Difficultés de remplacement dans de nombreux établissements scolaires
Question de :
Mme Naïma Moutchou
Val-d'Oise (4e circonscription) - Horizons et apparentés
Mme Naïma Moutchou attire l'attention de M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse sur la situation complexe induite par les difficultés de remplacement des personnels absents, enseignants et assistants d'éducation, dans de nombreux établissements du Val-d'Oise. Depuis la rentrée scolaire, en dépit des efforts et des engagements pris, les vacances de postes demeurent. Sur la circonscription de Mme la députée, ces problèmes d'effectifs sont récurrents. Au collège Saint-Exupery d'Ermont, il manque à la fois des enseignants, ce qui est déplorable et crée de graves inégalités entre ceux ayant cours et ceux qui attendent parfois plusieurs mois d'avoir un remplaçant, mais aussi des surveillants, ce qui pose le problème de l'encadrement et de la sécurité des élèves dans dans un établissement déjà étayé d'incidents de violences. À l'école élémentaire Victor Hugo d'Ermont, beaucoup trop d'élèves ont déjà vu leurs enseignants être remplacés depuis septembre 2022 et parfois jusqu'à un nouveau remplaçant par jour : cela va à l'encontre de la stabilité et de la pérennité indispensables à la bonne poursuite des cours et à une scolarité de qualité. Pour preuve, dans une des classes de CE1, il a été constaté que plus de la moitié des élèves ne savaient ni lire ni écrire en fin d'année. Il y aurait malheureusement bien d'autres exemples à citer, dont la conséquence à chaque fois est catastrophique : l'échec pour les uns dont le potentiel est pourtant là, la fuite de ceux qui le peuvent vers l'enseignement privé. Mais il convient de ne pas les stigmatiser : les parents d'élèves bien qu'inquiets, les enseignants et personnels éducatifs bien qu'épuisés, les enfants eux-mêmes, tous ne demandent qu'à pouvoir endiguer ce phénomène et faire vraiment de l'éducation l'un des piliers de la République. Elle l'interroge donc sur les mesures d'urgence à prendre pour ces établissements et de manière générale, sur les mécanismes envisagés pour redonner de l'attractivité aux métiers de l'instruction, tant sur plan des formations que de la rémunération.
Réponse en séance, et publiée le 3 mai 2023
REMPLACEMENTS DANS LES ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES
M. le président. La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour exposer sa question, n° 302, relative aux remplacements dans les établissements scolaires.
Mme Naïma Moutchou. Ma question concerne la situation éminemment complexe qui résulte des difficultés à assurer le remplacement des enseignants et des assistants d'éducation dans de nombreux établissements du Val-d'Oise.
En dépit des engagements pris et des efforts consentis, les vacances de poste ne s'amenuisent pas depuis la rentrée scolaire. J'ai encore fait le point récemment avec tous les élus locaux et les acteurs concernés : dans ma circonscription, les problèmes d'effectifs sont ainsi récurrents. J'en citerai deux exemples.
Au collège Saint-Exupéry d'Ermont, il manque des enseignants, ce qui provoque une rupture d'égalité entre les enfants qui ont cours et ceux qui doivent parfois attendre plusieurs semaines, voire plusieurs mois, pour avoir un remplaçant ; il manque également des surveillants, ce qui pose un problème d'encadrement et de sécurité des élèves, dans un établissement qui a déjà connu des incidents violents.
À l'école élémentaire Victor-Hugo d'Ermont, beaucoup trop d'élèves ont déjà connu des remplacements depuis le mois de septembre, avec parfois un remplaçant par jour. On est loin de la stabilité et de la pérennité indispensables au bon déroulement des cours et à une scolarité de qualité. Pour preuve, on a constaté que plus de la moitié des élèves d'une classe de CE1 ne savaient ni lire, ni écrire, en fin d'année. Il y aurait malheureusement bien d'autres exemples à citer, avec à chaque fois des conséquences catastrophiques. Pour les uns, qui pourtant ont le potentiel pour réussir, l'échec ; pour ceux qui peuvent, la fuite dans l'enseignement privé.
En vous faisant part de ces remontées de terrain, madame la secrétaire d'État, je ne veux évidemment stigmatiser personne. Les parents d'élèves, quoiqu'inquiets ; les enseignants et le personnel éducatif, quoiqu'épuisés et démotivés par les conditions d'exercice ; les enfants eux-mêmes : tous ne demandent qu'à endiguer le phénomène, pour que l'éducation soit véritablement l'un des piliers de la République.
