16ème législature

Question N° 308
de M. David Taupiac (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires - Gers )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > médecine

Titre > Conséquence des déconventionnements sur l'accès aux soins des patients gersois

Question publiée au JO le : 25/04/2023
Réponse publiée au JO le : 03/05/2023 page : 4006

Texte de la question

M. David Taupiac alerte M. le ministre de la santé et de la prévention sur les graves conséquences pour les patients du déconventionnement d'un certain nombre de médecins constaté récemment dans le département du Gers. Concrètement, le tarif des consultations sera libre et non remboursé par la sécurité sociale, y compris pour les patients en affection de longue durée ou ceux bénéficiant du tiers payant, de la CMU ou de la complémentaire santé. Ainsi, les premières remontées font état de consultations à 50 euros en cabinet et des visites à domicile à 70 euros avec indemnités kilométriques. Or des tarifs de consultations aussi importants et non remboursés par la sécurité sociale représentent une charge trop lourde pour les patients modestes et pour ceux qui ont besoin d'un suivi régulier. Ces patients se retrouvent de fait dans une situation contrainte dont ils ne sont pas responsables, faute de pouvoir changer de médecins car il n'y en a pas assez sur le territoire et sans pouvoir se retourner vers un hôpital public déjà exsangue. Le département du Gers se trouve déjà dans une situation de fracture sanitaire grave, que ce soit en matière d'accès à des médecins généralistes et bien davantage à des spécialistes, comme l'a établie la récente étude de l'UFC-Que choisir. Avec ces déconventionnements, on se dirige tout droit vers une médecine à deux vitesses où seules les personnes ayant une surcomplémentaire pourront continuer à pouvoir se soigner, ce qui est inacceptable. Cela signifie un risque de remise en cause de la notion de santé publique et de solidarité, née avec l'assurance maladie en 1945 et qui est censée garantir pour tout un chacun d'être pris en charge sur le plan sanitaire et social. Aussi, il lui demande ce que le Gouvernement entend faire pour permettre la continuité d'un accès égalitaire aux soins pour les patients gersois, qui n'ont pas à être victimes de l'échec des négociations récentes entre les médecins et la Caisse nationale d'assurance maladie.

Texte de la réponse

ACCÈS AUX SOINS DES PATIENTS GERSOIS


M. le président. La parole est à M. David Taupiac, pour exposer sa question, n°  308, relative à l'accès aux soins des patients gersois.

M. David Taupiac. Plusieurs cas de déconventionnement de médecins libéraux sont annoncés dans le département du Gers, notamment dans ma circonscription. Cela signifie que le tarif des consultations sera libre et non remboursé par la sécurité sociale, y compris pour les patients en affection de longue durée (ALD) et pour ceux bénéficiant du tiers payant, de la couverture maladie universelle ou de la complémentaire santé solidaire. Les patients gersois me font part de leur inquiétude extrême face aux conséquences concrètes que cela implique pour eux.

Les premières remontées qui m’ont été signalées font état de consultations à 50 euros en cabinet et de visites à domicile à 70 euros, avec des indemnités kilométriques de 1 euro par kilomètre. Ces consultations, remboursées par la sécurité sociale à hauteur de 61 centimes, vont représenter une charge trop lourde pour une grande majorité des patients, notamment pour les plus modestes et pour ceux qui ont besoin d'un suivi régulier, qui se retrouveront de fait dans une situation contrainte dont ils ne sont pas responsables, faute de pouvoir changer de médecin – car il n’y en a pas assez sur le territoire – ou de pouvoir se retourner vers l'hôpital public, déjà exsangue.

Vous le savez, et la cour régionale des comptes l'a de nouveau souligné dans son étude du mois de février, le Gers fait face à un risque important de désertification médicale. Le nombre de médecins généralistes y a diminué de 24 % entre 2010 et 2021, malgré les efforts entrepris par le conseil départemental. Les inégalités territoriales sont marquées, avec notamment une faible densité de médecins généralistes à l’est du département.

