16ème législature

Question N° 2882
de M. Thibault Bazin (Les Républicains - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition énergétique
Ministère attributaire > Transition énergétique

Rubrique > agriculture

Titre > Productions énergo-intensives du monde agricole

Question publiée au JO le : 08/11/2022 page : 5206
Réponse publiée au JO le : 06/06/2023 page : 5164
Date de renouvellement: 28/02/2023

Texte de la question

M. Thibault Bazin alerte Mme la ministre de la transition énergétique sur la nécessité de prendre des mesures complémentaires afin d'adapter le dispositif en faveur des énergo-intensifs à la réalité des difficultés rencontrées par les productions énergo-intensives du monde agricole. En effet, le dispositif actuel demeure lacunaire sur plusieurs points. Premièrement, le niveau de prise en charge de la hausse des prix de l'énergie est trop faible par rapport à la capacité des productions énergo-intensives du monde agricole à répercuter le surcoût lié à l'énergie sur leurs produits. Ces dernières sont en effet doublement limitées en la matière. D'une part, leurs circuits de contractualisation ne prennent pas en compte ces surcoûts. D'autre part, les consommateurs sont très sensibles aux variations du prix des produits alimentaires et seraient incités à se reporter sur un produit étranger, de moins bonne qualité, mais moins cher en cas de pleine répercussion des coûts de l'énergie. M. le député souligne donc que pour protéger efficacement notre secteur agricole, il conviendrait de prendre en charge le surcoût au-delà du doublement du prix à hauteur de 70 % et non 30 %. Deuxièmement, il souhaite faire remarquer que le critère de 3 % du chiffre d'affaires peut souvent être inopérant. En effet, comparer le niveau de charges relatif à l'énergie au chiffre d'affaires d'une exploitation agricole n'a pas forcément de sens, eu égard au très faible niveau de marge des exploitations agricoles. Les chiffres d'affaires peuvent ainsi être relativement élevés (rendant difficilement atteignable ce seuil de 3 %), sans pour autant que le résultat dégagé soit important. Plus encore, il demeure nécessaire de prendre en compte que les surcoûts liés au gaz et à l'électricité, additionnés aux autres postes de charges (carburant, SMIC, engrais, emballages), ont pu réduire sensiblement le résultat des exploitations, sans pour autant que le seuil de 3 % ne soit atteint. Il souligne qu'une baisse de ce seuil d'éligibilité à 2 % permettrait de prendre en compte l'intégralité des exploitations agricoles énergo-intensives. Troisièmement, M. le député rappelle que la baisse de l'excédent brut d'exploitation (EBE) ne répond pas à la problématique liée à l'établissement de l'EBE pour les entreprises agricoles qui n'ont pas toujours de service de comptabilité dédié à l'établissement de cet EBE. Il tient à informer Mme la ministre qu'une suppression de ce critère lié à l'EBE pour les entreprises justifiant d'un chiffre d'affaires inférieur à 2 millions d'euros pour ne retenir à la place que le critère du doublement des factures d'énergie pourrait constituer une sensible amélioration du dispositif. Quatrièmement, il s'alarme que plusieurs activités demeurent exclues de ce dispositif d'aide. Cette exclusion concerne notamment les serristes qui achètent de la chaleur, les activités de cogénération, les unités de méthanisation nouvellement installées en 2022 ou encore les irrigants et les maïsiculteurs. Il tient à rappeler l'importance de les soutenir également. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer les mesures qu'elle compte mettre en œuvre afin de répondre à ces quatre problèmes. Il lui demande également de bien vouloir lui indiquer si elle est favorable en parallèle à l'instauration de mesures visant à favoriser la production énergétique et l'autoconsommation dans le monde agricole. Elles pourraient être un moyen de répondre à la baisse des tarifs d'achat d'énergies renouvelables d'origine agricole et à la hausse des prix de l'énergie sur le marché.

