16ème législature

Question N° 336
de Mme Raquel Garrido (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Seine-Saint-Denis )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Ville et logement

Rubrique > logement

Titre > Accès au logement social et à l'hébergement d'urgence en Seine-Saint-Denis

Question publiée au JO le : 16/05/2023
Réponse publiée au JO le : 24/05/2023

Texte de la question

Mme Raquel Garrido alerte M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, sur l'accès au logement social et à l'hébergement d'urgence en Seine-Saint-Denis. Les habitantes et habitants de la circonscription de Mme la députée sont très nombreux à l'interpeller sur ce sujet si bien qu'elle alerte de manière hebdomadaire les services de l'État du département. En Seine-Saint-Denis, 118 000 demandes de logement social ne peuvent être satisfaites et plus de 8 500 ménages doivent être relogés au titre du droit au logement opposable. Selon la Drihl Île-de-France, en 2021, le délai médian pour accéder à un logement social en Seine-Saint-Denis était de 2 ans et 9 mois. Toutefois, 21 % des ménages demandeurs attendent entre 3 et 5 ans et 26 % attendent 5 ans et plus ! Concernant l'hébergement d'urgence, la situation est catastrophique. Interlogement 93, qui gère le SIAO du département, alertait déjà fin 2022 alors que sur les 739 demandes de mises à l'abri reçues le lundi 28 novembre, aucune n'avait pu être satisfaite. Le 27 avril 2023, l'association se disait très inquiète de la progression des demandes non pourvues sur le département et annonçait une augmentation de 138 % de ces demandes par rapport à 2022. En parallèle, la construction de logements sociaux est en baisse constante depuis 2017 et le nombre de logements vacants est très élévé et progresse (3,1 millions en France). Selon les données LOVAC, près de 45 000 logements du parc privé sont vacants en Seine-Saint-Denis. On en compte 3 700 sur la 5e circonscription de ce département. Mme la députée demande à M. le ministre ce qu'il compte faire pour permettre aux ménages demandeurs de logement social en Seine-Saint-Denis d'accéder à leur droit dans des délais raisonnables et s'il compte appliquer des mesures de réquisition des logements vacants. Enfin, elle souhaite savoir s'il va ouvrir en urgence des places d'hébergement supplémentaires pour accueillir les personnes en situation de sans-abrisme.

Texte de la réponse

LOGEMENT SOCIAL ET HÉBERGEMENT D'URGENCE EN SEINE-SAINT-DENIS


Mme la présidente. La parole est à Mme Raquel Garrido, pour exposer sa question, n°  336, relative au logement social et à l'hébergement d'urgence en Seine-Saint-Denis.

Mme Raquel Garrido. Depuis mon élection en juin 2022, je suis sollicitée chaque semaine par des habitants de ma circonscription de Seine-Saint-Denis au sujet du logement social et de l'hébergement d'urgence. Mes équipes et moi-même avons traité près de cent demandes : nous nous activons, nous écrivons courrier sur courrier aux offices publics de l'habitat (OPH), aux bailleurs sociaux et à la préfecture. En vain.

Tenez-vous bien : à ce jour, la seule situation qui a été débloquée concernait une dame qui avait reçu une balle perdue dans son appartement. Une balle perdue… Il faut donc en arriver là, à ce terrible niveau de traumatisme, pour espérer voir sa demande aboutir ! Mais alors, qu'en est-il des familles nombreuses qui s'entassent dans une seule pièce, des personnes reconnues prioritaires au regard du droit au logement opposable (Dalo) qui ne se voient proposer aucune solution et des sans-abri, qui appellent tous les jours le 115 ? Que faites-vous ?

Monsieur le ministre délégué, je souhaite vous alerter sur un autre problème : celui des maires qui ont tendance à octroyer des appartements selon des critères politiques. Lorsque les demandeurs les soutiennent, leur dossier se retrouve en haut de la pile ; à l'inverse, ceux qui ne les soutiennent pas sont exclus du service public du logement. Je rencontre ce problème dans la ville de Drancy, dans ma circonscription.

Les chiffres sont alarmants : en Seine-Saint-Denis, 118 000 demandes de logement social ne peuvent être satisfaites. Selon la direction régionale et interdépartementale de l'hébergement et du logement (Drihl) d'Île-de-France, en 2021, le délai médian pour accéder à un logement social en Seine-Saint-Denis était de deux ans et neuf mois ; mais 21 % des ménages demandeurs attendent entre trois et cinq ans et 26 % attendent plus de cinq ans.

