16ème législature

Question N° 197
de Mme Sophie Taillé-Polian (Écologiste - NUPES - Val-de-Marne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Travail, plein emploi et insertion
Ministère attributaire > Travail, plein emploi et insertion

Rubrique > emploi et activité

Titre > Situation des EDI franciliens

Question publiée au JO le : 21/02/2023
Réponse publiée au JO le : 01/03/2023 page : 1878

Texte de la question

Mme Sophie Taillé-Polian appelle l'attention de M. le ministre du travail, du plein emploi et de l'insertion sur la situation des établissements dynamiques d'insertion (EDI). Les EDI sont des structures franciliennes qui accompagnent les jeunes les plus éloignés de la formation et de l'emploi, non éligibles au RSA et le plus souvent non ciblés par les dispositifs étatiques existants. Ils mènent de front accompagnement des jeunes dans la construction de leur projet de formation ou de leur entrée dans l'emploi et levée des freins, essentiellement sociaux, pour ce faire. La région Île-de-France a annoncé de manière brutale aux 26 EDI franciliens la fin de la reconduction de l'appel à manifestation d'intérêt pour la période 2023-2026, dans le cadre d'une refonte globale de l'accompagnement de la région en matière de formation et d'insertion professionnelle. Le financement régional des EDI a pris fin au 31 décembre 2022. La période de transition annoncée est pour le moins floue et ne règle pas la question de l'après. Sous couvert de bonne gestion des fonds publics, cette politique de rentabilité appliquée à la formation professionnelle va laisser sur le carreau tous ces jeunes qui ne seront pas en adéquation avec les dispositifs de placement dans l'emploi plus massifs. Les EDI ont pourtant construit des partenariats avec les autres acteurs de la formation professionnelle et de l'insertion de la jeunesse dans les villes, afin de renforcer leur accompagnement. Dans la circonscription de Mme la députée, dans le département du Val-de-Marne, l'EDI porté par l'association Faire est particulièrement actif dans les réseaux d'acteurs de l'insertion et reconnu par les services de l'État notamment comme une structure dynamique et un acteur essentiel pour l'accompagnement de ce public spécifique. Il a ainsi 52 % de sorties directes en emploi ou en formation et plus largement 74 % de sorties positives pour les jeunes, notamment en matière de levée des freins sociaux à cette insertion dans l'emploi. À l'approche du renouvellement du Plan d'investissement dans les compétences (PIC) et des Pactes régionaux d'investissement dans les compétences (PRIC), il semble important que les nouveaux dispositifs prennent en compte le désengagement de la région Île-de-France de sa compétence de formation professionnelle auprès du public jeune le plus éloigné de l'emploi et de la formation. Elle lui demande les différentes solutions qu'il envisage qui pourraient être mises en place au niveau des services de l'État pour permettre à ces structures de poursuivre l'accompagnement de ce public fragile et pour permettre aux jeunes ciblés de poursuivre leur parcours d'insertion.

Texte de la réponse

ÉTABLISSEMENTS DYNAMIQUES D'INSERTION EN ÎLE-DE-FRANCE


Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour exposer sa question, n°  197, relative aux établissements dynamiques d'insertion en Île-de-France.

Mme Sophie Taillé-Polian. Les espaces de dynamique d'insertion (EDI), structures d’insertion propres à l’Île-de-France, soutiennent depuis 1996 les jeunes de 16 à 25 ans les plus éloignés de la formation et de l’emploi, non éligibles au RSA, et qui ne sont généralement ciblés par aucun autre dispositif. Ils mènent de front leur accompagnement dans l'élaboration d'un projet de formation ou d'entrée dans l'emploi et la levée des barrières, essentiellement sociales, qui s'y opposent. Il en existe vingt-six, ce qui représente 150 salariés et 2 500 jeunes pris en charge chaque année.

Or, à la fin de l'année 2022, la région a brutalement annoncé ne pas reconduire pour la période 2023-2026 l'appel à manifestation d'intérêt, autrement dit mettre un terme à ses subventions, lesquelles allaient jusqu'à 250 000 euros par structure. La majorité de Mme Pécresse annonce une refonte globale de l'accompagnement par la région en matière d’insertion professionnelle ; en réalité, elle juge ces structures trop peu rentables, vision des choses que nous contestons. On peut en effet évaluer leur activité par ses résultats : ainsi, 52 % des jeunes de l'EDI de Villejuif passent directement de celui-ci à un emploi ou à une formation, et 74 % connaissent plus largement une sortie positive, notamment en matière de suppression des freins sociaux à l'insertion.