Texte de la réponse

Pour faire face à l'augmentation sans précédent des prix des énergies, le Gouvernement est pleinement mobilisé et a mis en place différents dispositifs d'aide dont bénéficient les entreprises. Outre le guichet d'aide au paiement des factures, le Gouvernement a décidé le maintenir en 2023 le niveau de l'accise sur l'électricité (ex-TICFE) au minimum communautaire pour tous les consommateurs (sauf ceux qui bénéficient déjà de taux très réduits ou d'une exonération très gros consommateurs). Pour les micro-entreprises (TPE ayant souscrit un contrat avec une puissance inférieure ou égale à 36 kVA) éligibles aux tarifs réglementés de vente de l'électricité (TRVe), le niveau de l'accise est ramené à 1 €/MWh au lieu de 32,0625 €/MWh (et à 0,5 €/MWh pour les autres entreprises). Le Gouvernement a également prolongé en 2023 le bouclier tarifaire sur l'électricité. Les TPE éligibles aux TRVe (moins de 10 salariés et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 2 M€ et ayant souscrit un contrat avec une puissance inférieure ou égale à 36 kVA), bénéficient du bouclier tarifaire, qu'elles aient un contrat au TRVe ou en offre de marché. La hausse de leur tarif est ainsi limitée à 15 % TTC en moyenne depuis le 1er février. Pour les TPE qui ne bénéficient pas des TRVe et qui ont signé ou renouvelé en 2022 un contrat de fourniture d'électricité pour 2023 à un prix élevé, une aide supplémentaire est mise en œuvre leur permettant de bénéficier d'un prix plafond de 280 €/MWh en moyenne sur 2023. Pour les autres TPE (ayant souscrit un contrat avec une puissance supérieure à 36 kVA) et toutes les PME, un dispositif d'amortisseur électricité est en place depuis le 1er janvier. Concrètement, l'Etat prend en charge 50 % du surcoût de la part énergie hors taxe et hors TURPE du contrat au-delà d'un prix de référence de 180 €/MWh et dans la limite d'un montant de cette part énergie de 320 €/MWh. La baisse du prix apparaîtra directement sur la facture des consommateurs, et une compensation financière sera versée par l'Etat aux fournisseurs d'énergie, via les charges de service public de l'énergie. Pour bénéficier de l'ensemble de ces aides, les consommateurs n'ont qu'une seule démarche à faire : remplir l'attestation d'éligibilité, en privilégiant le recours aux systèmes dématérialisés d'attestation en ligne que la grande majorité des fournisseurs a mis en place. Les conseillers départementaux à la sortie de crise dont la liste est accessible sur le site impots.gouv.fr, sont les interlocuteurs de confiance désignés dans chaque département pour orienter et accompagner les entreprises dans leurs démarches. Un numéro de téléphone est également mis à la disposition de toutes les entreprises afin de répondre à toutes les questions d'ordre général sur les aides gaz et électricité ou relatives aux modalités pratiques de dépôt d'une demande d'aide : 0806 000 245. En outre, face aux difficultés de certaines entreprises à renouveler leurs contrats, le Gouvernement a demandé aux fournisseurs d'électricité de s'engager à proposer au moins une offre à tout client qui en ferait la demande. Ils ont signé une charte en ce sens. De même, les fournisseurs se sont engagés à proposer à tout client professionnel en faisant la demande un aménagement d'échéancier de paiement.  Par ailleurs, des dispositions permettant, sous des formes diverses, de prendre en compte l'inflation des coûts des investissements et des dépenses de fonctionnement des méthaniseurs ont été élaborées avec la filière, ont fait l'objet de consultations obligatoires et donneront lieu très prochainement à la parution des textes règlementaires correspondant. La production énergétique dans le monde agricole à partir d'installations de méthanisation fait l'objet de soutien, via plusieurs arrêtés tarifaires (dits BG11 et BG16 notamment). La production électrique en cogénération, concernant notamment les serristes peut également être soutenue via les arrêtés tarifaires dits « C13 » et « C16 ». Des travaux sont en cours avec les filières concernées afin de leur offrir des solutions face à l'augmentation forte des prix de l'énergie, remettant en cause leur viabilité économique. Cela pourra notamment prendre la forme d'autoconsommation, lorsque cela sera pertinent, et sous réserve de la conformité d'un tel mécanisme avec les lignes directrices européennes. La production électrique dans le monde agricole fait également l'objet d'un soutien spécifique lorsqu'elle provient d'installations photovoltaïques. Les petites installations bénéficient donc d'un soutien via l'arrêté tarifaire dit « S21 » (installations photovoltaïques sur bâtiments de moins de 500 kWc). Pour les installations de plus grande puissance, l'appel d'offres photovoltaïque sur bâtiment est ainsi désormais ouvert aux installations agrivoltaïques sur cultures, ou au photovoltaïque sous serre agricole. La loi relative à l'accélération de la production d'énergies renouvelables porte une attention particulière à l'agrivoltaïsme et à l'implantation de centrales photovoltaïques sur des terrains agricoles, naturels et forestiers. Elle distingue en son article 54 deux types d'installation sur terrains agricoles : l'agrivoltaïsme et les projets sur terrains agricoles, naturels et forestiers. La loi considère comme agrivoltaïque une installation qui apporte directement à la parcelle agricole au moins l'un des services suivants, en garantissant à un agriculteur actif ou à une exploitation agricole à vocation pédagogique une production agricole significative et un revenu durable en étant issu : l'amélioration du potentiel et de l'impact agronomiques, l'adaptation au changement climatique, la protection contre les aléas ou encore l'amélioration du bien-être animal. Cet article clarifie également la possibilité pour le Gouvernement de lancer de mettre en place des soutiens financiers spécifiques à l'agrivoltaïsme, sous réserve de validation par la Commission Européenne. Les modalités règlementaires d'application sont en cours de construction avec l'ensemble des services concernés, la filière agricole et les énergéticiens.