16ème législature

Question N° 3503
de M. François Ruffin (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Somme )
Question écrite
Ministère interrogé > Collectivités territoriales
Ministère attributaire > Collectivités territoriales et ruralité

Rubrique > communes

Titre > Maires : vers une crise des vocations ?

Question publiée au JO le : 29/11/2022 page : 5707
Réponse publiée au JO le : 31/01/2023 page : 895
Date de changement d'attribution: 29/11/2022

Texte de la question

M. François Ruffin alerte Mme la ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales sur l'explosion des coûts liés à l'énergie pour les communes et sur la crise des vocations qui pourrait s'ensuivre. « Cette année, on doit renouveler nos contrats sur l'énergie. Ce n’est vraiment pas de chance que ça tombe là : le prix de l'électricité va être multiplié par trois, le gaz par cinq. Pour une petite commune comme la mienne, c'est plus 350 000 euros par an. C'est la somme qu'on alloue d'habitude à l'investissement, à nos projets sympas. On va devoir se priver, pas seulement sur la voirie, mais surtout sur ce qu'on aime : le projet de terrain de basket 3v3, l'extension de la mairie pour accueillir France Services. Pendant des nuits, je n'en ai pas dormi. » nous dit Julien Kerguillec, maire de Pleyber-Christ (29), 3 000 habitants. « On vient de lancer un appel d'offres et EDF, le moins cher, nous annonce 1 860 000 euros, c'est 600 % d'augmentation ! Comment on va tenir si l'État ne met pas la main à la poche ?» déclare Laurent Jacques, maire du Tréport (76), 4 900 habitants. Pour les élus locaux, c'est la double peine : après avoir participé, avec leurs services, à tenir le pays debout pendant la crise du covid-19, les voici confrontés d'un côté de nouveau à du stress, des nuits blanches, des dilemmes. « Depuis 2 ans, on ne fait que du fonctionnement, on ne peut quasiment plus porter de projets. Bref, on ne gère plus que les emmerdes ». Au-delà du matériel, des cantines, des routes ..., M.le député alerte sur un désarroi « spirituel » : la crise des vocations. Une crise des vocations que connaît déjà l'hôpital. Une crise des vocations que connaît l'école. Bientôt au tour des mairies ? Va-t-on dégoûter les élus de leur mandat ? C'est un bon bout de la France d'en bas qui tient par là, par ce mystère, ces hommes et ces femmes qui choisissent de s'engager pour leur village, leur bourg, d'y consacrer leurs soirées, leurs week-ends, soufflant rarement. Dans le Morbihan, par exemple, ce sont 15 % des élus municipaux qui ont démissionné depuis 2020 ! « Si ça continue, si on ne peut plus mener de nouveaux projets, inventer, innover, ça va être la déprime. Là on a réduit tout au maximum : je ne vais quand même pas couper le chauffage dans les écoles et les EHPAD. Mais quand je croise la sous-préfète, elle me dit « Croyez bien que si j'avais du nouveau, je vous aurais appelé » » rapporte le maire de Pleyber- Christ. L'État a proposé un bouclier tarifaire appliqué à une double condition : que les communes aient moins de dix salariés et un budget inférieur à deux millions d'euros. Pour les autres, la très vaste majorité, l'État est aux abonnés absents et les laisse se débrouiller seuls. Aussi, sur le plan financier, nous réclamons un minimum : étendre ce bouclier tarifaire pour limiter la casse et indexer la dotation générale aux collectivités sur l'inflation. Ce serait de quoi remettre du baume aux cœurs. M. le député souhaite savoir ce que Mme la ministre compte faire sur le sujet.

Texte de la réponse

Le Gouvernement est particulièrement attaché à la défense des élus locaux et des maires, dont il salue l'engagement. Les élus ont été au coeur, depuis quatre ans, de la résilience dont la Nation a su faire preuve face aux crises successives. Soutenir les élus et les vocations passe notamment par le fait de les aider à lutter contre les effets de l'inflation pour leur permettre d'assurer leurs missions et la continuité du service public. Le Gouvernement est ainsi conscient des conséquences pour les communes de l'inflation sur les dépenses de fonctionnement (électricité, gaz, chauffage, etc.) de certains de leurs équipements publics (piscines, cantines, etc.) et de la revalorisation du point d'indice découlant de la mise en œuvre du décret du 7 juillet 2022. Dans le sillage des mesures mises en œuvre en 2022, le Gouvernement accompagnera, en 2023, les collectivités territoriales afin de les aider à faire face à la hausse de leurs factures d'énergie. Dans le but de couvrir les différentes situations que peuvent rencontrer les collectivités, l'État mobilisera 2,5 Md€ dans le cadre d'un dispositif à trois niveaux : - la prolongation du « bouclier tarifaire » permettra de limiter à 15 % la hausse des tarifs d'électricité des communes éligibles aux tarifs réglementés de vente employant moins de 10 employés et moins de 2 M€ de recettes de fonctionnement, soit près de 28 000 communes potentiellement concernées ; - la mise en place d'un « amortisseur électricité » permettant de réduire la facture d'électricité de toutes les collectivités territoriales, indépendamment de leur taille. L'État prendra en charge, sur 50% des volumes consommés, la part de la facture d'électricité au-delà d'un plancher de 180€/MWh et jusqu'à un plafond de 500€/MWh. La baisse du prix apparaîtra directement sur la facture et l'Etat versera une compensation financière aux fournisseurs d'énergie ; - le « filet de sécurité » mis en place en 2022 est prolongé en 2023, étendu aux régions et aux départements et centré sur les seules dépenses d'énergie. Sont éligibles les collectivités (1) dont le potentiel fiscal ou financier par habitant est inférieur au double de la moyenne de la strate et (2) ayant perdu au moins 15 % d'épargne brute entre 2022 et 2023. La dotation sera égale à la moitié de la hausse des dépenses d'énergie à laquelle aura été préalablement retranchée 50 % de la hausse des recettes réelles de fonctionnement. Un décret en préparation viendra préciser le fonctionnement de la dotation, ses modalités de calcul et de versement. Celle-ci sera attribuée automatiquement aux communes et groupements en 2023 qui pourront solliciter un acompte de leur dotation prévisionnelle avant le 30 novembre 2023. Outre ce soutien budgétaire spécifique, toutes les communes bénéficient de la revalorisation forfaitaire des bases d'imposition, indexée sur l'inflation. Le Gouvernement ne souhaitant pas plafonner la revalorisation forfaitaire des bases en 2023, celles-ci pourraient progresser d'environ 7 % et rapporter 2,8 Md€ de recettes fiscales aux collectivités locales. Par ailleurs, pour la première fois depuis treize ans, la dotation globale de fonctionnement augmentera, de 320 M€, ce qui permettra de préserver la dotation de près de 95 % des collectivités. Pour soutenir les projets d'investissement des collectivités territoriales, la loi de finances pour 2023 prévoit, d'une part, le maintien à hauteur de 2 Md€ des dotations de soutien à l'investissement local des collectivités (dotation d'équipement des territoires ruraux, dotation de soutien à l'investissement local, dotation politique de la ville, dotation de soutien à l'investissement des départements) et, d'autre part, la création d'un fonds pour l'accélération de la transition écologique dans les territoires doté de 2 Md€.