16ème législature

Question N° 213
de Mme Virginie Duby-Muller (Les Républicains - Haute-Savoie )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Justice
Ministère attributaire > Justice

Rubrique > justice

Titre > Difficultés du tribunal de Thonon

Question publiée au JO le : 28/02/2023
Réponse publiée au JO le : 08/03/2023 page : 2213

Texte de la question

Mme Virginie Duby-Muller alerte M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le manque de moyens dont souffre le tribunal judiciaire de Thonon. En effet, en moyenne, le Parquet fonctionne avec 2,4 magistrats pour 100 000 habitants. Si l'on applique ce ratio, le tribunal de Thonon aurait besoin de 9 magistrats contre 6 actuellement pour fonctionner correctement. À cela, s'ajoute une pénurie de greffiers : 20 % des postes sont vacants à Thonon et 30 % à Annemasse. Quant aux conditions de détention, elles sont extrêmement problématiques : le parc pénitentiaire non seulement n'est pas adapté mais reste saturé : c'est notamment le cas dans la prison de Bonneville. En Haute-Savoie, toute la chaîne pénale est aujourd'hui sous tension. Il est donc urgent d'agir alors que l'activité pénale est en très nette hausse. Aussi souhaite-t-elle connaître les mesures que le Gouvernement envisage de mettre en œuvre afin de permettre au tribunal de Thonon de fonctionner sereinement.

Texte de la réponse

DIFFICULTÉS DU TRIBUNAL DE THONON


M. le président. La parole est à Mme Virginie Duby-Muller, pour exposer sa question, n°  213, relative aux difficultés du tribunal de Thonon. M. le garde des sceaux a confié à M. le secrétaire d'État Hervé Berville le soin de lui répondre.

Mme Virginie Duby-Muller. Ma question s'adressait en effet au garde des sceaux et je remercie le secrétaire d'État chargé de la mer de bien vouloir me répondre à sa place.

Je souhaite appeler l'attention du ministère de la justice sur le manque de moyens dont souffre le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains. En moyenne, le parquet fonctionne avec 2,4 magistrats pour 100 000 habitants. Si l'on applique ce ratio, le tribunal de Thonon aurait besoin de neuf magistrats, contre six actuellement, pour fonctionner correctement. À cela s'ajoute une pénurie de greffiers : 20 % des postes sont vacants à Thonon et 30 % à Annemasse. Ce phénomène est évidemment lié au coût de la vie et du foncier.

Quant aux conditions de détention, elles sont extrêmement problématiques, comme dans l'ensemble des prisons françaises. Non seulement le parc pénitentiaire n'est pas adapté, mais il reste saturé en raison de la surpopulation carcérale, ce qui entraîne promiscuité, manque d'intimité, sommeil à même le sol, absence de séparation des différentes catégories de détenus et augmentation des tensions et violences – je pense par exemple à l'agression mortelle d'un prisonnier sur son codétenu qui a eu lieu au centre pénitentiaire d'Aiton, en Savoie, le 10 février, ou encore à une bagarre en septembre dans le quartier des mineurs de la prison de Bonneville, maison d'arrêt en proie à une surpopulation carcérale et qui pâtit de sous-effectifs chroniques que dénoncent d'ailleurs les agents pénitentiaires.

En Haute-Savoie, toute la chaîne pénale est aujourd'hui sous tension car en ce qui concerne les forces de l'ordre, le constat est le même : leurs effectifs sont jugés insuffisants. Policiers et gendarmes ont de plus en plus de travail sur le terrain et doivent effectuer en plus des formalités administratives lourdes et chronophages, notamment les transferts des détenus. Ils ont donc moins de temps à consacrer à leurs investigations et aux appels d'urgence des habitants. Il est urgent d'agir, alors que l'activité pénale est en très nette hausse dans notre département. Les mesures à prendre sont simples : augmenter les moyens de la justice pour créer plus de places de prison et renforcer les effectifs humains.

Dès lors, monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures entend mettre en œuvre le garde des sceaux pour permettre à la chaîne pénale de fonctionner correctement en Haute-Savoie comme sur l'ensemble du territoire ?

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer. Tout d'abord, je vous remercie, madame la députée, pour votre implication sur ce sujet dans votre territoire. Je sais qu'il est important pour vous que l'État et les services publics soient présents sur nos territoires. Je vais vous transmettre une réponse qui devrait être la plus précise possible s'agissant des enjeux judiciaires que vous évoquez.

Comme vous le savez, l'activité du tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a justifié la création d'un poste de juge non spécialisé en 2022, faisant ainsi passer le nombre total de postes localisés à vingt-trois, dont dix-sept au siège et six au parquet. Si actuellement les effectifs du parquet de Thonon-les-Bains sont au complet, ceux du siège connaissent deux vacances de postes qui n'ont pu être pourvus sur le vecteur de la transparence annuelle publiée le 17 février 2023. Le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains bénéficie en plus de deux juristes assistants, un au siège et le second au parquet. S'agissant des effectifs de greffe, il est prévu l'arrivée d'un greffier en mobilité le 1er juin 2023. Un recrutement d'adjoints administratifs par la voie contractuelle réservée aux titulaires d'une reconnaissance de travailleur handicapé est également prévu, avec une prise de fonction le 1er juin 2023. Enfin, dans le cadre du plan de soutien à la justice de proximité, le tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains a reçu le renfort de trois contractuels de catégorie A, dont l'un dédié à la lutte contre les violences intrafamiliales, de quatre contractuels de catégorie B et de deux contractuels de catégorie C. Soyez assurée que les services du ministère de la justice continueront de porter une attention particulière au tribunal judiciaire de Thonon-les-Bains, notamment dans le cadre de l'élaboration des mouvements de nomination, dans toute la mesure des possibilités offertes par les candidatures exprimées.

Vous le savez, le garde des sceaux mène une action volontariste pour augmenter les moyens de ce tribunal et plus généralement de tous les tribunaux judiciaires de France, action qui aboutira grâce au vote par l'Assemblée nationale – nous l'espérons – d'une loi de programmation qui prévoira 7,5 milliards supplémentaires en cinq ans pour porter le budget de la justice à près de 11 milliards, et permettra d'engager 1 500 magistrats et 1 500 greffiers et de finaliser le plan de 15 000 nouvelles places de prison. De plus, la création de 10 000 postes de gendarmes et de policiers depuis cinq ans permet d'avoir une action pleinement coordonnée entre la police, la gendarmerie et la justice.

Je vous remercie pour cette question, qui a permis au garde des sceaux de vous montrer que les moyens sur le terrain arrivent et qu'il poursuivra cet effort. Aussi vous invite-t-il à voter la loi de programmation de la justice.