ATTRIBUTION DU CRÉDIT D'IMPÔT RECHERCHE À UNE ENTREPRISE DE PRESTATIONS
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Albertini, pour exposer sa question, n° 206, relative à l'attribution du crédit d'impôt recherche à une entreprise de prestations.
M. Xavier Albertini. La souveraineté sanitaire de la France repose notamment sur le soutien apporté aux entreprises et aux innovations, dans un marché fortement concurrentiel où sont présentes des filiales européennes de grandes entreprises le plus souvent américaines. C’est dans cette optique que le crédit d'impôt recherche (CIR) a été mis en place, pour la recherche et le développement des entreprises, quels que soient leur secteur ou leur taille. C’est un grand succès.
Le groupe Creapharm, installé à Reims, dans ma circonscription, a bénéficié de ce dispositif jusqu'en 2021, date à laquelle il n’a pas obtenu l’accord de renouvellement pour son agrément. Ce refus se fonde sur le fait qu'il ne réalise pas de travaux de recherche, mais de la prestation et de l’accompagnement. Pourtant, la division Creapharm Clinical Supplies gère les essais cliniques de nombreuses entreprises, participant ainsi largement au développement scientifique et à la recherche. Le groupe mène actuellement 1 000 essais cliniques dans le monde.
Le non-renouvellement de l'agrément CIR entraîne pour l’entreprise une perte de compétitivité de 30 % ainsi, plus globalement, qu'une perte de chiffre d’affaires et de parts de marché, au bénéfice d’entreprises étrangères. Cela ne manque pas de nous préoccuper et nous nous interrogeons sur la capacité de notre pays à préserver le travail d’un groupe français, familial, à même de concurrencer des entreprises internationales dans le domaine des biotechnologies.
Attribuer le CIR à des entreprises dites partenaires, sur lesquelles repose largement la recherche, permettrait de conserver des leaders en matière scientifique sur le territoire et de protéger la propriété intellectuelle. La crise sanitaire a démontré que l'enjeu était de taille.
Je souhaite savoir si un aménagement des critères d’attribution de l’agrément peut être envisagé, dans le cas où l’entreprise n’appliquerait pas de déduction fiscale grâce à ce dernier.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Mme Sylvie Retailleau, ministre de l'enseignement supérieur et de la recherche, que vous voudrez bien excuser, m'a chargée de vous répondre.
L'agrément au titre du crédit d'impôt recherche est nécessaire pour qu'un donneur d'ordre puisse déclarer au CIR des dépenses de recherche et développement qu'il sous-traite à une structure privée ou publique. L'agrément est délivré à la structure qui réalise la sous-traitance sur la base d'une expertise scientifique ; il atteste que la structure a le potentiel pour faire de la recherche et développement par ses propres moyens. Ainsi, l'agrément permet l'éligibilité de la sous-traitance au CIR pour le donneur d'ordre, tout en s'assurant de la qualité. Mme Retailleau remercie à ce titre les équipes qui ont traité 2 780 demandes en 2022, ce qui représente environ 800 millions d'euros de créances.
L'agrément a été refusé au groupe Creapharm, au motif qu'il ne réalisait pas des travaux de recherche, mais de la prestation et de l'accompagnement en conditionnement. Creapharm a bien formulé une demande en 2020, puis une autre en 2022 ; dans l'intervalle, ses représentants ont été reçus par les services du ministère, qui ont expliqué la situation et apporté leurs conseils. Mais le rapport d'expertise est formel et on ne saurait s'en éloigner.
Vous avez souligné que la perte de compétitivité vis-à-vis de concurrents agréés au CIR entraînait une perte de parts de marché. Les services du ministère le concèdent. Mais un agrément accordé au titre des activités de recherche et développement se limite à ces dernières. D'ailleurs, un concurrent qui ferait valoir cet agrément pour d'autres activités s'exposerait à un contrôle et à un redressement fiscal.
Dans ce contexte, les échanges avec les dirigeants de l'entreprise ont révélé la nécessité de réserver l'agrément aux seules activités sous-traitées éligibles. Le ministère travaille sur ce point afin d'améliorer structurellement le dispositif, sans le complexifier pour autant.
Mme la présidente. La parole est à M. Xavier Albertini.
M. Xavier Albertini. Merci pour votre réponse que je ne manquerai pas de transmettre aux dirigeants de Creapharm. À la suite de vos propos, permettez-moi de formuler un regret, le fait que le CIR demeure d'une grande complexité, en particulier pour les entreprises françaises, et un espoir, celui que les filiales puissent bénéficier un jour de ce dispositif, sous réserve du respect d'un certain nombre de règles.
Je ne change rien à ce que j'ai dit ici il y a quelques semaines à propos des aides publiques aux entreprises : il est important de libérer les énergies. Nous avons, en France, des hommes et des femmes particulièrement compétents, qui sont le cœur battant de la compétitivité nationale. Après vous avoir écoutée, je souhaite que nous puissions tenir rapidement une réunion afin de faire avancer le dossier de cette entreprise, emblématique de bien d'autres en France.