La situation de l'hébergement d'urgence est catastrophique. Interlogement 93, qui gère le service intégré d'accueil et d'orientation (SIAO) du département, vous alertait déjà fin 2022 : sur les 739 demandes de mise à l'abri reçues le lundi 28 novembre, aucune n'avait pu être satisfaite – zéro sur 739 ! Plus récemment, le 27 avril 2023, l'association se disait très inquiète de la progression des demandes non pourvues dans le département et annonçait une augmentation de 138 % de ces demandes par rapport à la même date en 2022. Parallèlement, selon la base de données Lovac (logements vacants), près de 45 000 logements du parc privé sont vacants en Seine-Saint-Denis, dont 3 700 dans ma circonscription.

Le 10 mai, nous avons tous lu dans Challenges l'interview du Président de la République, qui a parlé d'un double choc en réponse à la crise du logement. Il n'a en revanche eu aucun mot sur le logement social. Arrêtez avec votre communication du choc et agissez ! Derrière tous les chiffres cités, il y a des familles, des enfants, de vraies personnes, qui sont logées dans des conditions indignes ou qui n'ont même pas de toit sur la tête. Ces personnes n'ont pas le temps d'attendre un choc de communication : il faut réquisitionner les logements vacants et ouvrir des places d'hébergement en urgence !

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports. Le choc et l'émotion que vous exprimez, à juste titre, sont partagés par mon collègue Olivier Klein, que je représente aujourd'hui. Pendant vingt ans, il a été maire d'une ville francilienne concernée par des situations difficiles en matière de logement social et d'hébergement d'urgence. Soyez donc rassurée : votre volonté d'action est partagée, sans aucun doute.

Permettez-moi de citer quelques chiffres et de rappeler que chacun d'entre eux correspond à une famille, qui est aidée – heureusement. Il existe certes des situations de détresse, mais aussi des situations pour lesquelles les aides sont renforcées. Depuis 2020, le Gouvernement a considérablement augmenté le parc d'hébergement d'urgence, qui a atteint 205 000 places. Compte tenu de la situation très tendue que vous avez rappelée et avec la volonté de ne pas laisser d'enfant à la rue, le Gouvernement a décidé des efforts complémentaires en 2023 ; Olivier Klein l'a récemment rappelé dans cet hémicycle. Un budget supplémentaire de 40 millions a été affecté au programme Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables, afin de renforcer le parc d'hébergement d'urgence, notamment cet hiver.

En parallèle, la stratégie de solidarité, conduite depuis le mois d'avril 2020, s'est accompagnée de la création de 3 600 places supplémentaires d'hébergement d'urgence en région Île-de-France, afin de réduire les tensions sur le parc d'hébergement francilien, dans une région particulièrement vulnérable à cet égard.

Le ministre délégué chargé de la ville et du logement a été alerté par le préfet de la région Île-de-France de la pression croissante sur le parc d'hébergement au regard des besoins persistants des publics vulnérables et à l'approche des Jeux olympiques et paralympiques. Le Gouvernement est particulièrement vigilant à ne pas remettre en cause la capacité d'accueil et d'hébergement d'urgence des personnes en difficulté en Île-de-France au cours des prochains mois. Le maintien du parc francilien constitue un objectif prioritaire. Vous avez évoqué les chiffres du 115 et du SIAO ; chaque soir, en Île-de-France, près de 100 000 personnes sont hébergées par l'État, dont 19 000 après l'orientation du SIAO de Seine-Saint-Denis. Le ministre délégué chargé de la ville et du logement m'a chargé de vous indiquer qu'il se tient à votre disposition pour examiner les cas particuliers, notamment dans votre département.

Quant aux critères d'attribution des logements sociaux, je ne ferai pas de commentaire sur telle ou telle situation locale. Vos propos montrent cependant une chose : pour améliorer la situation et construire davantage, nous avons besoin des maires. Le Gouvernement peut et doit faire beaucoup, en particulier en matière d'hébergement d'urgence ; mais pour la construction de logements sociaux et leur attribution dans de bonnes conditions, nous avons besoin de l'engagement de l'ensemble des élus locaux. Il ne s'agit pas de renoncer à exercer les responsabilités de l'État, mais de dire que nous devons impérativement mener un effort de coopération pour gagner ce combat, notamment dans le contexte actuel de crise du logement.