16ème législature

Question N° 337
de M. Perceval Gaillard (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Réunion )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Ville et logement
Ministère attributaire > Ville et logement

Rubrique > outre-mer

Titre > Politique de la ville à La Réunion

Question publiée au JO le : 16/05/2023
Réponse publiée au JO le : 24/05/2023

Texte de la question

M. Perceval Gaillard attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé de la ville et du logement, sur la question de la politique de la ville à La Réunion. Elle a produit des effets positifs : une étude de l'Insee de 2021 montre que les conditions de vie des habitants des 49 quartiers prioritaires se sont considérablement améliorées notamment sur le plan économique, depuis 2020 et ce, malgré la crise sanitaire. Néanmoins, la situation des habitants des quartiers prioritaires (1/5 de la population réunionnaise contre une moyenne d’un sur 15 dans l'hexagone) est nettement plus difficile que celle de la population des QPV de l'Hexagone (54 % des habitants de ces quartiers n'ont pas de diplôme ; 66 % des habitants en âge de travailler sont sans emploi, etc.) Par ailleurs, de nombreux quartiers sont laissés à l'abandon. La raison de ce délaissement réside dans les critères retenus pour « entrer » dans le dispositif QPV, notamment depuis la réforme de 2014. En clair : c'est l'inadéquation entre des critères « légitimes évidemment » et une réalité particulière de La Réunion. Premier constat : les quartiers concernés par la politique de la ville sont généralement urbains. Les cartes et les analyses de l'Insee montrent 8 pôles dits urbains. Mais il est regrettable que cette classification ne tienne pas compte de la réalité : on ne vit pas de la même manière « dans les hauts » que « dans les bas ». Quant à la taille de ces quartiers, elle est très variable (allant de 1 000 à 10 000 habitants). Deuxième constat : généralement, la population des QPV vit dans du logement social. Or dans « les hauts » voire à mi pente, le logement social est plus rare. C'est souvent de l'habitat précaire, même insalubre (les petites cases en bois sous tôle). Les moyens ne sont pas à la hauteur des besoins. Troisième constat : pour entrer dans le dispositif QPV, figure le critère de la densité. Or bien évidemment, dans les zones réellement rurales, ce critère n'est pas pertinent. C'est par exemple le cas du quartier de La Saline (commune de Saint-Paul), qui était QPV avant 2014 et ne l'est plus aujourd'hui à cause du critère « densité ». C'est vrai aussi pour un bon nombre de quartiers à La Réunion. Quatrième constat : on constate des disparités marquées entre les quartiers prioritaires, notamment en matière de revenu : un revenu médian de 4 000 euros par UC dans certains quartiers, ce revenu média peut être de 7 800 euros dans d'autres quartiers QPV. Les questions sont donc les suivantes : comment peut-on résorber les dysfonctionnements socio-urbains constatés ? Si la logique de continuité du territoire est intéressante, est-il judicieux d'agir essentiellement par la vision de la redynamisation des centres villes ? Comment intégrer la question du désenclavement ? Et de manière plus générale : comment penser le « fait urbain réunionnais » ? Autrement dit, la question de la structuration des territoires. Il souhaite connaître sa position sur le sujet.

Texte de la réponse

POLITIQUE DE LA VILLE À LA RÉUNION


Mme la présidente. La parole est à M. Perceval Gaillard, pour exposer sa question, n°  337, relative à la politique de la ville à La Réunion.

M. Perceval Gaillard. La politique de la ville à La Réunion a produit des effets positifs : une étude de l'Insee de 2021 montre que les conditions de vie des habitants des quarante-neuf quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV) se sont améliorées depuis 2020, notamment sur le plan économique, et ce, malgré la crise sanitaire.

Néanmoins, la situation des habitants des quartiers prioritaires – un cinquième de la population réunionnaise, contre une moyenne d'un quinzième dans l'Hexagone – est nettement plus difficile que celle de la population des QPV de l'Hexagone : 54 % des habitants de ces quartiers n'ont pas de diplôme, 66 % des habitants en âge de travailler sont sans emploi. Par ailleurs, de nombreux quartiers sont laissés à l'abandon, en raison des critères retenus pour bénéficier du dispositif QPV, notamment depuis la réforme de 2014 ; autrement dit, en raison de l'inadéquation entre des critères nationaux – légitimes évidemment – et une réalité particulière de La Réunion.

