16ème législature

Question N° 369
de Mme Marianne Maximi (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Puy-de-Dôme )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > eau et assainissement

Titre > Restrictions des usages de l'eau potable dans le Puy-de-Dôme

Question publiée au JO le : 06/06/2023
Réponse publiée au JO le : 14/06/2023 page : 5789

Texte de la question

Mme Marianne Maximi interroge M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur les restrictions des usages de l'eau potable dans le Puy-de-Dôme. Des villages où l'eau potable ne sort plus du robinet mais de camions-citernes. Cette scène ne se déroule pas dans un pays étranger mais bien en France, dans plusieurs départements y compris le sien, le Puy-de-Dôme. Depuis le mois de mars 2023, plusieurs communes sont ravitaillées ainsi, à l'image de ce que de nombreuses communes d'outre-mer subissent en permanence, elle tient à le souligner. Le Puy-de-Dôme et l'Auvergne ont longtemps été le château d'eau de la France, tant la pluviométrie et le relief y sont exceptionnels. Force est de constater que le château d'eau commence à être à sec. En raison de la sécheresse hivernale, les réserves d'eau sont extrêmement basses et les pluies récentes ne sont pas suffisantes pour combler ce déficit. Pour éviter une pénurie pendant l'été 2023 qui serait dangereuse et meurtrière, le préfet a décidé de restreindre les usages de l'eau potable dans plus de 40 communes. Ces mesures préventives, ce sont les habitants qui en paient le prix. Ce sont eux qui doivent renoncer à arroser leur potager, ce n'est pas anodin en ces temps d'inflation extrême. Ce sont eux qui doivent attendre la rotation du camion-citerne pour disposer d'eau. Et cela quand d'autres disposent de la ressource en eau en abondance. L'usine Volvic par exemple peut continuer à puiser dans la galerie du Goulet, pourtant à sec et ne doit réduire ses prélèvements que de 5 % malgré le risque de pénurie. Un comble quand on sait que la majeure partie de sa production est exportée bien loin de la France. Alors que l'eau va manquer toujours plus chaque année, les autorités organisent l'accaparement de l'eau par les intérêts industriels de grandes multinationales plutôt que garantir la disponibilité de la ressource en eau pour les citoyens. C'est la même logique à l'œuvre quand les pouvoirs publics défendent envers et contre tous les projets de méga-bassines. Dans le Puy-de-Dôme, on parle de pas moins de 21 bassines à l'étude, alors que l'eau manque déjà. Si on ne pose pas la question du partage équitable et durable de l'eau, on va droit vers la catastrophe écologique et sociale. C'est pourquoi elle lui demande s'il va impulser les concertations locales nécessaires pour organiser le partage équitable de l'eau en France.

Texte de la réponse

RÉSERVES D'EAU DANS LE PUY-DE-DÔME


Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Maximi, pour exposer sa question, n°  369, relative aux réserves d'eau dans le Puy-de-Dôme.

Mme Marianne Maximi. Des villages où l'eau potable ne sort plus du robinet, mais de camions-citernes : cette scène se déroule non pas dans un pays étranger, mais bien dans plusieurs départements français, dont le mien, le Puy-de-Dôme. Plusieurs communes sont ravitaillées ainsi depuis plusieurs mois, comme d'ailleurs de nombreuses communes d'outre-mer, qui subissent cette situation en permanence.

Le Puy-de-Dôme et l'Auvergne ont longtemps été considérés comme le château d'eau de la France. Pourtant, force est de constater que le château d'eau commence à être à sec, notamment en raison de la sécheresse hivernale et de l'insuffisance des pluies récentes, qui n'ont pas permis de remplir des réserves d'eau particulièrement basses. Pour éviter une pénurie dangereuse et meurtrière cet été, le préfet a donc décidé de restreindre les usages de l'eau dans plus de quarante communes. Or seuls les habitants paieront le prix de ces premières mesures préventives – d'autres seront probablement prises dans les mois à venir. Ils se trouveront par exemple contraints de renoncer à arroser leur potager, ce qui est loin d'être anodin dans le contexte actuel d'inflation, ou d'attendre la rotation du camion-citerne pour disposer d'eau, comme c'est notamment le cas dans les communes de l'est du Puy-de-Dôme.

