16ème législature

Question N° 280
de Mme Mathilde Panot (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Val-de-Marne )
Question au gouvernement
Ministère interrogé > Première ministre
Ministère attributaire > Première ministre

Rubrique > retraites : généralités

Titre > Réforme des retraites

Question publiée au JO le : 16/11/2022
Réponse publiée au JO le : 16/11/2022 page : 5417

Texte de la question

Texte de la réponse

RÉFORME DES RETRAITES


Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Madame la Première ministre, vous n’avez plus aucun secret pour nous. Emmanuel Macron n’a qu’une obsession pour son second mandat : la casse des retraites, et c’est vous qu’il a missionnée pour cela. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Le Président de la République nous a prévenus qu'il ne partirait pas sans avoir repoussé à 64 ans l’âge de départ à la retraite et saccagé notre système par répartition.

Vous n’avez pas| le mandat du peuple pour faire cette réforme : huit Français sur dix y sont opposés. (Mêmes mouvements. – Protestations sur quelques bancs des groupes RE et Dem.) Non, vous êtes les commis des intérêts privés qui vous ont élu et attendent leur retour sur investissement.

En 2019, nous avons fait échouer une première fois votre réforme indigne. Cette fois, pour mieux faire diversion, vous nous parlez encore de grandes concertations. Mais nous ne sommes pas dupes : vous ne comptez pas bouger d’un iota.

Samedi dernier, les sénateurs vous ont servi sur un plateau le report de l'âge de départ à la retraite à 64 ans avec quarante-trois annuités, en l’introduisant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS). C'est pratique : une mesure adoptée en catimini, pas de mouvement social ; un petit 49.3, et le tour serait joué. Avec vous, la réforme des retraites passerait en force, mais à bas bruit.

En Macronie, tout est bon pour faire 8 milliards euros d'économies. Peu importe si le Conseil d’orientation des retraites (COR) nie toute urgence et réfute le discours d'une « dynamique non contrôlée des dépenses. » (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Peu importe si cette réforme coûterait des milliards en pensions d’invalidité, indemnités pour maladie et chômage. Peu importe si un quart des hommes les plus pauvres sont déjà morts avant l'âge de 62 ans. Seuls les riches pourront vivre en paix en Macronie. Pour les autres, vous ne reculez pas l’âge de la retraite, vous avancez l’âge de la mort. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

M. Laurent Croizier. Quelle honte de dire ça !

Mme Mathilde Panot. Pourquoi faire une réforme dont personne ne veut ? Madame la Première ministre, vous voilà prévenue : un seul geste, et vous nous trouverez dans la rue dès le lendemain ; un seul geste, et nous vous ferons battre en retraite ! (Les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent - Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme la première ministre.

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Madame la présidente Mathilde Panot, il est parfois utile de revenir en arrière et de rappeler quelques faits que vous persistez à vouloir ignorer.

M. Erwan Balanant. Eh oui !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . Alors permettez-moi d'en revenir à la chronologie. Le Président de la République a été réélu pour un second mandat, le dimanche 24 avril 2022. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE - Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

M. Fabien Roussel. Pour faire barrage à l'extrême droite !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . Des élections législatives ont eu lieu les 12 et 19 juin de cette même année. Pour ma part, comme chacun ici, j'ai été élue députée. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Enfin, j'ai prononcé ma déclaration de politique générale ici même le 6 juillet dernier. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

M. Antoine Léaument. Sans demander la confiance !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . C'était il y a quelques mois, mais, pour paraphraser une chanson populaire, pour vous, c'était il y a un siècle, une éternité. (Sourires sur plusieurs bancs du groupe RE.) Manifestement, votre mémoire a peut-être inconsciemment effacé ces événements.

Or, madame la présidente Panot, au cours de ces différents moments démocratiques, les choses ont été dites avec la plus grande transparence aux Français.

Mme Danièle Obono. C'est faux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . Je vous dirais même que cela n'a pas toujours été facile. Il aurait peut-être été plus simple, plus confortable de ne rien dire. Il aurait peut-être été plus populaire de dire que l'on pourrait revenir un âge de départ à la retraite à 60 ans. (« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Cela aurait été plus populaire, c'est vrai, mais aussi plus démagogique. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe RE.)

Cela n'a échappé à personne, surtout pas aux Français qui n'ont d'ailleurs pas élu votre grand leader à la présidence de la République (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem), pas plus qu'ils n'ont élu Mme Le Pen. Ils ont fait le choix d'élire le Président de la République et de donner une majorité à ceux qui soutenaient son projet. (Exclamations continues sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

Alors, je vous le confirme : il y aura une réforme des retraites, qui entrera en vigueur à l'été 2023. Depuis des semaines, des discussions ont lieu avec tous les partenaires sociaux pour préparer cette réforme.

M. Sébastien Jumel. Il faut un référendum !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . Olivier Dussopt dialogue, travaille et approfondit les différents points pour construire une réforme qui assure la pérennité de notre système de retraite, une réforme juste qui tienne compte de la diversité des vies professionnelles. En effet, parallèlement, les sénateurs ont avancé des propositions que nous examinerons avec attention, même si elles n'émanent pas de notre majorité.

Pour assurer l'équilibre des différents régimes de retraite, donc la pérennité de notre système de retraite par répartition, nous allons devoir progressivement travailler un peu plus longtemps. (M. Fabien Roussel fait un geste de dénégation.)

Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES . C'est faux !

Mme Élisabeth Borne, Première ministre . Ce décalage de l'âge permettra une augmentation des pensions : on ne travaillera pas davantage pour rien. Répétons-le, il ne s'agit pas de reculer brutalement d'un, deux ou trois ans l'âge de départ à la retraite, mais de le décaler progressivement de quelques mois chaque année. (« Ça ne change rien ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

Il faut faire cette réforme pour protéger le niveau de vie des retraités et augmenter la pension minimale. Les salariés aux carrières longues, qui ont commencé à travailler plus tôt, continueront à partir plus tôt. Nous allons aussi prévenir et compenser la pénibilité de certains métiers car nous construirons un dispositif plus complet avec les partenaires sociaux. Nous n'avons pas de totem, c'est l'objet même des discussions qui ont lieu : les impasses financières sont connues et nous examinerons tous les leviers permettant de dégager des ressources.

En un mot, je crois au travail et à notre capacité à sortir de cette spécificité française : un taux d'emploi des seniors le plus bas d'Europe. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Ce n'est clairement pas la responsabilité des salariés les plus âgés. Je crois que le travail crée de la richesse et que celle-ci permet de préserver et même de faire progresser notre modèle social.

Voilà, tous les sujets sont ouverts, et nos principes sont clairs : la justice, l'efficacité et la lisibilité de la réforme. Dans quelques semaines, j'aurai l'occasion de revenir devant vous pour présenter les conclusions des concertations en cours. Là encore, nous privilégierons la transparence et le dialogue. C'est ma méthode, celle du Gouvernement. Nous nous y tiendrons malgré les raccourcis, les procès d'intention ou la démagogie. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem et sur plusieurs bancs du groupe HOR. – De nombreux députés du groupe RE se lèvent.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Mathilde Panot.

Mme Mathilde Panot. Madame la Première ministre, êtes-vous en train de nous confirmer que vous allez passer en catimini dans le PLFSS la réforme des retraites, que vous étudiez avec intérêt, comme vous venez de le dire ? (Huées sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)