16ème législature

Question N° 289
de M. Jean-Carles Grelier (Renaissance - Sarthe )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > santé

Titre > Urgence de la situation en psychiatrie

Question publiée au JO le : 04/04/2023
Réponse publiée au JO le : 12/04/2023 page : 3712

Texte de la question

M. Jean-Carles Grelier appelle l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention sur l'urgence de la situation en psychiatrie et son absence de prise en compte. Parce que la société - et c'est une regrettable spécificité française - persiste, contre toutes les normes et recommandations internationales, dont celles édictées par l'OMS depuis plus de 60 ans, à mettre la santé mentale à part, à aucun moment on ne s'interroge sur cet élément à part entière de la santé des Français. Il lui demande donc, dans les meilleurs délais, si sera mis en place un Institut crée sur le monde de l'INCA afin de comprendre, prévenir et accompagner la psychiatrie en France tout en n'oubliant pas la recherche - nécessaire - selon un modèle qui a déjà fait ses preuves.

Texte de la réponse

URGENCE DE LA SITUATION EN PSYCHIATRIE


Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Carles Grelier, pour exposer sa question, n°  289, relative à l'urgence de la situation en psychiatrie.

M. Jean-Carles Grelier. La maladie mentale et les troubles psychiques touchaient, avant la crise sanitaire et selon la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques, 13 millions de Français – 25 % de la population –, consommateurs d'anxiolytiques, d'antidépresseurs ou de somnifères. La dépression frappe 15 % à 20 % de la population générale. Le suicide est devenu la première cause de mortalité chez les 15-35 ans ; avec 8 300 décès chaque année, c'est l'équivalent d'une ville comme La Ferté-Bernard qui est rayée de la carte.

Avec 23 milliards d'euros, la maladie mentale est devenue le premier poste de dépenses de l'assurance maladie. Même si je n'ignore pas les efforts du Gouvernement pour la prévention et la prise en charge des maladies mentales, cette question est complexe et, en la matière, il faut encore améliorer l'organisation et la coordination des soins, de la formation et de la recherche. La création d'un institut national de la santé mentale, sur le modèle de l'Institut national du cancer (Inca), le permettrait ; cela pousserait l'ensemble des acteurs du monde de la santé mentale à travailler dans la même direction et accroîtrait la visibilité et la lisibilité de la politique de l'État en la matière.

Les maladies mentales constituent vraisemblablement la première urgence de notre système de santé ; elles tuent sans bruit et sans fureur. J'attends sur ces questions des réponses aussi précises que celles que vous avez données par ailleurs.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Vous le savez, le Gouvernement est particulièrement conscient de l'importance et de l'urgence des questions de santé mentale et de psychiatrie. Si la crise du covid a permis d'accélérer une prise de conscience générale de cette question, notamment pour les jeunes, nous n'avons pas attendu cette crise sanitaire pour nous en emparer et en faire une priorité de la politique de santé. Dès juin 2018, nous avons ainsi élaboré une feuille de route ambitieuse en la matière, qui a été enrichie en 2021 des mesures annoncées par le Président de la République aux assises de la santé mentale et de la psychiatrie et rassemble désormais cinquante mesures dont l'application est supervisée par le professeur Frank Bellivier, en tant que délégué ministériel.

Nous avons présenté un bilan d'étape le mois dernier, devant les acteurs concernés. Sans nier les grandes difficultés actuelles de la psychiatrie, les choses avancent. En matière d'information, des campagnes de communication permettent de déstigmatiser la maladie mentale et de promouvoir la santé mentale. En matière de prévention, nous développons les compétences psycho-sociales à l'école et nous nous appuyons sur le numéro national de prévention du suicide, le 3114, et le dispositif Vigilans. En outre, 90 000 patients, dont 20 % de mineurs, sont désormais pris en charge grâce à 300 000 consultations organisées dans le cadre de MonParcoursPsy. Par ailleurs, le renforcement du réseau des centres médico-psycho-pédagogiques (CMPP) et des maisons des adolescents (MDA), présents depuis la fin de 2022 dans tous les départements, permet d'améliorer la prise en charge et le suivi des patients.

Enfin, en matière de formation, nous avons allongé la formation en psychiatrie et augmenté le nombre de postes hospitalo-universitaires en pédopsychiatrie. Beaucoup reste à faire, bien entendu. Nous nous y employons, en partant du principe que la santé mentale est une composante de la santé globale. Cela justifie qu'elle soit mieux prise en compte lors du déploiement des bilans de prévention aux trois âges clés et dans le cadre de la prochaine stratégie nationale de santé.

Ainsi, à ce jour, la création de l'institut que vous appelez de vos vœux n'est pas prévue. Les enjeux des politiques de santé mentale et de psychiatrie sont tellement transversaux qu'ils doivent demeurer pleinement dans le champ des solidarités et de la santé, pour que nous puissions actionner tous les leviers nécessaires sur ces questions prioritaires. Toutefois, nous demeurons bien entendu ouverts à la discussion. Je connais votre engagement à ce sujet, qui est le fruit d'une réflexion et d'un travail approfondis – notamment en votre qualité de coprésident du groupe d'études santé mentale – et je partage pleinement vos préoccupations sur la bombe à retardement qu'a représenté la crise sanitaire pour la santé psychologique des jeunes et des moins jeunes. Travaillons ensemble sur ce point.

Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Carles Grelier.

M. Jean-Carles Grelier. Je vous remercie pour votre réponse et prends bonne note de votre ouverture à des travaux communs, mais je continue de penser que la psychiatrie doit bénéficier d'un geste fort, avec la création d'un institut dédié – comme c'est le cas pour la cancérologie depuis la loi de santé publique d'août 2004, dite loi cancer. Ce serait un plus considérable pour la prise en charge des patients et la formation des soignants, car la santé mentale est une question urgente.