Question orale n° 19 :
Défaillances et dysfonctionnements dans l'accès au réseau de fibre optique

16e Législature

Question de : Mme Patricia Lemoine
Seine-et-Marne (5e circonscription) - Renaissance

Mme Patricia Lemoine interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications, sur les nombreuses difficultés, défaillances et dysfonctionnements rencontrés par les utilisateurs de la fibre optique, en particulier dans les territoires ruraux. Depuis maintenant plusieurs années, la fibre optique se déploie sur l'ensemble du territoire français. Dans les territoires plus ruraux, les travaux de réalisation du réseau ainsi que son exploitation y sont menés par des délégataires et non directement par les opérateurs privés, tels que Orange ou SFR, qui procèdent seulement dans ces territoires au raccordement final des abonnés à leur demande. Toutefois, ce cadre règlementaire qui permet le libre accès au réseau à ces opérateurs commerciaux est générateur de trop nombreux dysfonctionnements et défaillances récurrents, largement préjudiciables aux habitants ainsi qu'aux collectivités locales trop souvent démunies pour y faire face. Ces incidents trouvent en particulier leur origine dans la forte concurrence à laquelle se livrent les opérateurs commerciaux mais également dans leur déresponsabilisation quant aux conséquences de la sous-traitance en cascade à laquelle ils recourent massivement. Le territoire seine-et-marnais est particulièrement victime de ces dysfonctionnements. Nombreux sont ainsi les particuliers, entreprises et collectivités à faire état de dégradations de biens publics lors de raccordements aux nœuds de raccordement optique (NRO) ou de la multiplication d'incidents d'exploitations et de malfaçons (débranchements, actes de malveillance, dispositifs installés de manière anarchique) qui provoquent de nombreuses pannes et interruptions de service pendant parfois plusieurs mois. Ces dernières ne sont d'ailleurs que trop peu prises en charge, les fournisseurs d'accès à internet se dédouanant quasi-systématiquement de leur responsabilité en rejetant la faute sur le délégataire local. Face à cette situation inacceptable, ce sont des milliers d'habitants qui se retrouvent régulièrement privés d'un outil essentiel pour travailler, étudier, s'informer ou encore se soigner. C'est également une perte d'attractivité majeure pour les territoires ruraux, qui sont déjà confrontés à des difficultés structurelles importantes. Dès lors, elle lui demande quelles mesures sont actuellement envisagées par le Gouvernement pour rappeler à l'ordre les acteurs de la fibre optique et mettre fin à l'ensemble de ces dysfonctionnements et aux dérives du modèle de développement actuel de la fibre dans les territoires ruraux, notamment celle des chaînes de sous-traitance.

Réponse en séance, et publiée le 23 novembre 2022

ACCÈS AU RÉSEAU DE FIBRE OPTIQUE
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, n°  19, relative à l'accès au réseau de fibre optique.

Mme Patricia Lemoine. Sous l'impulsion du Gouvernement, qui en a fait une de ses priorités lors du précédent quinquennat, la fibre optique se déploie sur l'ensemble du territoire français. C'est une excellente nouvelle.

À cet effet, les travaux et l'exploitation sont confiés à un délégataire, comme c'est le cas du réseau sem@fibre77 en Seine-et-Marne. Toutefois, ce cadre réglementaire permettant à des opérateurs privés d'accéder librement au réseau entraîne trop de dysfonctionnements qui portent atteinte aux habitants et face auxquels le maire, en raison de la spécificité de cette compétence, se trouve totalement démuni.

Ces incidents s'expliquent en grande partie par la forte concurrence à laquelle se livrent les opérateurs commerciaux, souvent peu scrupuleux quant aux conséquences de la sous-traitance en cascade à laquelle ils recourent massivement.

