FONCTION DE MAIRE
Mme la présidente. La parole est à M. Alexis Jolly, pour exposer sa question, n° 383, relative à la fonction de maire.
M. Alexis Jolly. La fonction de maire, véritable pilier de notre démocratie, se heurte à toutes les difficultés.
Les maires sont d'abord confrontés aux difficultés financières. Tandis que les dotations et autres concours publics diminuent, l'État impose unilatéralement des mesures qui impliquent pour les communes des hausses de charges de fonctionnement. Je pense notamment à la hausse du point d'indice : elle est nécessaire sur le plan social, mais les communes dont le budget est déjà serré auront du mal à en absorber le coût. S'ajoute l'augmentation des prix des denrées alimentaires, de l'électricité et du carburant, qui devient insoutenable. Tous les maires que je rencontre me le disent : la concomitance de l'explosion des charges et de la réduction des recettes rend la situation intenable à long terme ; les trésors d'ingéniosité déployés pour équilibrer les budgets ne suffiront bientôt plus.
Les difficultés de gestion vont croissant. Les communes ont de plus en plus mal à recruter des personnels formés et compétents, notamment dans les secteurs de l'animation et de la petite enfance, ainsi que dans les ressources humaines, où les postes sont transversaux, ou encore pour des postes de secrétariat ou de direction générale. Ce n'est pas un secret, la fonction publique territoriale manque d'attractivité et de visibilité, notamment pour les jeunes diplômés.
Je le constate à l'occasion de mes déplacements : faute d'être en mesure de pourvoir les postes vacants, les maires, souvent épaulés par un ou deux adjoints dévoués, sont fréquemment obligés d'accomplir les tâches normalement assignées aux agents publics, en sus de leur mission d'élu. Il en résulte une surcharge de travail insupportable, parfois même un profond découragement.
Enfin, les maires assument une responsabilité toujours plus écrasante. Le dévouement et l'engagement de ceux des plus petites communes doivent avoir pour corollaire une protection accrue de l'État, qu'il s'agisse de leur sécurité personnelle ou du régime de responsabilité civile et pénale qui encadre leur fonction.
Quelle est la position du Gouvernement en la matière ? Comment comptez-vous alléger la charge pratique et morale qui pèse toujours davantage sur les maires ?
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre délégué chargé des outre-mer.
M. Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des outre-mer. Le bloc communal a été très touché par la crise énergétique et par l'inflation. Aussi n'avons-nous pas diminué les dotations. J'insiste : vous ne pouvez pas affirmer que les dotations ont baissé. Au contraire, en 2022 et 2023, le Gouvernement a adopté des mesures inédites pour soutenir les collectivités territoriales : pour les plus petites, un bouclier tarifaire, étendu à toutes les collectivités situées outre-mer ; l'amortisseur d'électricité ; en 2023, l'augmentation de 320 millions d'euros de la dotation globale de fonctionnement, dont 90 % des communes ont bénéficié ; deux filets de sécurité ; la création du fonds Vert. Ce dernier était doté cette année de 2 milliards : il constitue une aide à l'investissement considérable ; en 2024, il sera reconduit, peut-être augmenté – en tant que ministre délégué aux outre-mer, je l'espère.
Il est vrai que la fonction publique territoriale connaît des difficultés d'attractivité et de fidélisation, comparables à celles de la fonction publique d'État. Les mesures récentes devraient améliorer la situation. Le Gouvernement prévoit d'autres dispositifs, comme la création d'une marque employeur visant à accroître sa visibilité, parfois moindre que celle des deux autres fonctions publiques. Il a également engagé un chantier transversal aux trois versants, consistant à fournir plusieurs instruments aux employeurs, notamment aux maires, afin de les aider à relever le défi de l'attractivité : assouplissement des conditions de recrutement et des quotas ; modification du déroulement de carrière ; outils en matière de rémunération.
Je suis particulièrement sensible aux conditions difficiles de l'exercice du mandat de maire. L'actualité est marquée par des violences inacceptables, d'où qu'elles viennent. En effet, elles ne sont pas nécessairement politiques, il peut s'agit de violences de voisinage. Il y a peu, un maire m'a écrit pour évoquer le « mal vivre ensemble », qui affecte la sécurité et la sérénité des édiles. Toutes les violences commises à l'encontre d'un élu de la République, quel qu'il soit, sont inadmissibles. Malheureusement, le ministre de l'intérieur et des outre-mer constate que de plus en plus d'élus doivent être protégés – ils le sont.
Plus concrètement, Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité, organisera dès septembre une grande concertation relative aux conditions d'exercice du mandat de maire. Le sujet est très vaste : il faut additionner les réponses, seulement partielles, pour que nos élus, qui soutiennent la République, puissent exercer plus sereinement leur mandat.