16ème législature

Question N° 304
de M. Paul Vannier (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Val-d'Oise )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > urbanisme

Titre > Projet Cap Héloïse : un non-sens écologique

Question publiée au JO le : 25/04/2023
Réponse publiée au JO le : 03/05/2023 page : 3988

Texte de la question

M. Paul Vannier alerte M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le projet « Promenades d'Argenteuil » situé sur l'île Héloïse d'Argenteuil. En 2016, la ville d'Argenteuil annonçait son choix de mettre en œuvre le projet « Cap Héloïse » porté par le promoteur FIMINCO. Il vise à construire sur l'ancienne île Héloïse un ensemble comprenant un multiplexe de plus de 40 m de haut, 3 grandes tours de 30 m avec 154 logements, un centre commercial et un cinéma. Le projet « Cap Héloïse », devenu « Promenades d'Argenteuil » conduirait à la privatisation d'un espace aujourd'hui public par la disparation d'une salle municipale, haut lieu de la vie associative argenteuillaise. Il impliquerait l'abattage de 80 arbres centenaires qui jouent un rôle de puits de carbone en entrée de ville et verrait le jour dans le lit majeur de la Seine, c'est-à-dire dans une zone inondable impropre à la construction d'habitations et de commerces permanents. Alors que le vente du terrain n'est pas encore finalisée, il souhaite connaître les mesures qu'il compte prendre pour protéger l'île Héloïse, son accès public, sa biodiversité et sa portée culturelle de la prédation immobilière et, plus généralement, il souhaite connaître les actions qu'il compte engager avec le Gouvernement pour protéger durablement les berges de Seine à l'heure du changement climatique.

Texte de la réponse

PROJET CAP HÉLOÏSE À ARGENTEUIL


M. le président. La parole est à M. Paul Vannier, pour exposer sa question, n°  304, relative au projet Cap Héloïse à Argenteuil.

M. Paul Vannier. Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Dans son sixième rapport, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) dresse une nouvelle fois un état des lieux accablant des conséquences du productivisme sur le climat et nos écosystèmes. Les scientifiques ne cessent de le répéter : il est encore temps de transformer nos modes de consommation et de production pour éviter d'atteindre le seuil critique des 2 degrés de réchauffement d’ici à 2050.

C’est au regard de cette urgence vitale que j'interroge le ministre de la transition écologique sur le projet dit des promenades d’Argenteuil, conçu par le promoteur Fiminco. Ce projet vise en effet à construire, dans ma circonscription, un multiplexe de plus de 40 mètres de hauteur, trois tours de 30 mètres de hauteur et un centre commercial. Cet ensemble de béton doit être coulé sur l’île Héloïse, à proximité immédiate de la Seine, en pleine zone inondable.

II aurait pour conséquences la disparition de la salle Jean-Vilar, haut lieu de la vie associative locale, l'étouffement du petit commerce du centre-ville et du cinéma indépendant d’Argenteuil, la privatisation d’un espace public et l'accroissement des pollutions. Il s’accompagnerait en outre de l’abattage de quatre-vingts arbres, dont certains sont centenaires, et provoquerait donc la disparition des paysages peints par Monet et les impressionnistes.

Le projet dit des promenades d’Argenteuil est tout aussi inutile qu’imposé.

L’enquête publique s’est conclue par un avis défavorable, fondé sur la loi de 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques ainsi que sur le code de l’environnement. Près de 10 000 habitants ont exprimé leur opposition dans une pétition lancée par un collectif citoyen, le comité Jean Vilar. Des recours en justice ont été formés pour obtenir l’annulation du permis de construire, dont certains sont toujours en cours.

Quelle que soit l’issue de ces procédures judiciaires, c’est la responsabilité politique du Gouvernement, directement engagée, que je souhaite interroger. En 2021, la loi « climat et résilience » fixait l’objectif de zéro artificialisation nette à l'horizon 2050. Le 14 juin dernier, le Gouvernement annonçait un plan de 500 millions d'euros pour développer des îlots de fraîcheur dans les villes.

Le projet dit des promenades d’Argenteuil est manifestement incompatible avec ces deux objectifs, puisqu’il consiste à artificialiser des sols en pleine terre et à détruire un îlot de fraîcheur naturel pour le remplacer par un cube de béton.

Monsieur le ministre délégué, êtes-vous prêt à faire passer la défense des biens communs avant l’intérêt des promoteurs ? Quelles actions comptez-vous engager pour protéger de la bétonisation l’île Héloïse d’Argenteuil et, plus largement, les berges de la Seine et de nos fleuves ?

M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement. Vous m'interrogez sur un projet très local qui anime la ville d'Argenteuil depuis plusieurs années. Il n'est pas de tradition qu'un ministre prenne position sur des instructions locales, mais je vais vous livrer ma compréhension du dossier, de sa procédure et de son impact.

Le projet dit des promenades d'Argenteuil, conçu par la société Fiminco, prévoit la construction d'un centre commercial, de logements et d'un cinéma multiplexe sur le site de l'île Héloïse d'Argenteuil. Une concertation a été menée avec l'ensemble des habitants de la commune pour modifier et préciser le projet de la société Fiminco.

Cette méthode est celle que le Gouvernement soutient auprès des porteurs de projets : une concertation bien faite, à l'écoute des autorités et des riverains, est le gage d'un projet et d'une étude d'impact de qualité. Les autorisations sont alors toujours plus solides et le projet s'intègre généralement mieux dans le cadre de vie.

Je remarque d'ailleurs que ce projet permet d'augmenter les espaces de nature, ce qui va dans le sens d'une meilleure adaptation au changement climatique et d'une meilleure protection de la biodiversité. Il a suivi toutes les étapes administratives d'autorisation requises, tant au niveau de la collectivité qu'au niveau des services de l'État, et a ainsi bénéficié d'une autorisation environnementale délivrée par le préfet en 2019.

Un collectif d'opposants a déposé une requête devant la justice administrative pour interdire le projet. La procédure contentieuse est toujours en cours, et vous comprendrez que je ne prenne pas position sur cette affaire tant qu'une décision au fond n'aura pas été rendue.

Même si la procédure a été respectée, des interrogations légitimes se sont exprimées, comme c'est le cas pour chaque projet ayant un impact sur l'environnement. Les services de l'État ont entendu ces oppositions et ont réalisé une analyse fine de tous les impacts du projet sur l'environnement.

S'agissant de son impact sur la nature et la biodiversité, je relève qu'il prévoit l'implantation de 224 arbres pour compenser les abattages prévus. Quant au risque élevé d'inondation, les services me confirment qu'il respecte la réglementation applicable aux zones inondables.

Je remercie les services de l'État pour le suivi régulier et technique qu'ils ont assuré de ce projet très local afin d'accompagner les porteurs du projet, les collectivités et les riverains. Ce suivi se poursuit et le sous-préfet d'Argenteuil recevra très prochainement les opposants au projet.