16ème législature

Question N° 240
de Mme Charlotte Leduc (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Moselle )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transports
Ministère attributaire > Transports

Rubrique > transports

Titre > Transports publics en Moselle, il est urgent de réagir !

Question publiée au JO le : 21/03/2023
Réponse publiée au JO le : 29/03/2023 page : 3130

Texte de la question

Mme Charlotte Leduc interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la gestion plus que discutable des investissements étatiques dans les transports en Moselle. M. le ministre connaît la situation catastrophique de la ligne ferroviaire Nancy-Metz-Luxembourg. Des milliers de travailleurs et de travailleuses frontaliers empruntent cette ligne quotidiennement pour se rendre au Luxembourg et leurs conditions de voyage sont intolérables. Les retards se multiplient et les trains sont en permanence bondés si bien que nombreux sont ceux qui se détournent du train et privilégient la voiture. C'est une aberration écologique. Pourtant, cette situation n'a rien d'étonnant tant les investissements sur cette ligne ont manqué ces dernières années. Alors que le nombre de travailleurs frontaliers continue d'augmenter et devrait atteindre les 160 000 en 2040, il est urgent de réagir. Le Gouvernement a certes promis 100 milliards d'euros d'investissements ferroviaires à l'échelle nationale d'ici 2040 en comptant les apports des régions et de la SNCF. Mais pour que cet engagement en faveur du train soit crédible et efficace, il doit être total. Comment croire que ce plan va permettre une bifurcation écologique radicale des modes de transports quand l'État continue à financer des projets polluants ? C'est le cas en Moselle avec le projet d'autoroute A31 bis qui doit permettre d'augmenter le flux quotidien de voitures vers le Luxembourg. Cette nouvelle autoroute est un non-sens à plus d'un titre. En rendant l'A31 plus attractive, l'État favorise le développement de la voiture au détriment du train et des mobilités vertes. Après deux condamnations pour inaction climatique, l'État va encore faire un pas qui l'éloigne de la réalisation de ses objectifs climatiques. Ce projet coûte 2 milliards d'euros qui seraient bien plus utiles ailleurs, et Mme la députée ne parle même pas de tous les coûts cachés que la collectivité va devoir supporter. Une autoroute supplémentaire, c'est plus de gaz à effets de serre et de particules fines responsables de 5 000 décès par an dans la seule région Grand-Est. Une autoroute supplémentaire, ce sont des accidents et des nuisances qui pèsent sur les comptes sociaux. Une autoroute supplémentaire, c'est une facture climatique qui s'alourdit sans cesse et qu'il faudra bien régler un jour. Une autoroute supplémentaire, ce sont des péages à régler qui vont peser sur le pouvoir d'achat des concitoyennes et des concitoyens puisque l'A31 bis sera payante. Des milliards d'euros vont donc être dépensés pour cette autoroute inutile tandis que les usagers de la ligne de train, eux, vont devoir s'armer de patience. Le 2 mars 2023, à la gare de triage de Woippy, M. le ministre déclarait : « Je sais qu'il y a beaucoup d'impatience, mais des travaux doivent être réalisés sur le réseau pour améliorer le cadencement, la régularité et la fiabilité des trains. Et puis le grand projet de RER métropolitains, une ambition à dix ans : c'est typiquement sur le sillon lorrain que nous ferons ces investissements ». Bref, pour l'autoroute l'argent est là, pour le train il faudra attendre 10 ans pour voir une amélioration de l'offre de transports. Et encore, rien de précis ne concerne la ligne Nancy-Metz-Luxembourg dans les annexes du rapport du COI, si ce n'est les projets d'investissements déjà planifiés et cofinancés - de manière insuffisante - par la France et le Luxembourg. Avant de créer des « RER métropolitains », elle lui demande s'il ne croit pas qu'il serait bon de s'assurer que les lignes existantes fonctionnent et si nous voulons préparer l'avenir et lutter concrètement contre le dérèglement climatique, alors il faut des actes forts. Elle lui demande de renoncer à ce projet d'autoroute dont personne ne veut et redéployez les milliards concernés vers l'amélioration immédiate de la ligne Nancy-Metz-Luxembourg. Les usagers des services publics de transports attendent des actions concrètes au-delà des effets d'annonces. Elle lui demande quelles garanties il peut leur donner aujourd'hui qu'ils seront écoutés et considérés et quelles réponses il peut leur apporter afin qu'ils bénéficient rapidement d'une ligne de train à la hauteur de leurs attentes légitimes.

Texte de la réponse

TRANSPORTS PUBLICS EN MOSELLE


M. le président. La parole est à Mme Charlotte Leduc, pour exposer sa question, n°  240, relative aux transports publics en Moselle.

Mme Charlotte Leduc. Elle porte sur la gestion très discutable des investissements étatiques dans les transports en Moselle. Vous connaissez la situation catastrophique de la ligne ferroviaire Nancy-Metz-Luxembourg, qu'empruntent quotidiennement des milliers de travailleurs frontaliers. Les conditions de voyage y sont intolérables – les retards se multiplient, les trains sont constamment bondés aux heures de pointe, les malaises de voyageurs sont très fréquents et les contrôleurs, que j'ai également rencontrés, travaillent en mode très dégradé –, si bien que de nombreux voyageurs se détournent du train pour prendre la voiture, souvent à contrecœur, ce qui constitue une aberration écologique.

Cette situation n'a pourtant rien d'étonnant, car les investissements sur cette ligne ont manqué dans les récentes années, alors même que le nombre de travailleurs frontaliers continue d'augmenter et devrait passer de 120 000 à 160 000 en 2040. Il est urgent de réagir.

