autres solutions possibles. Il lui demande aussi si la sauvegarde de toutes les écoles primaires et de tous les collèges en France rurale ne devrait pas être une priorité nationale, au même titre que la proximité d'un médecin ou d'un France services.

Texte de la réponse

FERMETURE DU COLLÈGE DE BLÉNEAU


Mme la présidente. La parole est à M. Daniel Grenon, pour exposer sa question, n°  191, relative au collège de Bléneau.

M. Daniel Grenon. Le 10 novembre 2022, le président du conseil départemental de l'Yonne annonçait la fermeture du collège de Bléneau à la fin de cette année scolaire. Il justifiait cette décision par l'état du collège, nécessitant selon lui 6 millions d'euros de travaux et deux ans de fermeture. Je lui ai écrit le 3 janvier afin de lui demander les éléments sur lesquels se fonde ce chiffrage – courrier resté sans réponse.

Lors d'une visite du collège de Bléneau, le conseil départemental a explicité son estimation, affirmant que le coût standard de rénovation d'un établissement s'élève à 2 000 euros le mètre carré. Dans la mesure où la superficie du collège est de 3 000 mètres carrés, le total s'élève effectivement à 6 millions d'euros. Cela étant, avez-vous déjà entrepris des travaux de rénovation chez vous ? Avec une estimation de 2 000 euros le mètre carré, je crois qu'on se moque du contribuable !

Il est vrai que le conseil départemental n'a effectué aucun investissement ou presque à Bléneau depuis dix ans, voire plus. On a laissé le collège se dégrader, année après année. Cependant, les travaux à réaliser ne représentent que 1,2 million d'euros, loin des 6 millions annoncés. Les travaux pourraient d'ailleurs être effectués classe par classe, pendant les vacances scolaires.

Face à ces éléments, le conseil départemental a avancé d'autres arguments, tels que le petit nombre d'élèves et l'intérêt des enfants.

Selon le rectorat de Dijon, la baisse démographique dans l'Yonne oblige à fermer plusieurs collèges. Or Bléneau accueille 130 collégiens, chiffre stable depuis plus de vingt ans. De plus, les classes comptent plus de vingt-quatre élèves, ce qui est la moyenne nationale.

Surtout, quel peut bien être l'intérêt des enfants, qui devront changer de collège et prendre le car tôt le matin et rentrer plus tard le soir ? Souhaite-t-on que les élèves de la campagne subissent bien inutilement le même stress que ceux de la ville ?

Le coût de destruction du collège a été estimé à 600 000 euros et celui des transports supplémentaires en car à plus de 300 000 euros par an. Ainsi, la rénovation du collège serait vite amortie. J'insiste, pourquoi détruire un collège fonctionnel, qui peut être remis en état pour moins de 1,5 million d'euros ? Le conseil départemental évoque une réflexion menée depuis plus de cinq ans. Peut-être ! Mais sans qu'aucun échange n'ait eu lieu avec les Blénaviennes et les Blénaviens !

Le bilan humain, social, économique et environnemental d'une telle décision me paraît complètement négatif : enfants arrachés à leur collège à taille humaine ; plus grande fatigue en raison des horaires allongés et des trajets en car ; cars plus nombreux sur les routes étroites de la Puisaye ; destruction d'un bâtiment dont la structure est de très bonne qualité et qui ne nécessite que des investissements d'entretien ; gymnase et piscine privés de leurs usagers ; impact sur les collégiens de certaines communes limitrophes du Loiret scolarisés à Bléneau – imaginez la pagaille, car le collège reçoit en effet des élèves relevant de deux académies différentes – ; et surtout mort annoncée de la commune, déjà fragilisée.

Car, vous le savez bien, madame la secrétaire d'État, la fermeture d'un collège signe l'arrêt de mort d'un village. Les commerçants en ont bien conscience : ils ont manifesté avec les parents. Je le répète : quand il n'y a plus de collège ni de familles, les commerces et les artisans disparaissent un à un. Sans enfants, un village cesse de vivre !

Mme la présidente. Veuillez conclure, monsieur le député.

M. Daniel Grenon. Ce qui est en jeu, c'est la survie d'un petit chef-lieu de canton français, image de notre ruralité sacrifiée, une fois de plus, au nom d'une prétendue rationalisation administrative. Ainsi, avec les parents d'élèves, les commerçants et les associations, nous demandons un moratoire d'un an, afin d'examiner les solutions possibles avec toutes les parties prenantes.

J'ajoute qu'après le collège de Bléneau, d'autres semblent dans le viseur du conseil départemental. Pourtant, le 25 mars 2021, le préfet de l'Yonne, le président de la communauté de communes de Puisaye-Forterre et huit maires du canton de Cœur de Puisaye, dont celui de Bléneau, officialisaient leur adhésion au programme Petites Villes de demain, censé relancer une dynamique positive. Quelle incohérence !

Mme la présidente. Monsieur le député, je rappelle que le temps imparti pour chaque question est de six minutes, ce qui inclut la réponse du Gouvernement. Si vous souhaitez que Mme la secrétaire d'État ait le temps de vous répondre, il faut conclure.

M. Daniel Grenon. Je vous en prie, madame la secrétaire d'État.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté.

Mme Sonia Backès, secrétaire d'État chargée de la citoyenneté. La question de la fermeture du collège de Bléneau est antérieure à 2009 et la pertinence de son maintien, eu égard au plan Ambition collèges, a été explicitement questionnée dans la délibération adoptée par la majorité du conseil départemental de l'Yonne en avril 2019.

En 2009, au moment de la fusion des établissements de Saint-Fargeau, Bléneau et Saint-Sauveur-en-Puisaye, le site retenu de Bléneau accueillait plus de 160 élèves. Le territoire connaît une déprise démographique régulière qui, au vu des effectifs scolarisés dans les écoles, se confirme.

La reconstruction du collège de Bléneau, qui est en mauvais état, serait très coûteuse et ne saurait s'envisager en site occupé. Elle nécessiterait donc de libérer les espaces pendant deux années et de scolariser ailleurs les élèves. Par ailleurs, contrairement aux chiffres que vous avancez, le coût des travaux a été estimé à 5 millions d'euros en 2020.

Il n'existe pas, dans le département de l'Yonne, de collège de quatre-vingt-dix élèves, dont on sait que le fonctionnement est difficile en raison de l'impossibilité d'y assurer des services cohérents aux enseignants et de l'absence d'émulation entre les élèves.

Le site récent de Saint-Fargeau accueille actuellement moins d'élèves que celui de Bléneau, mais dispose d'une capacité d'accueil supérieure. L'exemple que vous donnez est celui des collèges de la Nièvre, comme celui de Saint-Amand-en-Puisaye.

S'agissant de la carte scolaire, il convient de préciser que les élèves actuellement scolarisés à Bléneau seront scolarisés non à Saint-Sauveur-en-Puisaye, qui se situe à plus de 20 kilomètres, mais à Saint-Fargeau, qui ne se trouve qu'à 10 kilomètres. Les élèves qui seront dirigés vers le collège Michel-Gondry de Charny-Orée-de-Puisaye sont ceux résidant dans la commune de Champignelles, celle-ci étant davantage tournée vers cette ville que vers Bléneau.

Je précise enfin que le département, en lien avec la région, est très attentif à la question des temps de transport, particulièrement pour les collégiens domiciliés à Bléneau, qui n'étaient pas transportés jusqu'à présent.