16ème législature

Question N° 3016
de M. Thibault Bazin (Les Républicains - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Transition énergétique
Ministère attributaire > Transition énergétique

Rubrique > pharmacie et médicaments

Titre > Procédures de délestage et répartition pharmaceutique

Question publiée au JO le : 08/11/2022 page : 5208
Réponse publiée au JO le : 21/02/2023 page : 1796

Texte de la question

M. Thibault Bazin alerte Mme la ministre de la transition énergétique sur les conséquences sur la chaîne de distribution du médicament que pourraient entraîner des procédures de délestage, consistant en des arrêts temporaires de l'approvisionnement électrique de certaines zones du territoire. En effet, la répartition pharmaceutique assure le lien essentiel et quotidien entre les laboratoires pharmaceutiques et les 21 000 officines de pharmacie réparties en France. Dans ce cadre et pour des raisons de sécurité sanitaire, la prise en charge et le transport de médicaments nécessitent de prendre des mesures strictes afin de garantir que la structure de ces derniers ne soit pas altérée. Les grossistes-répartiteurs sont aussi soumis à une obligation de service public qui implique notamment de livrer les officines du territoire en moins de 24 heures mais aussi de détenir deux semaines de stocks (article R. 5124-59 du code de la santé publique), ce qui empêche d'envisager un arrêt, même temporaire, des activités. Par ailleurs, le maintien de la chaîne du froid est absolument fondamental, particulièrement pour le stockage de certains médicaments mais aussi de vaccins, dont ceux destinés à la lutte contre l'épidémie de la covid-19. Pour toutes ces raisons, des coupures d'électricité pourraient être de nature à créer des risques sanitaires et à avoir des effets graves. Si ce sujet est en partie traité au niveau local par les préfets, il ne semble toutefois pas que le secteur de la répartition pharmaceutique soit considéré à ce stade par l'ensemble des préfectures comme étant prioritaire. Il lui demande donc de bien vouloir lui indiquer si elle envisage de donner une instruction au niveau national pour que les entreprises de ce secteur soient considérées comme étant de première nécessité et devant être épargnées par lesdites procédures de délestage.

Texte de la réponse

Notre pays traverse sa pire crise énergétique depuis les chocs pétroliers des années 1970. La crise ukrainienne et la volonté de la Russie d'utiliser l'approvisionnement énergétique comme une arme de guerre ont entraîné des tensions sans précédent sur les marchés du gaz et, par voie de conséquence, sur les marchés électriques européens. Par ailleurs, nous avons rencontré à l'été 2022 un épisode de sécheresse inédit qui a conduit à aborder l'automne avec des stocks hydroélectriques plus bas qu'usuellement. Enfin, la production nucléaire a atteint un niveau historiquement bas en 2022 du fait de l'effet conjugué du programme de visites décennales plus dense du fait du vieillissement du parc (grand carénage) et des conséquences du phénomène de corrosion sous contrainte (CSC) sur une quinzaine de réacteurs, découvert fin 2021. Ce contexte de crise énergétique a conduit le Gouvernement à mettre tout en œuvre pour garantir les meilleures conditions pour le passage de l'hiver. Cela passe d'abord par le plan de sobriété annoncé par le Gouvernement et qui est assorti de mesures visant à lisser les pics de consommation électrique, et qui a été soutenu par une campagne de communication grand public. Ce plan de sobriété est un grand succès. Grâce à la forte mobilisation des français, la consommation électrique est en baisse de l'ordre de 8,5 % cet hiver, après retraitement des conditions météorologiques, soit une baisse de consommation équivalente à la production de l'ordre de 7 réacteurs nucléaires. Par ailleurs, grâce à une politique d'anticipation menée par le Gouvernement dès le début de l'été, les stocks de gaz étaient remplis pour l'entrée de l'hiver. D'autre part, nous avons tout au long de l'année 2022 augmenté nos marges de manœuvre sur la production électrique, renouvelables comme thermiques, avec notamment un choc de simplification porté par les services déconcentrés de l'Etat pour accélérer les projets renouvelables en cours de développement. Nous avons enfin sécurisé notre capacité d'importation d'électricité au travers d'un partenariat de solidarité énergétique qui a été signé avec l'Allemagne fin novembre. L'ensemble de ces leviers, qui s'ajoutent aux dispositifs usuelles à la main du gestionnaire du réseau de transport RTE (baisse de tension, interruptibilité, EcoWatt), conduisent aujourd'hui, à condition que la mobilisation en faveur de la sobriété énergétique reste importante, à écarter un scénario de coupures locales, programmées et de moins cette hiver. Le système électrique français a ainsi passé une pointe hivernale le 12 décembre en signal EcoWatt « vert » de RTE. Pour autant, compte tenu de la situation du système électrique français au début de l'hiver le Gouvernement s'est préparé à des scénarios extrêmes dans lesquels un plan national de délestage électrique devrait être mis en œuvre et prendre la forme de coupures locales, ciblées et temporaires, limitées à environ 2 heures, pour certains usagers raccordés aux réseaux publics de distribution d'électricité, afin d'éviter des coupures de plus grande ampleur. C'est pourquoi la communication réalisée par le Gouvernement depuis fin novembre 2022 a permis de faire le point et de sensibiliser le grand public et les différents secteurs d'activités sur les risques qui pèsent sur notre système électrique national. En cas d'activation de cet ultime levier, afin d'éviter, le cas échéant, un effondrement du réseau, la réglementation prévoit que les installations institutionnelles les plus prioritaires sont inscrites sur des listes départementales afin de ne pas être coupées, la priorité absolue étant d'éviter les menaces immédiates sur la vie d'une personne. Ces listes sont faites au niveau des préfets de départements, au plus proche des parties prenantes locales et dans le cadre prévu par par l'arrêté du 5 juillet 1990 encadrant ces listes d'usagers dits prioritaires. Pour ne pas remettre en cause l'efficacité de ce dispositif, les consommations électriques préservées ne doivent pas dépasser 38% de la consommation du département. Les entreprises du secteur de la répartition pharmaceutique ne sont pas explicitement prévues par l'arrêté du 5 juillet 1990 encadrant ces listes d'usagers dits prioritaires. Pour autant, cela ne signifie pas qu'elles ne sont pas prises en compte dans l'exercice de priorisation à l'échelon local réalisé par les préfets. Par ailleurs, la plupart des installations les plus critiques disposent de moyens de secours autonomes (batterie, groupe électrogène) pour pallier le risque de coupure électrique, dans la mesure où la possibilité d'une coupure, par exemple en cas d'aléa météorologique ne peut jamais être complétement exclue, à l'instar des coupures d'électricité l'été dernière lors d'orage violents. Une foire aux questions sur les enjeux du délestage est disponible sur le site du Gouvernement (https://www.gouvernement.fr/reduire-notre-consommation-denergie/delestage-electrique). Je tiens à vous assurer de l'action résolue du Gouvernement pour faire face à cette crise énergétique exceptionnelle et pour engager les actions nécessaires pour éviter le recours à du délestage électrique et pour renforcer la sécurité d'approvisionnement en énergie de la France à court, moyen et long termes. La mobilisation des français en faveur de la sobriété nous montre que nous avons les moyens d'éviter le recours à ce dispositif.