Le Gouvernement a certes promis 100 milliards d'euros d'investissements ferroviaires à l'échelle nationale d'ici à 2040, en comptant les apports des régions et de la SNCF, mais pour que cet engagement en faveur du train soit crédible et efficace, il doit être total. En effet, comment croire que ce plan permettra une bifurcation écologique radicale de nos modes de transports, quand l'État continue également de financer des projets polluants, comme le projet d'autoroute A31 bis en Moselle qui augmentera le flux quotidien de voitures vers le Luxembourg ?

Cette nouvelle autoroute est un non-sens à plus d'un titre. Premièrement, en rendant l'A31 plus attractive, l'État favorise le développement de la voiture au détriment du train et des mobilités vertes. Après avoir été condamné à deux reprises pour inaction climatique, il s'apprête ainsi à faire un nouveau pas qui l'éloigne de la réalisation de ses objectifs climatiques.

Deuxièmement, les 2 milliards d'euros que coûtera le projet seraient bien plus utiles ailleurs, sans même mentionner tous les coûts cachés que la collectivité devra supporter. En effet, la construction d'une autoroute supplémentaire signifie l'accroissement des gaz à effets de serre et des particules fines, responsables de 5 000 décès par an dans la seule région Grand Est, la multiplication des accidents et des nuisances qui pèsent sur les comptes sociaux, ou encore l'alourdissement constant d'une facture climatique qu'il faudra bien régler un jour. Elle conduira enfin à la diminution du pouvoir d'achat des habitants, qui devront s'acquitter quotidiennement de péages, car l'A31 bis sera payante – et relativement chère, étant donné les projets présentés. Des milliards d'euros seront donc dépensés pour une autoroute inutile, tandis que les usagers de la ligne de train, eux, devront s'armer de patience.

Le 2 mars, à la gare de triage de Woippy, M. le ministre délégué chargé des transports déclarait : « Je sais qu'il y a beaucoup d'impatience, mais des travaux doivent être réalisés sur le réseau pour améliorer le cadencement, la régularité et la fiabilité des trains ». Et de citer « le grand projet de RER métropolitain, une ambition à dix ans : c'est typiquement sur le sillon lorrain que nous ferons ces investissements ». Bref, l'argent est immédiatement disponible lorsqu'il s'agit de l'autoroute, mais il faudra attendre dix ans pour voir une amélioration de l'offre de transports ferroviaires. Et encore, les annexes du rapport du Conseil d'orientation des infrastructures (COI) ne contiennent rien de précis concernant la ligne Nancy-Metz-Luxembourg.

Ne croyez-vous pas qu'avant de créer des RER métropolitains, il serait bon de s'assurer que les lignes existantes fonctionnent ? Si vous voulez préparer l'avenir et lutter concrètement contre le dérèglement climatique, il faut des actes forts. Il faut renoncer à ce projet d'autoroute dont personne ne veut et redéployer les milliards concernés vers l'amélioration immédiate de la ligne Nancy-Metz-Luxembourg. Quelles garanties pouvez-vous donner aux voyageurs pour qu'ils se sentent écoutés et considérés ? Quelles réponses pouvez-vous leur apporter afin qu'ils bénéficient rapidement d'une ligne de train à la hauteur de leurs attentes légitimes ? (M. Éric Coquerel et M. René Pilato applaudissent.)

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement. Il n’y a pas lieu d’opposer au développement de l’offre ferroviaire la poursuite du projet A31 bis. Comme l'a dit la Première ministre et comme le ministre délégué chargé des transports le répète régulièrement, notre priorité est le ferroviaire, et nous réduirons, pour atteindre nos objectifs en la matière, les crédits alloués aux nouveaux projets routiers.

Le projet d’A31 bis s’inscrit dans le cadre d’une réflexion en faveur d’une politique de déplacement multimodale sur le sillon lorrain, aucun mode n’étant capable d’absorber seul les flux de voyageurs et de marchandises attendus à moyen terme. Les concertations et études se poursuivent donc. La récente concertation avec le public local au sujet du secteur nord de l'A31 bis a mis en lumière une forte attente concernant l'amélioration du fonctionnement de l’A31, qui présente d'importantes congestions aux heures de pointe. Contrairement à ce que vous sous-entendez, le financement de ce projet proviendrait du péage et ne se ferait donc pas aux dépens de projets ferroviaires.

Le renforcement de l’axe ferroviaire Nancy-Metz-Luxembourg fait d’ores et déjà l’objet d’investissements significatifs pour répondre aux besoins de mobilité transfrontalière en forte croissance, afin de créer un véritable service express métropolitain. Comme vous le savez, ces investissements s'inscrivent dans le cadre d’un protocole d’accord entre la France et le Luxembourg signé en 2018 et modifié en 2021, par lequel les deux pays ont décidé de consacrer près de 440 millions d'euros à la ligne Nancy-Metz-Luxembourg à l’horizon 2030, selon une répartition paritaire. Des investissements, dont certains sont déjà réalisés, ont été engagés pour répondre dès 2024 à la saturation de cet axe ferroviaire. Une seconde phase d'amélioration capacitaire a également été identifiée à l'horizon 2030 grâce à l'augmentation de la puissance électrique disponible ; à la reprise du plan de voies à Thionville ; à des aménagements du nœud ferroviaire de Metz, ou encore à la création de deux sas fret.

M. le président. La parole est à Mme Charlotte Leduc.

Mme Charlotte Leduc. L'autoroute est une solution du passé. Il convient d'investir réellement dans le ferroviaire, notamment dans le fret, et d'envisager divers modes de transports en commun alternatifs. Il importe également de mettre en question le modèle économique qui rend la Moselle dépendante du Luxembourg et de développer le télétravail. En somme, il existe bien d'autres solutions que cette autoroute dont les riverains ne veulent pas.