Pendant ce temps, d'autres disposent abondamment de la ressource en eau, comme l'usine Volvic du groupe Danone, qui peut continuer à puiser et ne doit réduire ses prélèvements que de 5 % malgré le risque de pénurie : un comble, lorsque l'on sait qu'une grande partie de sa production est exportée bien loin de la France. Alors que le manque d'eau se fera chaque année plus pressant, les autorités organisent l'accaparement de cette ressource par de grandes multinationales qui défendent leurs intérêts industriels, plutôt que de garantir sa disponibilité pour tous. La même logique est d'ailleurs à l'œuvre quand les pouvoirs publics défendent, envers et contre tous, des projets de mégabassines. Pas moins de vingt et un projets, dont un constituerait la plus grande mégabassine de France, sont à l'étude dans le seul Puy-de-Dôme, où l'eau manque pourtant déjà.

Si nous ne posons pas la question du partage équitable et durable de l'eau, nous courons droit à la catastrophe écologique et sociale. Le Gouvernement entend-il engager une nécessaire concertation locale pour organiser un partage équitable de l'eau dans tous les départements de France ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement. Je connais bien le département du Puy-de-Dôme où, lorsque j'étais professeur de physique-chimie, en compagnie de mes collègues de sciences de la vie et de la terre, j'ai emmené régulièrement et avec plaisir des élèves faire des travaux de géologie et de sciences physiques. Or, s'il est vrai que ce département a malheureusement eu recours au citernage l'année dernière, ce n'est plus le cas depuis mars 2023, à la connaissance des services de l'État. Si certaines communes se trouvent toujours dans une telle nécessité, j'invite leur maire à se signaler auprès de l'Agence régionale de santé.

La gestion de l'eau est organisée par unité hydrologique et par bassin versant. Dans le secteur de Riom-Volvic au sujet duquel vous m'interrogez, les tensions constatées se limitent à la source d'eau potable dite du Goulet, qui n'alimente pas les points de prélèvements utilisés par la société des eaux de Volvic, situés sur un autre réseau hydrographique superficiel. L'arrêté de restriction ne visant que les usages de l'eau potable alimentée pour tout ou partie par la source du Goulet, il ne concerne pas directement la société des eaux de Volvic, à laquelle le préfet n'a demandé d'appliquer une réduction de 5 % de son autorisation mensuelle de prélèvement que pour des raisons de solidarité.

Mme Marianne Maximi. Ben voyons !

M. Olivier Klein, ministre délégué. Au-delà de la gestion des périodes de sécheresse, le travail engagé par l'État pour assurer la durabilité de la ressource du bassin de Volvic s'inscrit dans le temps long et traduit les ambitions du plan « eau », qui tend à impulser un effort de sobriété concernant l'ensemble des usages de l'eau, notamment ceux qu'en font les acteurs économiques. Le préfet du Puy-de-Dôme a ainsi engagé un travail structurel de réduction des prélèvements de la Société des eaux de Volvic, qui a débouché fin 2021 sur un nouvel arrêté diminuant l'autorisation de prélèvement de 10 % à partir de 2022 et de 20 % à partir de 2025.

Enfin, s'agissant des quatorze projets d'ouvrages de stockage d'eau pour l'agriculture, la ligne du Gouvernement est claire : il faut à la fois mener des efforts de sobriété et optimiser la disponibilité de la ressource, car il n'y aura pas d'agriculture sans eau. En revanche, ces ouvrages doivent être compatibles avec le maintien d'un bon état écologique des milieux et des autres usages de l'eau et doivent donc, à ce titre, être discutés de manière transparente et concertée dans les territoires. Soyez assurée, madame la députée, que nous sommes tous engagés pour préserver l'eau, indispensable à notre santé, à notre économie et à nos écosystèmes.

Mme la présidente. La parole est à Mme Marianne Maximi.

Mme Marianne Maximi. Je prends acte de vos annonces, mais nous attendons toujours des actes. L'inaction est d'autant plus problématique que l'accaparement de la ressource en eau tend à s'accentuer dans de nombreux départements. Il n'y aura pas d'agriculture sans eau, dites-vous : certes, mais de quelle agriculture parlez-vous ? Aucune réflexion n'est menée, ni au niveau national, ni au niveau local, sur les types d'agriculture qui conduisent à accaparer l'eau. C'est un enjeu majeur pour les habitants non seulement du Puy-de-Dôme, mais aussi de la France entière, en métropole comme en outre-mer.