À court terme, quelles mesures d'urgence pouvez-vous appliquer dans les établissements concernés ? À plus long terme et plus généralement, quelles solutions, en matière de formation et de rémunération, envisagez-vous pour redonner de l'attractivité aux métiers de l'instruction ?
M. le président. La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d'État chargée de la jeunesse et du service national universel. Madame la députée, je rends hommage à votre engagement en faveur des écoles du Val-d'Oise ; outre cette question posée dans l'hémicycle, je sais votre mobilisation auprès des différents cabinets pour assurer quotidiennement le suivi des remplacements et garantir la qualité de l'éducation dispensée dans les établissements.
S'agissant plus particulièrement du collège Antoine-de-Saint-Exupéry d'Ermont, les 592 élèves, auxquels s'ajoutent 53 élèves en section d'enseignement général et professionnel adapté (Segpa), sont encadrés par 47 enseignants – trois de plus qu'en 2020. Le nombre d'élèves par classe y est légèrement plus favorable qu'au niveau national.
Je le dis comme je le pense : les absences des enseignants sont un fléau. Elles représentent la plus forte rupture d'égalité que l'on puisse connaître, brisant les promesses républicaines de l'école en matière de mérite, d'accompagnement et d'élévation sociale et intellectuelle.
Certaines familles, disposant d'un capital social plus élevé, peuvent accompagner leurs enfants, payer des cours supplémentaires ou s'appuyer sur le tissu associatif afin de réduire l'impact de ces absences non remplacées dans le parcours scolaire. Notre responsabilité consiste à être présents aux côtés de toutes les autres familles, qui n'ont pas cette chance ou cette capacité.
À cet égard, le Président de la République a récemment pris un engagement très fort : au-delà de la rentrée 2023, une série de mesures complémentaires et particulièrement ambitieuses permettront à l'éducation nationale d'être à la hauteur en matière de remplacements. Grâce aux rémunérations supplémentaires, grâce à une revalorisation des rémunérations des missions elles-mêmes – à hauteur de 69 euros par heure – et grâce à l'amélioration de la qualité du climat scolaire, dont on parle beaucoup, plus d'enseignants seront volontaires pour effectuer des remplacements, même de très courte durée. Les élèves pourront ainsi bénéficier des heures d'enseignement prévues dans leur emploi du temps.
Ce combat est l'un des plus justes : permettre à un enfant d'apprendre à lire, à écrire et à compter sans prendre de retard, c'est lui permettre de s'inscrire dans un parcours de citoyenneté. Plus encore, c'est lui permettre de continuer à avoir confiance en l'école, une institution qui incarne, à mes yeux, une certaine sacralité républicaine. Cette confiance des jeunes ne doit pas connaître de rupture, sous peine de devoir être rétablie plus tard.
L'académie de Versailles a bénéficié de la création de nouveaux équivalents temps plein, en particulier dans le premier degré. Mais au-delà des dotations et du taux d'encadrement – dont je pourrais naturellement citer les chiffres –, il est essentiel de mobiliser les élus locaux et nationaux, dont vous faites partie, ainsi que les services de l'État, afin de répondre aux besoins de remplacement, là où se situent les promesses d'égalité et de mérite.
M. le président. La parole est à Mme Naïma Moutchou.
Mme Naïma Moutchou. Madame la secrétaire d'État, je vous sais attachée comme moi à l'idée de faire tenir à l'école sa promesse républicaine. Je suis néanmoins très inquiète, parce que les difficultés ne datent pas d'aujourd'hui : elles étaient là déjà il y a quelques années. Il y a une urgence particulière à faire de l'école une grande priorité et à s'en donner les moyens. Je serai très vigilante quant aux annonces faites par le Président de la République. Je veux dire à nouveau combien les écoles et les enfants qu'elles accueillent ont justement besoin que nous tenions les promesses qui ont été faites ; il faudra certainement agir beaucoup plus vite et plus fort.
Auteur : Mme Naïma Moutchou
Type de question : Question orale
Rubrique : Enseignement
Ministère interrogé : Éducation nationale et jeunesse
Ministère répondant : Éducation nationale et jeunesse
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 avril 2023