16ème législature

Question N° 340
de M. Pierre Morel-À-L'Huissier (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires - Lozère )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > professions et activités sociales

Titre > Revalorisation salariale du secteur médico-social

Question publiée au JO le : 16/05/2023
Réponse publiée au JO le : 24/05/2023

Texte de la question

M. Pierre Morel-À-L'Huissier interroge M. le ministre de la santé et de la prévention sur la situation persistante des inégalités de traitement salarial dans le secteur médico-social. Sans disconvenir qu'il y ait eu des efforts en matière de revalorisation du SMIC et de l'octroi de la prime Ségur, il apparaît que la base salariale des ASH/ASL notamment dans les EHPAD (convention collective 51) et les centres pour personnes handicapées est encore très réduite. Il existe également une hiérarchie salariale peu intéressante pour les aides-soignants ainsi que les infirmiers ou infirmières. Ces personnels diplômés subissent depuis plusieurs années un tassement de leur niveau de rémunération qui conduit à rendre moins attractif ce type d'emploi tant dans les EHPAD (privés ou publics) que dans les hôpitaux. À cela s'ajoute que la prime Ségur ne s'applique pas à tous les établissements et parfois même, au sein même d'un établissement, pas à tous les personnels dépendamment de leur type de convention. Il avait été annoncé en 2022 que les différentes conventions collectives devaient être prochainement réunies. Dans un département comme la Lozère, où le secteur médico-social est le principal employeur du département, de telles iniquités fragilisent tout un modèle économique, provocant des départs entre secteur du grand âge et du handicap et bloquant un certain nombre de recrutements. Aussi, il lui demande où en sont les discussions pour harmoniser les conventions collectives et s'il est envisagé une revalorisation globale de la grille salariale des ASL, ASH, AS et infirmiers dans un court terme. Il lui demande plus largement s'il est envisageable qu'une revalorisation globale des bas salaires puisse intervenir afin de redonner une attractivité à ces emplois.

Texte de la réponse

RÉMUNÉRATIONS DANS LE SECTEUR MÉDICO-SOCIAL


Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Morel-À-L'Huissier, pour exposer sa question, n°  340, relative aux rémunérations dans le secteur médico-social.

M. Pierre Morel-À-L'Huissier. J'aurai d'abord une pensée pour Carène, l'infirmière assassinée hier à Reims, et pour les trois policiers décédés dimanche dans le Nord, ainsi que pour les enseignants et les élus victimes de menaces. J'exerce un mandat parlementaire depuis vingt et un ans et je constate que la situation en la matière est devenue catastrophique, notamment à cause des attaques lancées sur internet.

Madame la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, ma question concerne les effets d'un problème général en Lozère, un département où vous vous rendrez bientôt et dont nous serons heureux de vous présenter l'excellence, à travers ses vingt-neuf Ehpad et quarante-sept centres pour personnes handicapées. Si ces établissements s'inscrivent dans une longue histoire locale, ils sont confrontés aux difficultés déjà évoquées liées au Ségur 1, au Ségur 2 et aux accords dits Laforcade.

Des clarifications sont nécessaires. Parmi les hôpitaux, les Ehpad, les IME – instituts médico-éducatifs –, les MAS – maisons d'accueil spécialisées –, les IMP – instituts médico-professionnels –, les ESAT – établissements et services d'aide par le travail –, quels établissements sont concernées par ces dispositions ? Les mesures, compliquées, diffèrent selon les populations aidées – les personnes âgées et les personnes handicapées. Quelles catégories socioprofessionnelles de salariés – soignants ou personnel administratif, technique et logistique – concernent-elles ? Tout cela est assez confus ; ce n'est pas une critique, mais un constat.

Outre ces disparités entre les établissements et entre les salariés, contraires à un objectif d'équité salariale, il faut mentionner la contraction des grilles salariales liée à l'augmentation du Smic, entre autres problèmes concernant la rémunération des aides-soignants, des infirmiers, des ASH – agents de service hospitaliers – et des ASL – agents des services logistiques –, qui expliquent la faible attractivité de ces professions.

