16ème législature

Question N° 2
de M. Philippe Vigier (Démocrate (MoDem et Indépendants) - Eure-et-Loir )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > urbanisme

Titre > Préconisations bâtiments de France face aux projets de rénovation énergétique

Question publiée au JO le : 15/11/2022
Réponse publiée au JO le : 23/11/2022 page : 5860

Texte de la question

M. Philippe Vigier attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les préconisations des architectes des bâtiments de France face aux projets portés par des particuliers ou des collectivités visant à réduire la consommation énergétique des bâtiments ou de développement d'énergies renouvelables. Le réchauffement climatique et la crise énergétique que l'on connaît actuellement n'ont fait que renforcer la nécessité et les incitations à réduire la consommation en énergies fossiles. C'est dans ce contexte que de nombreux particuliers et de nombreuses collectivités envisagent de réaliser des rénovations des bâtiments (changement des menuiseries, isolation par l'extérieur) ou d'installer des panneaux photovoltaïques sur les toitures des bâtiments existants. Plusieurs communes de sa circonscription ont alerté M. le député sur les difficultés rencontrées dans ces démarches. En effet, dans les communes possédant un bâtiment classé monument historique, les demandes d'autorisation d'urbanisme portant modification extérieure des bâtiments dans le périmètre du bâtiment classé sont soumises à l'avis de l'architecte des bâtiments de France. Ces demandes font l'objet très fréquemment de refus ou les projets se voient préconiser une installation de panneaux photovoltaïques avec une exposition au Nord pour ne pas être du côté du bâtiment classé. La France a cette richesse incontestable de posséder de très nombreux bâtiments classés monuments historiques jusque dans les petites communes rurales. Cependant, il ne faut pas que cette richesse vienne stopper la réalisation de projets qui permettraient de réduire de manière significative la consommation en énergie fossile des particuliers et des collectivités. Il souhaiterait connaître dans quelle mesure le Gouvernement envisage de faire évoluer les règles et les délais encadrant les avis des architectes des bâtiments de France pour permettre la réalisation des prescriptions liées au climat et au développement durable et permettre à chacun, particuliers et collectivités, de participer aux progrès vers la sobriété énergétique de la France.

Texte de la réponse

PROJETS DE RÉNOVATION ÉNERGÉTIQUE


Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Vigier, pour exposer sa question, n°  2, relative aux projets de rénovation énergétique.

M. Philippe Vigier. Je veux appeler votre attention, monsieur le ministre délégué, sur un sujet que, pour avoir été longtemps élu local, vous connaissez bien. La transition écologique s'impose à tous, d'autant plus avec l'explosion du coût des énergies, gaz et électricité. Dans mon département, on nous annonce par exemple des multiplications par trois ou trois et demi de ce coût. Cette situation est insoutenable pour les collectivités comme pour les particuliers – le Gouvernement a d'ailleurs mis en place de très nombreux filets de sécurité que vous connaissez aussi bien que moi.

Or les collectivités et les particuliers souhaitant réaliser des travaux – changement de fenêtres, isolation par l'extérieur ou installation de panneaux photovoltaïques, par exemple – se trouvent confrontés à une sévérité toujours plus importante des architectes des bâtiments de France (ABF). Sans remettre en cause le rôle majeur que jouent ces derniers, je constate cependant, pour le vivre au quotidien, que le traitement des dossiers peut prendre jusqu'à quatre ou six mois. Au-delà du rallongement des délais, les dossiers aboutissent dans 80 % à 90 % des cas à des refus systématiques, ce qui soulève des difficultés. J'ai même vu l'installation de panneaux photovoltaïques proposée sur la face nord de bâtiments qui se trouvaient en situation de covisibilité !

Nous sommes à un moment charnière. Il faut bien sûr préserver le patrimoine ; c'est une exigence absolue. Mais il est aussi urgent, sur le plan écologique et économique, de permettre aux collectivités et aux particuliers de réaliser ces travaux. Un projet de loi sera examiné en séance à partir du 5 décembre. Comportera-t-il des prescriptions, en matière de transition écologique, qui imposeront aux architectes de faire évoluer la philosophie présidant actuellement à leurs décisions ? Un chemin est possible, je le crois, mais si nous ne l'empruntons pas, la transition écologique sera un échec : nous ferons face à toujours plus de surcoûts, devrons mettre en place toujours plus de filets de sécurité et aurons raté notre cible.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement. Ne pouvant être présent, M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires m'a chargé de vous répondre sur un sujet que je connais bien, en effet, pour avoir été maire d'une ville disposant de zones classées.

Les architectes des bâtiments de France sont consultés sur les demandes d'autorisation de travaux liés, notamment, au développement des énergies renouvelables dans les sites protégés au titre du code du patrimoine ou du code de l'environnement. Ces espaces protégés représentent environ 6 % du territoire national. L'accord des ABF permet de s'assurer que dans les sites dont la sensibilité le mérite, les solutions techniques les plus adaptées soient trouvées. Je précise que les proportions de refus sont largement minoritaires : parmi les 515 400 dossiers instruits en 2021, 7 % ont été refusés.

Afin d'apporter une meilleure prévisibilité aux porteurs de projets et de garantir une application homogène sur l'ensemble du territoire, le ministère de la culture a préparé une instruction ministérielle visant à accompagner le développement du photovoltaïque, notamment dans les sites patrimoniaux remarquables et aux abords des monuments historiques. Le ministère de la culture et le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires collaborent à l'élaboration d'un guide méthodologique sur l'implantation photovoltaïque, qui sera mis en ligne d'ici au début de 2023, ainsi que sur la question des isolations thermiques par l'extérieur (ITE). L'objectif est que, dans le cadre du dialogue avec les porteurs de projets, les ABF explorent l'ensemble des solutions favorisant l'implantation des équipements photovoltaïques dans le respect du patrimoine et des paysages.

Mme la présidente. La parole est à M. Philippe Vigier.

M. Philippe Vigier. Qu'ils vous entendent, monsieur le ministre délégué ! Vous avez parlé d'application homogène sur l'ensemble du territoire, mais vous savez comme moi que la réalité est tout autre. Il faudrait également que les ABF viennent sur le lieu des travaux pour constater les choses par eux-mêmes, plutôt que de rester derrière leur ordinateur et leur écran en trois dimensions, comme ils le font aujourd'hui, et de nous expliquer ce qu'il faut faire sans même avoir observé la covisibilité.

Enfin, je conçois l'intérêt des prescriptions pour éviter de faire n'importe quoi, par exemple en matière de panneaux photovoltaïques, mais qu'on ne les interdise pas ! Les maires – dont vous vous connaissez bien la fonction – peuvent accepter les prescriptions restrictives, mais pas les interdictions. Merci de votre écoute en tout cas, et merci par avance de relayer ce message auprès de votre collègue M. Christophe Béchu.