Avec ces déconventionnements, nous nous dirigeons tout droit vers une médecine à deux vitesses, dans laquelle seules les personnes ayant une surcomplémentaire continueront de pouvoir se soigner, ce qui est inacceptable. Selon l'Union française pour une médecine libre (UFML), 1 717 médecins auraient à ce jour franchi le pas dans l’ensemble du territoire. Cette dynamique soulève un risque de remise en cause des notions de santé publique et de solidarité nées avec l’assurance maladie en 1945, censées garantir à chacun une prise en charge sanitaire et sociale.

Les patients gersois n’ont pas à être les victimes indirectes des difficultés rencontrées lors des négociations entre les médecins, la Caisse nationale de l'assurance maladie et le Gouvernement. Quant aux médecins, ils méritent une revalorisation de leurs honoraires plus importante que celle qui leur a été proposée jusqu’à maintenant. À l’heure où l’inflation alimentaire oblige les foyers aux revenus modestes à faire des arbitrages, en sautant des repas ou en réduisant les portions, que pensez-vous, madame la ministre déléguée, de la dégradation de l'accès aux soins et du recul de la prévention – dont le Gouvernement est le garant – qui découleront de cette situation ? Qu’envisagez-vous de faire pour permettre que l'accès aux soins dans notre département demeure égalitaire ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées. Je sais les problèmes de densité médicale dans votre département du Gers que je connais bien. Il est vrai que la négociation d’une nouvelle convention entre l’assurance maladie et les organisations syndicales représentatives des médecins libéraux n’ayant pu aboutir à un accord, c'est un règlement arbitral qui a été élaboré dans l’attente d’une prochaine négociation.

Dans ce contexte, on a pu observer, dans certains territoires, la remise en cause par certains médecins de leur conventionnement avec l’assurance maladie. Le Gouvernement, et le ministre François Braun en particulier, sont très attentifs à ce phénomène, même s'il reste très minoritaire. À moyen terme, il ne fera qu’isoler les professionnels qui font le choix de se mettre en marge du système de santé.

Le Gouvernement a indiqué son intention d’approuver le règlement arbitral car il contient justement plusieurs dispositions qui faciliteront l’accès aux soins. D'abord, il conforte la volonté de libérer du temps médical en simplifiant les modalités de recrutement des assistants médicaux, partiellement financés par l’assurance maladie, et en ouvrant les critères d’éligibilité à davantage de professionnels. Ce règlement propose par ailleurs de valoriser à 60 euros, au lieu de 25, la première consultation réalisée par un médecin acceptant de devenir le médecin traitant d’un patient en ALD. Cette mesure vise à soutenir l’engagement des médecins au bénéfice des patients qui ont besoin d’un suivi régulier.

Le règlement permet aussi de pérenniser les dispositions mises en place durant l’été 2022 dans le cadre de la mission flash sur les urgences et les soins non programmés : la majoration de 15 euros pour les soins non programmés adressés par le Samu et la rémunération au taux horaire de 100 euros des médecins libéraux régulateurs. Il permettra en outre de conforter la prise en charge des personnes fragiles, en prévoyant une revalorisation du forfait patientèle médecin traitant pour les patients en ALD et ceux âgés de plus de 80 ans. Enfin, une revalorisation de 1,5 euro du tarif de consultation est prévue, ce qui représente une hausse de 6 %.

Toutes ces mesures ont vocation à permettre la continuité d'un accès égalitaire aux soins. Elles viennent compléter les actions déjà engagées par ailleurs par le Gouvernement. Le ministre François Braun sera aussi attentif à ce que les partenaires conventionnels puissent, dans les prochaines semaines, échanger sur les modalités, le calendrier et les axes d'une possible reprise des négociations, pour apporter aux professionnels et à nos concitoyens des réponses qui aillent au-delà du règlement arbitral. Le Gouvernement réaffirme son attachement au système conventionnel et au dialogue avec les partenaires sociaux.