Des associations ont compensé les lacunes laissées par l'État avec leurs deniers personnels, en piochant dans leurs réserves – je pense, entre autres, au Clos du nid ou à l'A2LFS, l'Association lozérienne de lutte contre les fléaux sociaux, et à l'association Résidence Saint-Nicolas. La récente restriction du champ de la réduction Fillon a encore ajouté aux difficultés. Vous constaterez cela par vous-même et nous en reparlerons sur place, mais j'ai observé, en tant que président de deux Ehpad et administrateur de cinq à six établissements pour personnes handicapées, de nombreuses démissions au sein des personnels, ainsi qu'une augmentation de l'absentéisme, des ruptures conventionnelles et des difficultés de recrutement, d'autant plus problématiques que le taux d'encadrement dans les Ehpad oscille entre 0,4 et 0,6 équivalent temps plein par résident – dans le secteur du handicap, ce taux se situe plutôt entre 0,6 et 1,44.

Même si je ne conteste pas l'action du Gouvernement, je tenais à vous faire part de ces difficultés.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des personnes handicapées.

Mme Geneviève Darrieussecq, ministre déléguée chargée des personnes handicapées. Vous avez raison de saluer la mémoire de Carène, après sa mort violente. Les actes de violence, envers les soignants mais pas seulement, sont de plus en plus nombreux ; cette tendance générale de notre société est très préoccupante.

Par ailleurs, je vous confirme ma venue dans votre département la semaine prochaine. Je le connais déjà un peu, ce sera un plaisir et j'y prêterai beaucoup d'attention.

Vous le rappelez, le secteur médico-social est confronté à d'importants problèmes de recrutement et de fidélisation des professionnels. Dans un contexte de vieillissement de la population et d'augmentation des besoins d'accompagnement des personnes âgées et des personnes handicapées, le Gouvernement a inscrit dans la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 une trajectoire de recrutement de 50 000 professionnels infirmiers et aides-soignants pour accompagner nos aînés – les résidents en Ehpad, en particulier – dans les prochaines années.

Face à la pénurie de candidats aux métiers du soin et de l'accompagnement, liée notamment à l'image de ces métiers, nous agissons par ailleurs pour renforcer l'attractivité de ce secteur. J'ai déjà évoqué, en réponse à Mme Brulebois, notre action concernant la rémunération, en soulignant l'importance d'aboutir rapidement à une convention collective unique pour les secteurs social et médico-social. Les deux conventions en vigueur prévoient des niveaux de rémunération très bas lors du démarrage de carrière et n'incitent nullement à entrer dans ces métiers. Il faut être proactifs dans ce domaine. Comme je l'indiquais tout à l'heure, le ministre des solidarités, de l'autonomie et des personnes handicapées, Jean-Christophe Combe, et moi-même avons reçu il y a quelques semaines les représentants de Nexem et de la Fehap – Fédération des établissements hospitaliers et d'aide à la personne privés non lucratifs –, qui participent aux négociations avec les organisations syndicales, pour leur redire l'importance d'avancer, notamment en matière de classification et de rémunération. Tout cela est d'autant plus complexe que le personnel relève dans certains établissements de la fonction publique territoriale, dans d'autres de la fonction publique hospitalière, sans oublier les salariés des établissements gérés par des associations conventionnées que j'évoquais à l'instant et de ceux à but lucratif.

Quoi qu'il en soit, il faut avancer vers une convention collective unique dans les secteurs médical et médico-social, mais aussi développer l'apprentissage, qui doit être massivement soutenu. Les formations initiales et continues doivent être adaptées pour répondre aux évolutions des métiers, et la validation des acquis de l'expérience, fortement favorisée – ce travail, déjà engagé, permettra de nouveaux parcours professionnels dans ces établissements. Même s'il reste beaucoup à faire, ces avancées démontrent la volonté forte du Gouvernement de soutenir les acteurs du secteur médico-social, mobilisés chaque jour aux côtés de nos concitoyens les plus vulnérables.