Directive 2014/45/EU relative au contrôle technique sur les motos
Question de :
M. Olivier Marleix
Eure-et-Loir (2e circonscription) - Les Républicains
M. Olivier Marleix interroge M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé des transports, sur la directive 2014/45/EU du 3 avril 2014. Selon l'Union européenne, il incombe aux propriétaires de deux-roues d’effectuer un contrôle technique ou un équivalent. Les motards sont foncièrement opposés à cette mesure. Le 9 août 2021, le Gouvernement avait publié un décret prévoyant la mise en place de ce contrôle technique mais en fixant des dates d'entrée en vigueur plus lointaines, de 2023 à 2026. Le Conseil d'État a annulé ce décret le 27 juillet 2022. Décidant finalement d'opter pour la mise en place de mesures alternatives, le Gouvernement a publié un nouveau décret le 25 juillet 2022. Après l'intervention du Conseil d'État, car les mesures alternatives n'étaient pas assez efficaces, on apprend ainsi que le Gouvernement étudie la mise en place progressive d'un contrôle technique. Le Gouvernement aurait opté pour un contrôle dès la cinquième année de mise en circulation du véhicule. Ensuite, les visites périodiques devraient avoir lieu tous les trois ans pour tous les véhicules deux-roues de plus de 50 cm3. Cependant, rien n'est officiel. Sans imposer le contrôle technique, les directives européennes proposent la mise en place de mesures alternatives. Il l'interroge sur la mise en place de mesures plus efficaces que celles du deuxième décret plutôt qu'un contrôle technique obligatoire.
Réponse en séance, et publiée le 12 avril 2023
CONTRÔLE TECHNIQUE SUR LES MOTOS
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Marleix, pour exposer sa question, n° 282, relative au contrôle technique sur les motos.
M. Olivier Marleix. La directive européenne de 2014 relative au contrôle technique périodique des véhicules à moteur et de leurs remorques autorise à exclure du dispositif les deux roues de plus de 125 centimètres cubes, à condition d'appliquer des mesures alternatives de sécurité routière.
En 2021, le Gouvernement avait envisagé d'organiser un contrôle technique périodique, avant d'y renoncer. Saisi par des associations de protection de l'environnement, le Conseil d'État a ressuscité le décret qui prescrivait son instauration. Depuis, l'incertitude est complète. On lit dans la presse des informations diverses, notamment qu'un nouveau décret serait en préparation, visant à élargir l'obligation de contrôle technique aux véhicules à moteur dès 50 centimètres cubes, soit au-delà de ce que prévoit la directive européenne.
Pour les motards, ces projets n'ont aucun sens. Les motards ne sont pas des automobilistes : ils savent mieux que personne que leur vie est en danger, qu'une défaillance technique peut leur être fatale. Ils n'ont pas besoin qu'on le leur rappelle, ils y pensent tous les jours en montant sur leur véhicule.
Ensuite, ce n'est sans doute pas le moment – ce n'est d'ailleurs jamais le moment – d'imposer aux Français une dépense supplémentaire inutile. Certes, le prix initial du contrôle serait bas, pour acheter la paix sociale – on parle de 50 euros –, mais très vite, les contrôleurs expliqueront que ce tarif est insuffisant pour mener un contrôle de qualité.
Le troisième argument, peut-être le plus important, est de bon sens. Les rapports de l'Observatoire national interministériel de la sécurité routière montrent que seuls 0,3 % des accidents sont liés à la défaillance technique d'une moto. Ainsi, la motivation pour instaurer un tel contrôle technique est très faible, voire ridicule. D'ailleurs, ce sont des associations environnementalistes qui poussent à le rendre obligatoire : la sécurité routière est ici hors sujet. Le problème est peut-être relatif au bruit : il s'agirait d'une cause raisonnable, mais qui plaiderait pour prendre des mesures alternatives d'accompagnement, et non pour rendre le contrôle technique obligatoire.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.
