16ème législature

Question N° 214
de M. Jean-Luc Bourgeaux (Les Républicains - Ille-et-Vilaine )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Mer
Ministère attributaire > Mer

Rubrique > aquaculture et pêche professionnelle

Titre > Accords entre l'UE et la Norvège sur l'activité des navires français

Question publiée au JO le : 28/02/2023
Réponse publiée au JO le : 08/03/2023 page : 2210

Texte de la question

M. Jean-Luc Bourgeaux appelle l'attention de M. le secrétaire d'État auprès de la Première ministre, chargé de la mer, sur les impacts du blocage des négociations sur les accords entre l'Union européenne et la Norvège sur l'activité des navires français. La position inflexible des irlandais sur l'accès à l'Irish Box bloque toute marge de manœuvre au sein des négociations et ce au détriment de l'intérêt général des autres flottilles européennes et de la stabilité relative instaurée par la PCP. Force est de constater que les Norvégiens ayant perdu l'accès aux eaux écossaises pour la pêche du merlan bleu considèrent que l'accès à l'Irish Box est une condition sine qua non à la signature de l'accord. Il lui demande de lui indiquer si des avancées sur ce dossier pourront être obtenues d'ici le prochain conseil de pêche.

Texte de la réponse

ACCORDS ENTRE L'UNION EUROPÉENNE ET LA NORVÈGE SUR L'ACTIVITÉ DES NAVIRES FRANÇAIS


M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Bourgeaux, pour exposer sa question, n°  214, relative aux accords entre l'Union européenne et la Norvège sur l'activité des navires Français.

M. Jean-Luc Bourgeaux. Ma question concerne les impacts, pour l'activité des navires français, du blocage des négociations relatives à l'accord entre l'Union et la Norvège sur les accès réciproques. Du fait de ce blocage, l’activité de toute une partie de la flotte de pêche démersale de l’Union européenne est suspendue, notamment celle du navire congélateur Émeraude, qui cible le cabillaud arctique, et potentiellement celle des chalutiers pêche fraîche de l’armement Euronor, qui ciblent le lieu noir. Les conséquences économiques sont considérables pour les flottilles de l'Union européenne et plus d’une centaine de navires européens pourraient rester à quai – soit environ 2 000 marins.

Force est de constater que les Norvégiens, qui ont perdu l’accès aux eaux écossaises pour la pêche du merlan bleu, considèrent que l’accès à l’Irish box est une condition sine qua non à la signature de l’accord. Leur demande se concentre principalement sur le merlan bleu et la crevette du Groenland prélevés sur les parts danoise et française. Or la position inflexible des Irlandais s'agissant de l’accès à l’Irish box bloque toute marge de manœuvre dans les négociations, au détriment de l’intérêt général des autres flottilles européennes et de la stabilité relative instaurée par la politique commune de la pêche (PCP). Une proposition française de compromis pourrait néanmoins être trouvée pour un accès limité à la partie nord-ouest de l'Irish box.

Il est urgent de trouver un compromis ou un accord avec l'Irlande, sans quoi plusieurs pays européens tels que la France, l’Espagne, l’Allemagne et le Portugal n’auront plus accès au cabillaud arctique et la flottille hauturière française sera affectée dans son ensemble. Pouvez-vous nous dire, monsieur le secrétaire d'État, si des avancées ont pu être obtenues lors du dernier Conseil des ministres de l'Union européenne en charge de de la pêche pour dénouer cette situation de blocage ? Les enjeux sont majeurs pour l'équilibre financier des deux armements concernés.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État chargé de la mer.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État chargé de la mer. Je voudrais d'abord vous remercier, monsieur le député, pour votre implication en faveur du territoire breton et de la pêche française ; je sais que vous suivez de près les sujets qui les concernent. Comme vous l'avez très justement expliqué, les négociations en cours entre l'Union européenne et la Norvège sont aujourd'hui bloquées. L'absence d'accord empêche nos pêcheurs d'aller pêcher le cabillaud arctique dans les eaux norvégiennes. Ce qui se joue ici, c'est la pérennité de la pêche française et la solidité des armements que vous avez mentionnés.

La Norvège réclame l'accès à l'Irish box, une zone de pêche située entre la Grande-Bretagne et l'Irlande, et la réduction drastique des accès européens à ses stocks démersaux. Aucune de ces éventualités n'est satisfaisante : elles pénaliseraient soit la flotte irlandaise, soit les flottes danoise, suédoise et allemande. Comme je l'ai de nouveau évoqué avec le commissaire européen à la pêche M. Sinkevicius la semaine dernière, la France a donc donné mandat à la Commission pour défendre une position extrêmement ferme vis-à-vis de la Norvège. La Commission continue de négocier en utilisant tous les leviers à sa disposition pour parvenir à une solution satisfaisante. Je souhaite, avec mes collègues du Gouvernement, que nous parvenions à un accord le plus rapidement possible : comme vous le savez, les armements ne peuvent pas demeurer en situation de blocage et la pêche française vit une accumulation de crises liées au covid, au Brexit ou encore au gazole.

Cela est d'autant plus important que nous avons obtenu de belles avancées lors du Conseil des ministres de l'Union européenne en charge de la pêche qui s'est réuni en décembre dernier, notamment dans le cadre de l'accord sur les totaux admissibles de capture (TAC) et les quotas, avec le maintien des possibilités de pêche au cabillaud dans les eaux norvégiennes du Svalbard jusqu'au 1er avril. Les modalités en seront fixées très prochainement.

Soyez assuré que je suis ce dossier de très près, car j'ai la conviction qu'il constitue un élément primordial de la capacité de la pêche française à défendre ses intérêts. À travers la prolongation des aides au gazole accordées aux entreprises de pêche, pour un montant avoisinant désormais plus de 100 millions d'euros, la décarbonation de la filière d'ores et déjà engagée et la bataille menée pour défendre les intérêts et les quotas français, nous agissons afin de garantir la souveraineté alimentaire de notre pays et la capacité économique et financière des entreprises que vous avez mentionnées. Nous entendons poursuivre dans cette voie.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Bourgeaux.

M. Jean-Luc Bourgeaux. Je vous remercie de cette réponse ; je sais à quel point vous êtes engagé pour défendre la pêche française. Toutefois, à la différence des Norvégiens, les zones de report d'effort de pêche sont quasi inexistantes pour les navires français. Le quota accordé à la France pour la pêche du lieu noir ne pourra pas suffire à couvrir l'activité de tous les navires. Il faut également rappeler la situation dans la zone du Svalbard : depuis 2021, la Norvège refuse de rétrocéder à l'Union européenne un quota de 5 000 tonnes de cabillaud. Comme vous l'avez rappelé, le temps presse et il est urgent de trouver des solutions.

M. le président. La parole est à M. le secrétaire d'État.

M. Hervé Berville, secrétaire d'État. Vous avez raison, le temps presse. C'est la raison pour laquelle j'ai évoqué ce dossier la semaine dernière avec le commissaire européen. Je l'évoquerai de nouveau la semaine prochaine, lors du Conseil européen : nous défendrons, avec d'autres pays, une position très ferme afin d'aboutir à un accord. La pêche est en effet un sujet politique prioritaire pour le Gouvernement et pour la Commission européenne. Comptez sur moi pour continuer à me battre.