16ème législature

Question N° 363
de M. Frédéric Petit (Démocrate (MoDem et Indépendants) - Français établis hors de France )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Intérieur et outre-mer
Ministère attributaire > Intérieur et outre-mer

Rubrique > Français de l'étranger

Titre > Dématérialisation des cartes d'identité pour les Français de l'étranger

Question publiée au JO le : 06/06/2023
Réponse publiée au JO le : 14/06/2023 page : 5781

Texte de la question

M. Frédéric Petit attire l'attention de M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer sur les difficultés rencontrées par beaucoup de ses concitoyens de l'étranger dans leurs démarches administratives. M. le député tient à saluer les annonces faites le 21 avril 2023 par Mme la Première ministre qui précisent que « les délais d'obtention de rendez-vous seront réduits à un maximum de 30 jours d'ici l’été ». Les Français établis à l'étranger, à l'instar de ceux résidant sur les territoires national et ultramarins, attendent en effet une meilleure accessibilité aux services publics. Outre les nombreuses difficultés quant à la prise de rendez-vous, l'éloignement des consulats et ambassades demeure un réel obstacle pour permettre à ces Français de réaliser leurs démarches. Ainsi, l'expérimentation de la dématérialisation des passeports au Canada et au Portugal prévue par le ministère, même si elle a, de façon très regrettable, pris du retard et ne débutera qu'au 1er mars 2024, va dans le bon sens. Néanmoins, elle ne suffit pas à répondre aux attentes des Français établis hors de France. En effet, M. le député déplore qu'aucun projet de dématérialisation n'ait été annoncé en ce qui concerne le renouvellement de la carte nationale d'identité (CNI). Il s'étonne d'autant plus que l'accélération, par la dématérialisation, des procédures de renouvellement du nouveau format électronique des CNI permettrait de faciliter le quotidien des Français de l'étranger dans leurs démarches en ligne grâce au déploiement de France Identité. Par conséquent, il l'interroge sur les raisons de ces différences et souhaite savoir si des mesures semblables à celles en vigueur et à venir pour les passeports seront prises prochainement pour renouveler les cartes d'identité depuis l'étranger.

Texte de la réponse

CARTES D'IDENTITÉ POUR LES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER


Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Petit, pour exposer sa question, n°  363, relative aux cartes d'identité pour les Français de l'étranger.

M. Frédéric Petit. Dans la continuité des questions déjà posées par mes collègues députés des Français de l'étranger, la mienne concerne les difficultés que rencontrent beaucoup de nos concitoyens établis hors de France pour effectuer leurs démarches administratives.

Le 21 avril dernier, la Première ministre a annoncé que les délais d'obtention de rendez-vous seront réduits à un maximum de trente jours d'ici à l'été. Il s'agissait de l'Hexagone, mais cette mesure devrait s'appliquer partout. Je salue cette annonce et soutiens l'objectif, qui répond aux attentes des Français, y compris de ceux vivant à l'étranger. En effet, alors que l'accessibilité des services publics est primordiale pour ces derniers, le renouvellement des titres d'identité s'apparente parfois à un véritable parcours du combattant administratif. Aux difficultés pour prendre rendez-vous – nous avons connu deux systèmes, dont l'un n'a pas fonctionné durant deux ans –, s'ajoute l'éloignement des consulats et des ambassades, réel obstacle à l'accomplissement des démarches.

La promesse d'expérimenter au Portugal et au Canada une dématérialisation des démarches de renouvellement des passeports est très prometteuse. Je regrette toutefois qu'il ne s'agisse que d'une expérimentation et que son début ait été reporté d'un an et demi, au 1er mars 2024. S'il est possible de procéder ainsi dans deux pays, pourquoi tous ne seraient-ils pas concernés ? Il est désormais impératif de respecter la date fixée, afin de ne pas décourager nos concitoyens de l'étranger d'effectuer les démarches administratives les plus essentielles : cela aboutit parfois à les faire changer de citoyenneté, en adoptant la nationalité locale. La dématérialisation constitue donc une avancée indispensable pour répondre enfin à leurs besoins et pour remédier à un sentiment d'injustice, voire de déclassement.

