Zéro artificialisation nette et serres agricoles
Question de :
M. Yannick Haury
Loire-Atlantique (9e circonscription) - Renaissance
M. Yannick Haury interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le « zéro artificialisation nette ». En effet, à l'occasion d'une conférence organisée par le PETR du Pays de Retz, l'agence d'urbanisme qui l'accompagne dans la mise en œuvre du ZAN a révélé des discordances entre les données de l'ONAS et les leurs. Le CEREMA a pris en compte les serres maraîchères dans le calcul de la consommation d'espace. Cependant, ces terres ont une vocation agricole et la lutte contre l'artificialisation doit permettre, notamment, la préservation de la capacité des terres à nourrir la population. Par ailleurs, l'installation de serres maraîchères n'est pas du ressort des maires. Pourtant, avec cette comptabilité, ces espaces se trouveraient déduits du crédit d'espace communal consommable. Dans ces conditions, il semble difficile pour les élus de planifier et de gérer la consommation du foncier sur leurs communes. Aussi, il souhaiterait connaître les intentions du Gouvernement en la matière.
Réponse en séance, et publiée le 3 mai 2023
OBJECTIF ZÉRO ARTIFICIALISATION NETTE ET SERRES AGRICOLES
M. le président. La parole est à M. Yannick Haury, pour exposer sa question, n° 317, relative à l'objectif zéro artificialisation nette et aux serres agricoles.
M. Yannick Haury. Dans ma circonscription, la conférence organisée au début de l'année par le pôle d'équilibre territorial et rural (PETR) du pays de Retz, responsable du schéma de cohérence territoriale (Scot), a mis en évidence des discordances entre les données de l'agence d'urbanisme, qui l'accompagne dans la mise en œuvre de l'objectif zéro artificialisation nette (ZAN), et celles issues de la base de l'Observatoire national de l’artificialisation des sols (Onas), produites par le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema), qui sert d'outil national de référence.
Pourtant, la question des données de départ est primordiale, car elles servent de référence et doivent traduire fidèlement les consommations passées. À titre d'exemple, pour la commune de Machecoul-Saint-Même, un pic de consommation de plus de 200 hectares apparaît en 2019, car le Cerema a pris en compte dans son calcul les serres maraîchères, qui ont une vocation agricole. Or, la lutte contre l'artificialisation vise notamment la préservation de la capacité des terres à nous nourrir.
En outre, à la différence de ce qui est prévu pour les locaux d'exploitation agricole, les maires ne délivrent pas de permis de construire pour l'installation de serres dites multichapelles. Ils verraient ainsi une partie des terrains de leurs communes s'artificialiser sans qu'il leur soit permis de maîtriser ce phénomène. Dans ces conditions, les élus seraient dans l'impossibilité de planifier et de gérer la consommation du foncier dans leur commune.
Pourriez-vous nous préciser, monsieur le ministre délégué, les modalités de calcul retenues pour arrêter le point de départ, donnée essentielle pour apprécier la trajectoire foncière des communes ?
M. le président. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.
M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement. Chaque année, 21 000 hectares d'espaces agricoles, naturels et forestiers sont consommés en moyenne en France, soit près de cinq terrains de football par heure. Ce phénomène a des conséquences non seulement écologiques – érosion de la biodiversité, aggravation du risque de ruissellement, limitation du stockage du carbone –, mais aussi socio-économiques – coût des équipements publics, augmentation des temps de déplacement et de la facture énergétique des ménages, dévitalisation des territoires en déprise, diminution du potentiel de production agricole, etc.
La France s'est donc fixé l'objectif d'atteindre zéro artificialisation nette des sols en 2050, avec un objectif intermédiaire de réduction de moitié de la consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers d'ici à 2030. Pour la première décennie, l’objectif est de réduire la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers, définie comme « la création ou l’extension effective d’espaces urbanisés ».
En tout état de cause, l’objectif zéro artificialisation nette n’emporte pas l’arrêt de toute construction. Cette trajectoire progressive est à décliner dans les documents de planification et d’urbanisme.
Vous m'interrogez sur le cas spécifique des nouvelles serres qu'un agriculteur pourrait vouloir installer. Vous le savez, seuls les châssis et serres dépassant 2 000 mètres carrés de surface et une hauteur de 1,80 mètre sont soumis à un permis de construire. En dessous de ces seuils, les serres de moins de 1,80 mètre ne sont soumises à aucune procédure et les serres de moins de 2 000 mètres carrés et de plus de 1,80 mètre sont soumises à une simple déclaration préalable.
Les serres agricoles ne seront donc pas considérées comme emportant une consommation d'espaces naturels agricoles et forestiers, sauf si elles sont intégrées dans un espace urbanisé, et ce jusqu'en 2031. En revanche, à compter de 2031, tout bâti sera considéré comme une surface artificialisée au-delà d’un seuil réglementaire. Les serres ne devraient représenter qu'un flux très modeste à l’échelle d'une commune.
Enfin, au-delà des jalons fixés pour l'application de cette grande ambition collective et de la comptabilisation des surfaces, le Gouvernement a proposé à plusieurs reprises de garantir que toutes les communes rurales bénéficient d'une possibilité de construction, en particulier lorsqu'elles ont peu construit par le passé. Des propositions de loi sont en cours de discussion sur ce sujet au Parlement.
Auteur : M. Yannick Haury
Type de question : Question orale
Rubrique : Aménagement du territoire
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 25 avril 2023