Ces jeunes sont ceux qui sont les plus éloignés de l'emploi. Il y a donc de multiples actions à mener avec eux en amont, et l'on ne peut pas fonder l'allocation de subventions en leur faveur sur le seul fait qu'ils aient un emploi ou une formation.

La région Île-de-France a promis un temps la mise en place d'une subvention de transition pour ces EDI, avant d'acter très récemment une subvention réduite pour deux d'entre eux seulement. Les EDI sont donc en train de licencier, de mettre la clé sous la porte, laissant les jeunes qu'ils accompagnaient sans solution. Ce désengagement va toucher de nombreux jeunes à court terme mais aussi bien sûr tous les jeunes qui, à l'avenir, sortiront du système scolaire sans solution et sans pouvoir même rejoindre les écoles de la deuxième chance, tant ils ont décroché de l'environnement social. Il me paraît important, dans cette situation, que l'État soit au rendez-vous de l'accompagnement de ces jeunes. Quelle solution le Gouvernement peut-il apporter ? Le plan d'investissement dans les compétences (PIC) pourrait notamment leur venir en aide. Tout doit être envisagé pour faire en sorte que les structures qui fonctionnent – je pense notamment à l'association FAIRE de Villejuif – puissent continuer leur travail, qui est essentiel pour nos quartiers.

Mme la présidente. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel.

Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel. Il serait malvenu de commenter la décision démocratique d'un exécutif quel qu'il soit – en l'occurrence d'un conseil régional. Je vais cependant vous apporter une réponse, pour les jeunes : aucun ne mérite une absence d'accompagnement, aucun n'est dépourvu de la capacité de rebondir et de trouver un chemin. Ils ont pour cela des besoins parfois différents, qui peuvent être d'abord sociaux ou bien sanitaires, mais tous nécessitent un accompagnement. Les réponses qui leur sont apportées le sont, en général, par des associations, des missions locales et des écoles de la deuxième chance.

Surtout, il existe des dispositifs nationaux qui ont vocation à perdurer voire à s'améliorer. Je pense en particulier au contrat d'engagement jeune (CEJ) mis en place par le gouvernement précédent, lorsque la Première ministre était ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion, pour faire évoluer la garantie jeunes en l'ouvrant aux jeunes dès l'âge de 16 ans. Ce dispositif offre notamment à des jeunes plus éloignés de l'emploi, ou rencontrant davantage de difficultés sociales, un temps de transition nécessaire avant de rejoindre une école de la deuxième chance, une action du plan d'investissement dans les compétences (PIC), un établissement pour l'insertion dans l'emploi (Epide) ou tout autre dispositif, voire de rejoindre un cursus scolaire de formation continue ou professionnelle. À ce jour, 3 300 jeunes Franciliens ont rejoint les écoles de la deuxième chance et 43 000 ont signé un contrat d'engagement jeune.

Quant au PIC, que vous avez cité, et à sa déclinaison régionale, l'État a alloué plus de 250 millions d'euros supplémentaires à la région depuis 2018, en complément des formations habituelles. Ces budgets sont destinés à accompagner les jeunes les plus éloignés de l'emploi. Aujourd'hui plus que jamais, alors que les transitions et les défis se multiplient, chaque jeune mérite de se voir proposer là où il vit une solution et un accompagnement spécifiques, prenant en considération ses difficultés et ses aspirations.

L'État a également mis en place un volet particulier du contrat d'engagement spécifique destiné aux jeunes en rupture. Cet outil servira à apporter un soutien plus approfondi. Il doit aider à lever les freins que vous avez cités, comme les problèmes de logement et de transport qui, malheureusement, s'ajoutent parfois à d'autres difficultés. Quarante et un projets sont ainsi menés en Île-de-France depuis l'automne 2022, dont huit mobilisent des structures auparavant financées au titre des EDI – ce qui rejoint le point que vous souhaitiez souligner.

Mme la présidente. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.

Mme Sophie Taillé-Polian. Aujourd'hui, ces EDI remplissent une mission particulière. Ils sont en lien avec les missions locales, qui leur envoient des jeunes pour la mise en place de CEJ, notamment. Ils assurent un accompagnement cinq jours sur sept dont les missions locales, qui proposent un accompagnement ponctuel, sont incapables. Il existe une véritable difficulté, d'autant plus que – je puis, moi, le dire – Mme Pécresse supprime violemment les EDI et fragilise les missions locales au travers d'un nouveau mode de financement qui va les mettre en difficulté.