L'offre hospitalière dans le Centre et le Sud de la Haute-Marne
Question de :
M. Christophe Bentz
Haute-Marne (1re circonscription) - Rassemblement National
M. Christophe Bentz interroge Mme la ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé sur la décision prise en décembre 2022 par l'ARS du Grand-Est au sujet de l'offre hospitalière du Centre et Sud de la Haute-Marne. Les acteurs concernés (élus locaux, professionnels de santé) n'ont pas réellement été consultés. Les quatre parlementaires ont quant à eux participé à une visioconférence de « consultation », mais un mois après la décision annoncée par l'ARS. Il existe pourtant un collectif regroupant ces mêmes acteurs de terrain qui ont travaillé et consulté pendant des années. Ils ont conçu un projet hospitalier alternatif et crédible pour le Centre et le Sud de la Haute-Marne. Ce projet a reçu un accueil favorable de la part de l'écrasante majorité des habitants, des professionnels de santé et des élus locaux et ruraux. Il semble donc urgent de revenir sur une décision de l'ARS qui ne fera qu'accélérer la désertification médicale dans le département. M. le député demande donc à la ministre déléguée pourquoi elle refuse de recevoir les acteurs concernés par la nécessaire réorganisation de l'offre hospitalière. Il lui demande de s'engager à réviser la position du Gouvernement.
Réponse en séance, et publiée le 12 avril 2023
OFFRE HOSPITALIÈRE DANS LA HAUTE-MARNE
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Bentz, pour exposer sa question, n° 292, relative à l'offre hospitalière dans la Haute-Marne.
M. Christophe Bentz. Madame la ministre déléguée, vous le savez, la décision de l'agence régionale de santé (ARS) du Grand Est de décembre dernier concernant l'offre hospitalière du centre et du sud de la Haute-Marne est grave et incompréhensible. Elle a été prise de manière arbitraire et en déconnexion avec les réalités de terrain, sans consultation réelle des acteurs concernés, notamment des élus locaux – en particulier ceux de la ruralité, dont les administrés représentent les deux tiers de la population des bassins de Langres, Bourbonne-les-Bains et Chaumont –, des professionnels de santé, ni même des représentants des usagers des services de santé. Les quatre parlementaires élus dans ces territoires, tous opposés à la décision de l'ARS, ont participé à une pseudo-consultation qui s'est tenue en visioconférence et un mois après la décision annoncée par cette agence. Il ne s'agit donc en rien d'une consultation véritable, mais d'une information sans échange en amont. Ceci n'est, au passage, nullement respectueux du rôle des parlementaires.
Après des années de travail et de consultations en Haute-Marne, les membres de l'association Égalité Santé, qui regroupe des centaines d'acteurs de terrain et de professionnels de santé, ont construit un véritable projet hospitalier alternatif, sérieux et crédible pour ce territoire qui – et c'est essentiel – a reçu un accueil favorable de la part de l'écrasante majorité des habitants, des professionnels de santé et des élus locaux, notamment ruraux, tous concernés au premier chef.
Depuis plusieurs mois, je vous alerte sur ce problème crucial pour la santé des Haut-Marnais du sud. Vous devez entendre la voix des habitants qui ont droit à des services publics de santé dignes et de proximité. Puisque la décision de l'ARS ne fera qu'accélérer la désertification médicale de ce territoire, il est urgent de revenir sur celle-ci. Le Gouvernement est-il enfin prêt à écouter sincèrement les acteurs locaux concernés et à prendre en compte leurs propositions ? Vous engagez-vous à reconsidérer la position du Gouvernement après l'annonce par l'ARS du Grand Est de financements hors-sol et déliés de tout projet ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Un premier cycle de concertation associant élus, professionnels hospitaliers et libéraux ainsi que l'ensemble des parties prenantes du secteur de la santé dans le sud de la Haute-Marne s'est déroulé dès 2021, face aux difficultés d'accès aux soins et de pérennisation d'une offre de soins hospitalière de qualité. Dans le cadre du Ségur de la santé, ces premières concertations ont permis de mobiliser une enveloppe exceptionnelle de plus de 66 millions d'euros, destinée à l'investissement et à la reprise de dette, selon un schéma de gradation des soins entre le centre hospitalier de Langres, celui de Bourbonne-les-Bains et celui de Chaumont, qui comprend une maternité de niveau 2.
Des ateliers d'identification de filières nécessaires ont jalonné l'année 2022, dans un dialogue regroupant libéraux, hospitaliers et professionnels de la clinique du groupe Elsan – qui est, comme vous le savez, le seul opérateur de chirurgie relevant d'une coopération public-privé dans ce territoire. À la fin de l'année 2022, à l'issue de ce dialogue, il a été décidé de construire deux établissements neufs à Langres et à Chaumont, avec le concours financier du conseil départemental, du conseil régional et du groupement d'intérêt public (GIP) de la Haute-Marne, pour un budget inédit de 140 millions d'euros, l'articulation de ces deux établissements avec le centre hospitalier universitaire (CHU) de Dijon permettant d'organiser une réelle gradation des soins.
Le projet concurrent, qui reprenait l'idée, envisagée il y a quinze ans, de créer ex nihilo un site unique, ne permettait pas aux habitants de Langres d'accéder à une structure hospitalière et ne garantissait pas la cohérence entre l'organisation de soins et les besoins du territoire. Par ailleurs, le projet retenu bénéficie de l'adhésion du groupement hospitalier de territoire (GHT) et des communautés hospitalières des établissements du sud de la Haute-Marne. Il apparaît comme le plus sûr moyen de satisfaire la double ambition d'assurer un accès de proximité et gradué aux usagers, dans le cadre du projet médico-soignant partagé du GHT Côte-d'Or-Haute-Marne, et de renforcer l'attractivité des établissements hospitaliers locaux pour les professionnels. Ainsi, dans quelques années, ceux-ci devraient retrouver la capacité à lancer des projets autofinancés, eux aussi source d'attractivité et d'amélioration de l'accès aux soins.
Enfin, j'ai demandé à mes services, en lien avec mon cabinet, de recevoir la délégation que vous évoquez. Cette réunion se tiendra dans les tout prochains jours.
Mme la présidente. La parole est à M. Christophe Bentz.
M. Christophe Bentz. Je vous remercie pour cette réponse, et particulièrement pour votre engagement à recevoir une délégation d'acteurs locaux. Je précise simplement que seuls trois maires du territoire concerné – ceux de Chaumont, Bourbonne-les-Bains et Langres – ont pris part à la concertation territoriale ; les 249 maires ruraux du même territoire s’en sont trouvés exclus alors que, je le rappelle, ils représentent entre 70 % et 75 % de la population du sud de la Haute-Marne. La consultation était donc très partielle.
La décision de l'ARS polarise les nouveaux équipements à Chaumont et Langres. Je profiterai des dernières secondes qui me sont imparties pour contredire votre affirmation selon laquelle, avec le projet concurrent à celui qui a été retenu, les Langrois n'auraient pas pu accéder à une offre hospitalière. Au contraire – et les fiches sur lesquelles vous vous appuyez sont sans doute incomplètes sur ce point –, le choix du site de Rolampont aurait placé le plateau technique unique projeté à neuf minutes de voiture de Langres, assurant les Langrois d'une bonne desserte.
Auteur : M. Christophe Bentz
Type de question : Question orale
Rubrique : Établissements de santé
Ministère interrogé : Organisation territoriale et professions de santé
Ministère répondant : Organisation territoriale et professions de santé
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 4 avril 2023