16ème législature

Question N° 269
de M. Jean-Paul Lecoq (Gauche démocrate et républicaine - NUPES - Seine-Maritime )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > produits dangereux

Titre > L'impact des HAP sur la santé et l'environnement

Question publiée au JO le : 04/04/2023
Réponse publiée au JO le : 12/04/2023 page : 3705

Texte de la question

M. Jean-Paul Lecoq alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur la réglementation portant sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques et sur leur impact sur la santé et l'environnement.

Texte de la réponse

IMPACT DES HYDROCARBURES AROMATIQUES POLYCYCLIQUES.


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq, pour exposer sa question, n°  269, relative à l'impact des hydrocarbures aromatiques polycycliques.

M. Jean-Paul Lecoq. Le 5 avril 2022, une équipe de journalistes et de scientifiques a dévoilé les résultats d’une étude consacrée aux pollutions issues des activités menées dans les zones industrielles de pétrochimie situées sur la commune de Gonfreville-l’Orcher, dans ma circonscription. Cette étude est fondée sur des mesures ponctuelles effectuées dans l’air et les sols ainsi que dans les urines d’un panel de vingt-quatre enfants. Les résultats ont révélé la présence d’hydrocarbures aromatiques polycycliques, les HAP, dans le sol et les urines de certains enfants testés.

Les HAP sont des constituants naturels du charbon et du pétrole. Si leur composition varie en fonction de nombreux paramètres, on retient généralement seize HAP. Parmi eux, le benzopyrène est considéré comme cancérigène avéré par le Centre international de recherche sur le cancer ; trois autres sont considérés comme cancérigènes probables.

Bien que la nocivité de ces polluants pour la santé humaine et pour l’environnement ne fasse aucun doute, il n’existe aucune réglementation, ni valeur de référence en France pour encadrer les taux de HAP présents dans l’air, l’eau ou les sols, ni de contrôle régulier de la présence de ces polluants dans les organismes humains.

J’ai conscience de la complexité de la mise en œuvre d’une telle mesure, mais pouvez-vous nous indiquer si la France coopère avec les quelques États qui encadrent déjà l'utilisation du naphtalène, l’un des seize HAP ? Le Canada, l’Allemagne, la Chine ou les États-Unis pourraient en effet nous aider.

D’autre part, l’agence régionale de santé (ARS) de Normandie m’a indiqué que des résultats de biosurveillance seront prochainement disponibles, permettant dès lors la publication de valeurs de référence d’exposition en France.

Cette bonne nouvelle me conduit à ma deuxième question : le Gouvernement prévoit-il d'instaurer, une fois les valeurs de référence d’exposition connues, une réglementation fixant les taux à ne pas dépasser pour l’eau, l’air, les sols et pour l’organisme humain ?

Étant aussi très sensible à la question de la santé au travail, je souhaite connaître les mesures que vous comptez prendre, en lien avec le ministère du travail, du plein emploi et de l'insertion, ainsi qu'avec les organismes syndicaux, pour mettre en place une réglementation du travail qui permette de protéger au mieux les travailleurs de la pétrochimie potentiellement exposés aux HAP ? En effet, il est indispensable de protéger la santé des riverains des zones polluées comme celle des salariés.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports. Vous interrogez le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, sur la réglementation portant sur les hydrocarbures aromatiques polycycliques, lesquels sont de mieux en mieux connus et de mieux en mieux réglementés – je vais y revenir.

Les HAP sont une famille de composés issus des processus de combustion d'éléments solides provenant de l'incinération de déchets, de la métallurgie ou des feux de forêts. Ces hydrocarbures, assez méconnus jusqu'à une période récente, sont des polluants persistants qui présentent, par leur caractère cancérogène et mutagène, un danger pour l’homme. Certains HAP peuvent être trouvés sous forme gazeuse ou, le plus souvent, sous forme de particules. Ils se forment particulièrement lors de la combustion de la biomasse, qui s’effectue souvent dans des conditions mal maîtrisées, par exemple en foyer ouvert dans le secteur résidentiel.

Les rejets atmosphériques d'origine industrielle font pour leur part déjà l'objet d'une réglementation précise et stricte. Ainsi, les installations de combustion d'une puissance supérieure à 20 mégawatts doivent respecter une valeur limite d'émission de 0,01 milligramme par mètre cube pour les chaudières autorisées à partir de 2010 et de 0,1 milligramme par mètre cube pour les autres. Par ailleurs, les rejets atmosphériques de ces installations de combustion doivent faire l'objet d'une surveillance annuelle par un laboratoire agréé par le ministère de la transition écologique.

Pour ce qui est des rejets industriels dans les eaux en milieu naturel, les installations classées pour la protection de l'environnement – les ICPE, soumises à autorisation –, susceptibles de rejeter des HAP doivent respecter une valeur limite de concentration de 25 microgrammes par litre. Les rejets de HAP des installations industrielles les plus concernées font donc l’objet d’un encadrement strict, d’une part par les textes nationaux, d’autre part, si nécessaire, par des prescriptions spécifiques fixées par arrêté préfectoral. C'est par cette voie que nous devons, le cas échéant, renforcer les prescriptions, en les accompagnant de contrôles rigoureux, assurés par les services de l'État.

Nous aurons en la matière des discussions au niveau européen – qui pourront aboutir à une réglementation dans les prochains mois –, étant entendu que d'autres pays, en dehors de l'Europe, sont également préoccupés par la régulation des HAP.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

M. Jean-Paul Lecoq. Merci, monsieur le ministre délégué, pour votre réponse. Je remercie les journalistes de France 5 et les acteurs de Gonfreville-l'Orcher, à commencer par son maire. Je m'étonne qu'il ait fallu l'action de ces lanceurs d'alerte pour remettre à l'ordre du jour la question des HAP. Si une enquête a été menée, c'est parce que la réglementation n'était pas adaptée. On constate bien, d'ailleurs, que la France est en retard. Vous annoncez une réglementation européenne, ce qui est une bonne chose : grâce à elle, les contrôles pourront être harmonisés à l'échelle européenne.

Il semble important de mettre en place des suivis d’exposition aux HAP, en particulier pour les travailleurs des zones concernées. Vous affirmez que ces suivis existent déjà mais les enquêtes montrent qu'ils ne sont pas parfaitement réalisés. Aussi, entre le souhaitable, le possible - que permet la réglementation - et le réel, y a-t-il un décalage. Il faudrait donc peut-être adapter les procédures des contrôles pour que les choses rentrent dans l'ordre. (M. le ministre délégué opine du chef.)