16ème législature

Question N° 379
de Mme Brigitte Liso (Renaissance - Nord )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Citoyenneté
Ministère attributaire > Citoyenneté

Rubrique > sectes et sociétés secrètes

Titre > Lutte contre la promotion de pratiques sectaires dans les salons de bien-être

Question publiée au JO le : 06/06/2023
Réponse publiée au JO le : 14/06/2023 page : 5780

Texte de la question

Mme Brigitte Liso alerte Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté, sur l'exposition inédite dont bénéficient les offres pseudo-thérapeutiques porteuses de dérives sectaires dans certains salons dédiés au bien-être. Depuis plusieurs années, la promesse de remèdes miracles reposant sur des thérapies alternatives, supposées plus proches de la nature, fait florès dans le domaine de la santé et du développement personnel. L'engouement pour ces pratiques est réel, près de 4 Français sur 10 déclarant d'ores et déjà avoir recours aux médecines dites « alternatives ». Or il s'agit la plupart du temps de disciplines pseudoscientifiques ou pseudo-médicales, telles que la naturopathie, la kinésiologie, le reiki ou le néo-chamanisme. Autant de pratiques pour lesquelles il n'existe aucune formation reconnue par l'État ou l'Ordre des médecins et qui ne présentent pas d'effet positif scientifiquement avéré. Au-delà du risque de charlatanisme auquel s'exposent les clients, le glissement vers des dérives sectaires constitue un réel danger. La mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (MIVILUDES) a ainsi identifié la santé comme son principal objet de saisine, avec 744 des 4 020 saisines effectuées en 2021 portant sur ce thème. Le pseudo-thérapeute peut en effet se révéler être un véritable gourou thérapeutique, qui pousse ses victimes à abandonner leurs traitements conventionnels au profit de pratiques dangereuses pour leur santé. Parmi celles-ci, la prescription de comportements alimentaires extrêmes tels que le crudivorisme, la mono diète ou le jeûne intégral qui peut même s'avérer fatal. Basé à Lille, le centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire est un témoin privilégié de ces nouvelles formes d'emprise. Unique structure en France à prendre en charge les familles de victimes, il alerte régulièrement sur la multiplication des dérives thérapeutiques à caractère sectaire, qui constituent 27 % des signalements et demandes d'aide qu'il a été amené à traiter en 2021. Dans ce contexte, l'accès à des salons de portée nationale constitue une modalité inédite de légitimation pour ces nouveaux mouvements sectaires. Les exposants et conférenciers controversés sont en mesure d'y toucher un public plus large et d'autant moins méfiant que leur présence a été officiellement enregistrée dans la commune où se déroule l'événement. Cette situation appelant une vigilance particulière, elle lui demande quelles actions elle entend mettre en place pour mieux contrôler les participants aux salons de bien être, afin d'éviter que des pratiques à caractère sectaire puissent y être promues.

Texte de la réponse

PRATIQUES SECTAIRES DANS LES SALONS DE BIEN-ÊTRE


Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Liso, pour exposer sa question, n°  379, relative aux pratiques sectaires dans les salons de bien-être.

Mme Brigitte Liso. Les dérives sectaires nous exposent tous à un risque d'emprise, notamment dans les salons consacrés au bien-être, qui suscitent depuis plusieurs années un véritable engouement. Exposants et conférenciers y présentent des thérapies dites alternatives et des remèdes miracles, promettant un état de bien-être, voire une guérison rapide. Hélas, ces salons donnent surtout une visibilité à des gourous en thérapie qui exercent une véritable emprise sur leurs victimes, les menant parfois au décès. Comment un visiteur pourrait-il se méfier lorsqu'un conférencier, même controversé, jouit tranquillement d'une accréditation, ou lorsqu'un exposant a installé son stand sans être inquiété ?

Malheureusement, ces nouvelles formes d'emprise s'exercent aussi sur internet, où les plus jeunes sont exposés à la désinformation et aux contenus complotistes. Pourtant, des solutions existent. Je salue la mobilisation du Caffes – Centre national d'accompagnement familial face à l'emprise sectaire –, association lilloise, installée depuis des années en première ligne pour accompagner les familles des victimes d'emprise. Vendredi, le Caffes et l'Udaf – union départementale des associations familiales – ont présenté Boomering, mallette pédagogique d'outils innovants à l'usage des jeunes, afin de renforcer leur esprit critique face aux fake news et autres procédés complotistes.

La Miviludes – mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires – accomplit un travail considérable. Toutefois, le décideur doit également se montrer à la hauteur de l'enjeu. Les situations d'emprise se multiplient et changent de forme : leurs victimes sont de plus en plus jeunes. Face à ce phénomène, il nous faut redoubler de vigilance et faire preuve de fermeté. Nous le devons aux victimes et à leurs familles. Comment empêcher ces nouveaux gourous, qu'ils agissent physiquement ou avec des outils numériques, de s'en prendre à nos concitoyens ?

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.

M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer. Il s'agit d'un véritable sujet de société, qui nous amène à réfléchir à notre manière de vivre ensemble et au rôle des réseaux sociaux, des influenceurs et des gens, nombreux, qui parlent sans avoir rien à dire. Il faut surveiller la vogue des salons dédiés au bien-être, afin d'éviter qu'ils n'offrent une porte d'entrée aux mouvements sectaires. Moi qui suis vieux, je me demande qui aurait pensé il y a trente ans qu'on parlerait de salons « bien-être » et de dérives sectaires associées ! Le monde change.

Je vous remercie de l'avoir souligné, la Miviludes est vigilante. Elle accomplit un travail de fond, notamment avec les associations d'aide aux victimes. Lorsqu'on porte à sa connaissance un doute sérieux quant à la nature réelle d'une manifestation, elle prévient les ordres professionnels concernés et leur transmet les signalements. Peut-être n'est-ce pas suffisant.

En outre, la Miviludes met à disposition des organisateurs de salons une affiche d'information et de prévention ; elle se tient à leur disposition pour répondre à leurs interrogations. Elle mène des actions de sensibilisation auprès des collectivités territoriales et des élus locaux, notamment en partenariat avec l'Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité, qui participe pleinement à cette action. Enfin, dès lors que les salons ou colloques concernés ont un retentissement régional ou national, la Miviludes met en garde les préfectures et les accompagne, comme lors du récent quatrième congrès de médecine intégrative – j'ignore de quoi il s'agit –, qui s'est tenu les 3 et 4 juin à Mont-sous-Vaudrey, dans le Jura.

En effet, il appartient au préfet et aux agences régionales de santé d'engager les démarches de contrôle des exposants et des conférenciers qui participent aux salons de bien-être, afin de vérifier la bonne application de la réglementation en matière de santé, d'hygiène, de sécurité et de protection des consommateurs. Il est important que le ministre de l'intérieur et le ministre de la santé et de la prévention les sensibilisent à ce problème – dont nous n'avons pas fini de parler.

Mme la présidente. La parole est à Mme Brigitte Liso.

Mme Brigitte Liso. Nous sommes plusieurs pièces d'un même puzzle : nous devons absolument nous associer pour lutter contre ce phénomène. Je compte sur le soutien de mes collègues parlementaires pour que nous y prenions toute notre part.