16ème législature

Question N° 28
de Mme Marine Hamelet (Rassemblement National - Tarn-et-Garonne )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Agriculture et souveraineté alimentaire
Ministère attributaire > Agriculture et souveraineté alimentaire

Rubrique > agriculture

Titre > Crise agricole en Tarn-et-Garonne - Bouclier tarifaire et transition écologique

Question publiée au JO le : 15/11/2022
Réponse publiée au JO le : 23/11/2022 page : 5883

Texte de la question

Mme Marine Hamelet attire l'attention de M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur les multiples hausses des prix qui accablent les agriculteurs et les prodromes d'une crise agricole, en particulier dans le Tarn-et-Garonne. Lundi 31 octobre 2022, une vingtaine d'agriculteurs ont déversé des déchets agricoles sur les routes, à Castelsarrasin, Verdun-sur-Garonne et Cordes-Tolosannes. Mme la députée demande à M. le ministre quelles pistes sont à l'étude, en particulier sur le prix des intrants, pour leur venir en aide rapidement, avant que la grogna sociale ne bloque le pays. Elle lui demande en particulier de faire bénéficier aux agriculteurs du bouclier tarifaire mis en place sur l'électricité et le gaz par le Gouvernement pour les particuliers et les PME et d'étudier son élargissement au gazole non routier (GNR). Elle l'interroge enfin sur l'impasse de la transition écologique qui, provoquée trop rapidement, rend impossible la transition agricole, comme on le voit aux Pays-Bas avec la crise de l'azote. Elle lui demande quelles aides sont prévues sur le plus long terme pour inciter les agriculteurs français, de façon sérieuse et rentable, à cette transition.

Texte de la réponse

BOUCLIER TARIFAIRE ET TRANSITION ÉCOLOGIQUE POUR LES AGRICULTEURS


Mme la présidente. La parole est à Mme Marine Hamelet, pour exposer sa question, n°  28, relative au bouclier tarifaire et à la transition écologique pour les agriculteurs.

Mme Marine Hamelet. Monsieur le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire, le lundi 31 octobre, une vingtaine d'agriculteurs ont déversé des déchets agricoles sur les routes à Castelsarrasin, à Verdun-sur-Garonne et à Cordes-Tolosannes, dans le département du Tarn-et-Garonne dont je suis élue. Si vous ne faites rien, la crise agricole va s'amplifier et devenir une crise sociale car on ne parle plus de rentabilité, mais de survie. Je vous demande, monsieur le ministre, d'arrêter de proférer des paroles qui s'envolent car les agriculteurs en ont assez : ils réclament des actes. C'est à cette seule condition qu'une telle crise sera évitée. Vous ne vous en sortirez pas en étalant des chiffres, ni M. Macron en parlant de ruissellement, car les agriculteurs ne voient jamais venir les aides que vous promettez : qu'il s'agisse de l'exonération de la taxe foncière ou des enveloppes départementales et nationales, seuls ceux qui sont déjà en faillite touchent ces aides beaucoup trop tardives.

La politique actuelle, à défaut de prévenir, ne guérit pas. Votre gouvernement subventionne des entreprises en faillite et abandonne comme toujours les classes moyennes ainsi que ces agriculteurs pas encore dans le rouge mais qui le seront demain si vous continuez à faire la sourde oreille à leurs réclamations. Les actions à mener, les vraies solutions à déployer, vous les connaissez déjà : si vous voulez éviter la crise, et le déversement de tonnes de fumier rue de Varenne, mettez en place le bouclier tarifaire sur le gaz, l'électricité et le gazole non routier pour les agriculteurs. Votre gouvernement l'a mis en place pour les particuliers et pour les PME, pourquoi le refuser aux agriculteurs ?

Monsieur le ministre, vous connaissez les chiffres : en un an, le prix du gazole non routier a doublé, celui des engrais a triplé et celui de l'électricité s'est renchéri de 50 % – des augmentations que nos paysans ne peuvent pas répercuter sur leurs prix de vente.