M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports. Je partage largement votre analyse. Vous avez établi un historique précis du sujet : la directive européenne de 2014, à laquelle la France a souscrit, impose l'instauration d'un contrôle technique ou l'application de « mesures alternatives », que le texte ne définit pas.
L'immense majorité des pays européens – quatre exceptés –, ont rendu, parfois de longue date, le contrôle technique obligatoire pour tous les véhicules à deux roues.
À plusieurs reprises, le Gouvernement a tenté d'exploiter la piste des mesures alternatives de sécurité routière, en les renforçant progressivement. Le Conseil d'État a été saisi de plusieurs contentieux ; le dernier a abouti à une décision qui impose au Gouvernement d'instaurer un contrôle technique.
De plus, la Commission européenne a proposé d'adopter dans les prochaines années de nouveaux textes dépourvus d'ambiguïtés, qui prescriront de soumettre tous les véhicules à deux roues à un contrôle technique régulier.
L'arrêt du Conseil d'État doit être exécuté : nous sommes dans un État de droit. J'ai donc engagé une concertation pour que le contrôle technique – qui, il nous faut dire la vérité, devra être mis en œuvre dans les prochains mois – s'applique, tout en étant – ce n'est pas anecdotique – le moins coûteux et le moins pénalisant possible. Je connais en effet certaines des données que vous avez évoquées, notamment en matière d'accidentologie, et je sais que l'entretien des véhicules à deux roues est en général de bonne qualité et que les motards eux-mêmes y veillent ; il faut en tenir compte.
Cette concertation s'achèvera dans les prochaines semaines. Il est vrai que, dans le contexte actuel – je pense aux préoccupations liées au pouvoir d'achat et aux mobilisations sociales –, elle a pu être ralentie. Mais je présenterai, en toute transparence, y compris devant la représentation nationale, le contenu du contrôle technique des deux roues, son calendrier d'application et ses modalités, en m'efforçant de trouver l'équilibre le plus juste possible pour tenir compte de l'ensemble des éléments que vous avez indiqués.
La vérité m'oblige à dire devant le Parlement, comme je l'ai fait dès après l'arrêt du Conseil d'État, que les véhicules à deux roues devront être soumis à un contrôle technique.
Mme la présidente. La parole est à M. Olivier Marleix.
M. Olivier Marleix. Je ne souscris pas à votre analyse. Le Conseil d'État, dont j'ai relu l'arrêt, ne vous enjoint pas de mettre en place un contrôle technique des deux roues. Il juge d'abord que les mesures alternatives proposées n'existaient pas au moment où vous avez pris le décret ; elles étaient encore à l'état de projet. On peut donc tout à fait imaginer que soient prises des mesures alternatives effectives qui vous dispenseraient d'imposer un contrôle technique. Mais vous avez choisi de persister à prévoir un contrôle technique.
Je suis d'autant plus inquiet qu'il est envisagé de l'étendre – ce qui relèverait d'une surtransposition – aux motocyclettes dont la cylindrée est comprise entre 50 centimètres cubes et 125 centimètres cubes.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué.
M. Clément Beaune, ministre délégué. Sur les modalités, notamment le périmètre de la mesure, des discussions sont en cours. Quant à l'interprétation de l'arrêt du Conseil d'État, le communiqué qui l'accompagnait est, hélas ! très clair : il considère que, plusieurs années après l'entrée en vigueur de la directive, nous n'avons plus d'autre option. De toute façon, je l'ai dit, dans les années qui viennent, la Commission européenne proposera des modalités de contrôle technique renforcées. Je dois donc faire en sorte que les choses s'appliquent le mieux et le plus progressivement possible.
Auteur : M. Olivier Marleix
Type de question : Question orale
Rubrique : Cycles et motocycles
Ministère interrogé : Transports
Ministère répondant : Transports
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 avril 2023