Ma circonscription y est particulièrement exposée, comme l'ensemble des territoires seine-et-marnais. Je suis régulièrement interpellée à ce sujet lors de mes permanences parlementaires délocalisées dans les communes ou lors de mes échanges réguliers avec les maires. Le constat est partout le même : dégradation de biens publics lors des raccordements au NRO – nœud de raccordement optique –, débranchements, actes de malveillance ou encore installation anarchique de dispositifs, provoquant des pannes dont la durée s'étend de quelques heures à plusieurs mois. Ces dernières sont d'ailleurs trop peu prises en charge, car les fournisseurs d'accès à internet se dédouanent quasi systématiquement de leur responsabilité en rejetant la faute sur le délégataire local.

Cette situation est totalement inacceptable, car elle prive des milliers d'habitants d'un outil essentiel pour travailler, étudier, s'informer ou encore se soigner. Elle entraîne en outre une perte d'attractivité majeure pour les territoires ruraux.

Dès lors, pourriez-vous nous indiquer les mesures envisagées par le Gouvernement pour mettre fin à ces dysfonctionnements et dérives du modèle de développement de la fibre, notamment dans les territoires ruraux ? Est-il envisagé de durcir drastiquement les règles relatives à la sous-traitance en cascade, ou encore de renforcer l'accompagnement des élus locaux dans la sécurisation des armoires de raccordement ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme.

Mme Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme. Je partage votre constat : plusieurs territoires souffrent encore de dysfonctionnements particulièrement graves de l'exploitation du réseau de fibre optique. Comme vous l'avez rappelé, ces difficultés pénalisantes pour le consommateur résultent de plusieurs facteurs : on peut citer le nombre de raccordements annuels très élevé, parfois – disons-le clairement – au détriment de la qualité, ou encore l'existence de réseaux FTTH – fibre optique jusqu'au domicile – historiquement mal dimensionnés et soumis à des processus de contrôle encore insuffisants.

Face à l'accroissement de ces difficultés et aux nombreux signalements qu'elles occasionnent, le Gouvernement et l'Arcep – Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse – ont récemment saisi la filière des télécoms, qui leur a remis en septembre un rapport contenant des propositions très concrètes. Sur ce fondement, un plan organisé en trois axes a été établi.

Le premier axe concerne le renforcement de la qualité des interventions sur le terrain par la création d'une certification destinée aux intervenants et aux entreprises.

Le deuxième axe porte sur le renforcement des contrôles. Ainsi, les opérateurs commerciaux devront désormais transmettre aux opérateurs d'infrastructure leurs plannings d'intervention. En outre, les comptes rendus d'intervention (CRI), dispositif crucial pour valider la qualité réelle des raccordements effectués, seront mis en œuvre. Les opérateurs se sont collectivement engagés à respecter un taux de conformité de 75 % d'ici à la fin de l'année 2022 et de 95 % d'ici à juin 2023.

Le troisième axe concerne la reprise des infrastructures dégradées. Plusieurs opérateurs ont déjà communiqué à l'Arcep un plan de reprise, dont XpFibre, qui opère entre autres le réseau sem@fibre77 en Seine-et-Marne.

Le Gouvernement veille à la mise en œuvre effective des trois axes de ce plan et des engagements pris par les opérateurs. Le contrôle en a d'ailleurs été confié à l'Arcep. Des réunions de suivi sont très régulièrement organisées en comité de concertation, auxquelles sont conviées les associations d'élus et les collectivités. Comptez sur le suivi du Gouvernement au long du déploiement de ce plan pour renforcer et améliorer la qualité des infrastructures et du raccordement de la fibre optique.

Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Lemoine.

Mme Patricia Lemoine. Merci pour ces informations rassurantes qui nous permettront de soutenir les élus locaux, lesquels sont en première ligne : lorsqu'il n'y a plus de fibre, c'est vers les maires que l'on se tourne. Ils sont souvent démunis face à la colère et au mécontentement de leurs administrés.

J'espère que le plan que vous nous annoncez, élaboré avec l'Arcep que j'avais moi-même saisie, permettra des avancées majeures en la matière. En effet, les territoires ruraux ont plus que jamais besoin de la fibre.

Données clés

Auteur : Mme Patricia Lemoine

Type de question : Question orale

Rubrique : Télécommunications

Ministère interrogé : Transition numérique et télécommunications

Ministère répondant : Transition numérique et télécommunications

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 15 novembre 2022

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