Depuis un an, nos agriculteurs ont connu la sécheresse et les sabotages des réservoirs d'eau par des pseudo-écologistes aussi oisifs que haineux. C'est le deuxième volet de ma question. Les actes que nous attendons sont aussi ceux qui garantiront aux agriculteurs de voir le bout du tunnel sur le long terme. Allez-vous leur dire : « Dans sept ans, en 2030, il faut que vous ayez réduit de 30 % vos émissions avec un objectif zéro carbone en 2050 ? » La disparition des agriculteurs, est-ce cela, la transition écologique ? Est-ce la transformation de leurs fermes en méthaniseurs géants ? Des panneaux solaires et des socles en béton pour les éoliennes plantées dans leurs champs ? Les Pays-Bas vous donnent, nous donnent, un avant-goût de ce qui nous attend si vous vous entêtez dans cette impasse sociale et écologique. Car les impasses, c'est tout ce que contiennent vos mots.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

M. Marc Fesneau, ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire. Madame Hamelet, je n'ai nulle intention de polémiquer – ce n'est d'ailleurs pas mon tempérament –, mais vous ne pouvez pas dire que les aides destinées aux agriculteurs n'ont atteint qu'une partie d'entre eux, ni qu'elles ne sont pas parvenues aux cours de ferme. Nous avons débloqué 1,1 milliard d'euros pour lutter contre la grippe aviaire, 1 milliard pour pallier les dégâts dus au gel, quelque 500 millions pour faire face à la hausse des coûts de l'alimentation animale, plus de 200 millions pour répondre à la crise porcine. Tous ces problèmes ont largement concerné votre département, et les agriculteurs reconnaissent qu'ils ont bénéficié d'une série de subventions. Voilà du concret ! Le dernier dispositif qu'on leur a ouvert, dit PEC – prise en charge des cotisations sociales –, a fait l'objet de 100 000 demandes de la part d'exploitants ; c'est considérable ! On ne peut donc pas dire que l'État ne fait rien. Les chiffres sont réels, partons de cette réalité.

J'ai été sollicité par la présidente Rabault et par deux sénateurs du Tarn-et-Garonne car la situation du département, où je me rendrai la semaine prochaine, est particulière. Les parlementaires m'ont alerté sur les difficultés que traverse le département du fait de la crise énergétique et d'un modèle de production profondément affecté par le dérèglement climatique. Je vais à leur rencontre pour parler de la sécheresse et pour trouver au plus vite des solutions aux problèmes financiers, mais également pour évoquer la question énergétique. Un dispositif à trois étages a été évoqué à plusieurs reprises à l'Assemblée nationale. Nous sommes en train de l'affiner car en matière agricole, compte tenu des cycles agraires, il reste quelques lacunes, que nous essayons de colmater pour apporter une réponse aux agriculteurs.

Enfin, n'opposons pas les questions agricoles et environnementales. La transition climatique s'impose à vous, à moi, à nous tous. Elle vient profondément perturber les systèmes agricoles, rendant nécessaire notre action pour déployer des dispositifs qui permettent de mieux retenir l'eau en hiver pour mieux la reprendre en été, sans trop prélever les nappes phréatiques. On a besoin d'organiser la résilience du système agricole car, quelle que soit la configuration, le dérèglement climatique est un risque majeur. Ni vous, ni moi, ni personne ne le souhaite, mais c'est une réalité. Imaginer que tout ira bien si on ne change rien est une erreur – l'erreur qui a été commise dans bien des pays, celle de ne pas voir les nécessités en face. Il faut lutter contre le dérèglement climatique, mais on mène ce combat aussi pour les agriculteurs : si on ne fait rien, ils ne pourront plus assurer une série de productions, y compris traditionnelles, dans un département comme le vôtre. Pour qu'ils s'adaptent au changement, il faut les mettre sur le chemin de la transition et de la planification écologiques.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marine Hamelet.

Mme Marine Hamelet. Je suis ravie, monsieur le ministre, que vous veniez nous rendre visite dans le Tarn-et-Garonne et que vous ayez conscience de la situation particulièrement grave que connaît notre département. Sachez que nous resterons vigilants.