16ème législature

Question N° 257
de Mme Stéphanie Galzy (Rassemblement National - Hérault )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Solidarités, autonomie et personnes handicapées
Ministère attributaire > Solidarités, autonomie et personnes handicapées

Rubrique > professions et activités sociales

Titre > Précarité financière des assistants maternels victimes d'impayés

Question publiée au JO le : 21/03/2023
Réponse publiée au JO le : 29/03/2023 page : 3140

Texte de la question

Mme Stéphanie Galzy alerte M. le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées sur la situation de précarité financière des assistants maternels impayés. Le réseau des assistants maternels, fort de 256 000 professionnels en 2019, constitue une force indispensable dans l'accueil de la petite enfance en France. Or, malgré leur rôle fondamental pour les familles, nombreux sont ceux qui se retrouvent en situation de précarité face aux impayés et aux escroqueries. Aujourd'hui, dans la situation où un assistant maternel fait face à des salaires impayés, il doit, à ses frais, engager les poursuites financières, sans garantie de recouvrer ces derniers si le particulier employeur est déclaré insolvable. Les assistants maternels sont en quelque sorte condamnés à la double peine : payer les frais de justice et d'huissier et ne pas récupérer les salaires impayés. Elle l'alerte sur cette situation et lui demande s'il va agir immédiatement pour que les assistantes maternelles perçoivent leur salaire dû et qu'elles soient indemnisées des frais engagés face à cette situation.

Texte de la réponse

ASSISTANTS MATERNELS VICTIMES D'IMPAYÉS


M. le président. La parole est à Mme Stéphanie Galzy, pour exposer sa question, n°  257, relative aux assistants maternels victimes d'impayés.

Mme Stéphanie Galzy. M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, auquel ma question s'adressait, étant absent ce matin, je vous remercie par avance, madame la ministre, d'y répondre.

Je souhaite vous alerter sur la situation de précarité financière des assistants maternels qui, je vous le rappelle, ne gagnent pas l'équivalent d'un Smic par enfant gardé mais 1 400 euros net par mois en moyenne et non 4 000 euros comme cela a été dit dans cet hémicycle.

Dans le cadre de mon mandat, je suis allée à la rencontre d'assistantes maternelles. Lorsque j'ai pris connaissance de la situation dans laquelle elles se trouvent, j'ai été sidérée. L'histoire d'une de ces femmes, Alexandra, m'a particulièrement touchée. Elle était assistante maternelle dans ma circonscription. Aujourd'hui, elle n'exerce plus, victime, comme bien d'autres, d'une escroquerie qui apparaît comme un fléau national.

Elle consiste, pour les parents employeurs, à déclarer les salaires mais sans jamais les verser. Si la justice plaide en faveur des assistants maternels, les commissaires ne récupèrent pas les indemnisations promises par le tribunal. C'est pourquoi les professionnels restent impayés et doublement pénalisés par les frais occasionnés – huissiers, avocats – à cause de mauvais payeurs qui s'organisent pour frauder, en profitant gratuitement de leurs services.

Ces fraudes commises par des parents bien peu scrupuleux qui font garder leurs enfants sans jamais rien payer mais encaissent les aides grâce à de fausses déclarations sont trop nombreuses. Une telle situation est inadmissible. Il s'agit de l'argent des Français versé au nom de la solidarité nationale. En organisant leur insolvabilité, les parents employeurs échappent à des condamnations et à des peines qui ne sont pas appliquées.

Nous sommes face à une double urgence. La santé des assistants maternels est en jeu. Aucun soutien psychologique n'est prévu pour ces personnes victimes d'une injustice et qui souffrent d'insomnie, de tension, de stress, de dépression. Et, alors qu'elles subissent pendant des années des procédures vaines et assument des frais de justice ou de procès qui leur créent des difficultés financières, personne ne défend leurs intérêts.

Je vous ai donné l'exemple d'Alexandra mais combien d'autres femmes et hommes sont confrontés à ce problème ? Combien faudra-t-il de cas avant que vous réagissiez ? Cette situation n'ayant que trop duré, j'ai déposé une proposition de loi visant à réduire la précarité financière des assistants maternels victimes d'impayés.

Avec ce texte, je me bats et me battrai pour soutenir ces professionnels en proposant, pour le complément de libre choix du mode de garde, un système calqué sur celui des APL, les aides personnelles au logement – c'est-à-dire un versement direct des aides sociales –, afin que les assistants maternels reçoivent une allocation minimale leur permettant de vivre.

Des solutions efficaces existent : indemniser des procès gagnés, prévoir des sanctions plus sévères, permettre un travail correct des huissiers, faire appliquer les ordonnances des juges de manière irrévocable ou encore passer par les CAF, les caisses d'allocations familiales, pour récupérer les sommes dues.

La deuxième urgence est de lutter contre la fraude. Que faites-vous contre ces parents peu scrupuleux qui n'hésitent pas à encaisser les aides de l'État et à les utiliser indûment sans jamais payer leur assistant maternel ? Quand allez-vous agir contre les fraudeurs ? Quelles mesures comptez-vous mettre en place pour limiter ces fraudes liées au complément de libre choix du mode de garde ?

Vous devez de toute urgence mettre fin à cette injustice et entendre le cri d'alerte des professionnels.

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées. Dans le cadre de ma réponse, que je fais au nom de M. Jean-Christophe Combe, je ne me lancerai pas dans une polémique. Je suis d'accord avec vous pour dire que la situation des assistants maternels victimes d'impayés est absolument scandaleuse. Cette situation a d'ailleurs été signalée à plusieurs reprises au ministère des solidarités, de l’autonomie et des personnes handicapées, lequel en a rapidement dressé un état des lieux précis.

En l’état actuel du droit, la déclaration d’un salaire versé dans le dispositif Pajemploi sans versement effectif du salaire est constitutive d’une fraude au sens de l’article 441-6 du code pénal. Le montant des aides encaissées de façon indue par les parents peut être recouvré par l’Urssaf, chargée du dispositif simplifié Pajemploi, ainsi que par les caisses d’allocations familiales ou de la mutualité sociale agricole. Il peut être majoré d’une pénalité pour fraude, ce qui est de nature à dissuader les parents employeurs de ne pas verser les salaires dus à leur assistant maternel agréé. Il s'agit là d'un garde-fou indispensable contre les impayés.

Par ailleurs, l’Urssaf a mis en place depuis le mois de mai 2019 un service optionnel et gratuit appelé Pajemploi+. Ce service assure le versement de la rémunération sur le compte bancaire du salarié dans un délai de quatre jours suivant la déclaration sociale de la famille. Pajemploi prélève parallèlement sur le compte bancaire des parents employeurs la somme restant à leur charge, ce qui permet de simplifier et de sécuriser les démarches. Un tel système garantit un versement de la rémunération au salarié dès le premier impayé.

Bien sûr, il nous faut aller plus loin pour mettre un terme à ces pratiques amorales, particulièrement pénalisantes pour des professionnels engagés et indispensables. Le comité de filière de la petite enfance, créé début 2022, traitera la question de la constitution d'un éventuel fonds de garantie des salaires dédié aux professionnels de l’accueil individuel. Il faudrait alors certainement l'ouvrir à l'ensemble des salariés du particulier employeur. Ce projet sera étudié en lien étroit avec les représentants associatifs et syndicaux concernés. À plus court terme, on pourrait envisager de rendre obligatoire, pour l'employeur, le système d'intermédiation mis en place par Pajemploi dès lors que l'assistant maternel souhaite avoir recours à ce service.