Premier constat : les quartiers concernés par la politique de la ville sont généralement urbains. Les cartes et les analyses de l'Insee dénombrent à La Réunion huit pôles dits urbains, mais il est regrettable que cette classification ne tienne pas compte de la réalité : on ne vit pas de la même manière « dans les hauts » et « dans les bas ». Quant à la taille de ces quartiers, elle varie de 1 000 à 10 000 habitants.

Deuxième constat : la population des QPV vit généralement dans des logements sociaux. Or « dans les hauts », voire à mi-pente, le logement social est plus rare. Il s'agit souvent d'habitats précaires, même insalubres – de petites cases en bois sous tôle. Les moyens ne sont pas à la hauteur des besoins.

Troisième constat : pour bénéficier du dispositif QPV, un critère de densité est pris en considération. Or dans les zones réellement rurales, ce critère n'est pas pertinent. Ainsi, le quartier de La Saline, dans la commune de Saint-Paul, était un QPV avant 2014 ; il ne l'est plus à cause de ce critère. Le même constat s'applique à bon nombre de quartiers à La Réunion.

Quatrième constat : il existe des disparités marquées entre les QPV, notamment en matière de revenus. Le revenu médian varie de 4 000 euros à 7 800 euros par ménage.

Comment peut-on résorber les dysfonctionnements socio-urbains constatés ? Si la logique de continuité du territoire est intéressante, est-il judicieux d'agir essentiellement selon la vision de la redynamisation des centres-villes ? Comment intégrer la question du désenclavement ? Plus généralement, comment penser le fait urbain réunionnais ? Êtes-vous prêts à adapter le dispositif QPV aux réalités de La Réunion ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des transports.

M. Clément Beaune, ministre délégué chargé des transports. La réponse est oui. Le zonage des quartiers prioritaires de la politique de la ville a été défini par la loi du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine. Des modalités spécifiques ont été, dès l'origine, prévues pour les départements et collectivités d'outre-mer, afin de prendre en compte tant leurs spécificités que celles de chacun de ces territoires. Le décret du 22 décembre 2014 relatif aux modalités de détermination des QPV particulières aux départements d'outre-mer, à Saint-Martin et à la Polynésie française précise ces modalités de calcul pour La Réunion et pour la Martinique.

Le zonage des quartiers prioritaires de la politique de la ville et les contrats de ville ont été prorogés jusqu'à la fin de l'année 2023 par la loi de finances pour 2022. L'année 2023 est celle de la refondation des contrats de ville et d'une refonte du zonage des QPV. L'ambition est que la géographie prioritaire tienne mieux compte des réalités sociales, qui ont évolué depuis la loi de 2014. Pour les outre-mer, une mission interinspections relative aux zonages et à la gouvernance de la politique de la ville a été lancée le 23 février. Elle a pour objectif de faire des propositions concrètes, sans tabou, sur les modalités de définition de la géographie prioritaire dans tous les outre-mer. Elle va à la rencontre des acteurs locaux et des élus concernés, afin de prendre en considération les spécificités de chaque territoire ultramarin. Son rapport final sera rendu à la fin du mois de juin. C'est à cette aune que nous pourrons évaluer la pertinence d'une refonte de la géographie.

Le ministre délégué chargé de la ville et du logement, Olivier Klein, est engagé dans la réforme de la politique de la ville, qui sera l'occasion de lui donner une nouvelle ambition, en tenant compte d'un zonage adapté aux nouvelles réalités.

Mme la présidente. La parole est à M. Perceval Gaillard.

M. Perceval Gaillard. Nous sommes satisfaits de la réponse du Gouvernement. Nous nous tenons à sa disposition pour définir de manière très fine ces critères, afin que la politique de la ville réponde non seulement à la question du renouvellement urbain, mais également à celle de la cohésion sociale, qui sont très importantes dans les territoires.