Pourquoi ce projet n'est-il pas appliqué conjointement aux procédures de renouvellement des cartes nationales d'identité (CNI) ? En France, la procédure d'obtention des cartes d'identité électroniques de nouvelle génération est dématérialisée : cela devrait permettre de déployer rapidement France identité à l'étranger, facilitant l'ensemble des démarches en ligne afin de résoudre un problème auquel nous sommes confrontés depuis des années. Pourquoi conserver des procédures différentes ? Des mesures similaires à celle relative aux passeports ou prises par France identité seront-elles prochainement appliquées pour le renouvellement des cartes d'identité des Français établis à l'étranger ? Il est urgent d'améliorer significativement l'accès de nos compatriotes aux services publics, en France ainsi qu'à l'étranger.

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer. Monsieur Petit, vous évoquez un délai supérieur à trente jours dans l'Hexagone : en tant que ministre délégué chargé des outre-mer, je ne résiste pas au plaisir de remarquer que ces démarches sont moins longues et tout à fait fluides dans les outre-mer.

L'exigence de rationalisation des démarches administratives pour renouveler les titres d'identité va de pair avec l'impératif tout aussi crucial de lutte contre la fraude et l'usurpation d'identité. Les Français établis à l'étranger bénéficient déjà, à la différence de leurs compatriotes établis en France hexagonale, de plusieurs dérogations visant à tenir compte du caractère parfois long et coûteux des déplacements vers les services consulaires.

La limitation aux passeports de ces dispositifs fortement dérogatoires a été justifiée par le fait que ce dernier est le seul titre indispensable aux Français établis à l'étranger : il s'agit non seulement d'un titre d'identité, mais également du seul titre de voyage permettant de circuler en dehors de l'Union européenne. L'extension de ces dispositifs dérogatoires aux CNI est jugée par le Gouvernement incompatible avec le déploiement de l'identité numérique régalienne, qui s'appuie exclusivement sur la CNI électronique que nous ambitionnons de certifier au niveau de sécurité élevé – au sens de la réglementation européenne – dans le courant du second semestre 2023.

Or, pour garantir ce niveau de sécurité élevé – seul sujet faisant débat –, les services du ministère de l'intérieur et de l'outre-mer estiment indispensable de maintenir, à l'occasion du renouvellement de la CNI, les procédures suivantes lors du dépôt de la demande et de la remise du titre : une double comparution physique du demandeur, assortie d'une double vérification des empreintes digitales et d'une double vérification visuelle, par l'agent, de la correspondance entre la personne qui se présente et la photographie enregistrée dans le dossier. Prévenir les cas de fraude et d'usurpation d'identité constitue la motivation essentielle de ces services, ce que chacun peut comprendre.

À défaut de cette double comparution, la carte délivrée aux Français de l'étranger présenterait un niveau de sécurité dégradé – une carte d'identité de seconde zone, en quelque sorte. Non seulement elle les exposerait à un risque élevé de fraude et d'usurpation d'identité, mais elle les priverait des futurs usages de l'identité numérique régalienne, telles que les procurations en ligne pour les élections. Pour ces raisons et malgré votre demande, monsieur le député, il n'est pas envisagé pour l'instant d'étendre la dématérialisation au renouvellement des cartes nationales d'identité.

Mme la présidente. La parole est à M. Frédéric Petit.

M. Frédéric Petit. Cette réponse est malheureusement bien connue : c'est celle que j'entends depuis trois ans, monsieur le ministre délégué. Je rappelle au Gouvernement qu'un passeport justifie de l'identité d'un citoyen. Comment expliquer à mes concitoyens que l'agent du consulat qui leur a délivré leur passeport et l'a envoyé à leur domicile après une seule comparution ne peut faire la même chose pour la carte d'identité, au motif que celle-ci justifie de leur identité ? Le passeport en justifie également !

Quant à l'explication selon laquelle la carte d'identité serait moins utile qu'un passeport pour les Français établis à l'étranger, elle a été édictée par des fonctionnaires qui ne connaissent pas les réalités auxquelles ces derniers sont exposés. Je n'ai pas besoin d'un passeport pour circuler dans l'espace Schengen ; quand un enfant vivant à l'étranger revient dans l'Union européenne pour y passer ses vacances, il n'a pas non plus nécessairement besoin d'un passeport, mais il a besoin d'une carte d'identité. Je le maintiens : cette réponse est absurde.