16ème législature

Question N° 401
de Mme Eva Sas (Écologiste - NUPES - Paris )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Logement
Ministère attributaire > Logement

Rubrique > logement

Titre > Situation du sans-abrisme

Question publiée au JO le : 21/11/2023
Réponse publiée au JO le : 29/11/2023 page : 10586

Texte de la question

Mme Eva Sas attire l'attention de M. le ministre délégué auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargé du logement, sur la situation préoccupante du sans-abrisme. M. Olivier Klein, son prédécesseur, confirmait en effet, en mai 2023, le lancement d'un observatoire du sans-abrisme, destiné à améliorer le recensement des personnes sans domicile, avec le concours de la Fondation Abbé-Pierre, du Secours catholique et de l'association Aurore. Cet observatoire est certes une bonne nouvelle mais il doit servir à l'action et en premier lieu l'ouverture de places d'hébergement d'urgence ; pourtant Mme la députée constate que le Gouvernement et la majorité relative ont refusé tous les amendements des Écologistes permettant de maintenir les moyens alloués à l'hébergement d'urgence, à l'exception des 6,7 millions pour finir l'année 2023 dans des conditions plus humaines On le sait, si on a de plus en plus dans les villes de sans-abri, cela est dû au nombre très insuffisant de logements pour les plus précaires dans le logement social, à des conditions d'accueil des migrants qui ne leur permettent pas de travailler, de se loger et de s'intégrer, à une prise en charge des troubles psychiatriques très dégradée en France, à l'errance des jeunes sortis de l'aide sociale à l'enfance, bref on laisse à eux-mêmes les personnes les plus vulnérables de la société. En Île-de-France, cette situation risque d'empirer à l'occasion des jeux Olympiques et Paralympiques. 75 associations se sont d'ailleurs réunies dans un collectif, « Le revers de la médaille » pour dénoncer les risques qui pèsent sur les sans-abris, les exilés, les étudiants et l'ensemble des personnes précarisées, du fait de l'organisation des jeux. 4 100 ressortissants étrangers auraient ainsi été déplacés de la Seine-Saint-Denis après le démantèlement de leur lieu de vie, selon les associations. Au début du mois d'octobre 2023, la préfecture de Police a tenté d'interdire les distributions alimentaires dans le nord de Paris ; une décision honteuse heureusement retoquée en justice. 2 200 logements Crous seront réquisitionnés pendant les jeux dans une des régions qui manque le plus de logements étudiants, suscitant les plus grandes inquiétudes. L'indemnisation prévue, 100 euros et deux places sur une épreuve, est insuffisante et ne saurait compenser la perturbation des conditions de vie et d'études conséquente à cette réquisition. La création de « sas d'accueil temporaires régionaux » permettant d'accueillir en régions les sans-abris d'Île-de-France où l'hébergement d'urgence est saturé et les places d'hôtel occupées pendant la période des jeux, nécessite un accompagnement et des conditions pérennes d'accueil sur les territoires qui ne sont pas aujourd'hui réunies, alors que les transferts ont déjà commencé. Encore une fois, derrière les promesses des ministres successifs, Mme la députée constate des actes au mieux vides, au pire contradictoires. L'infirmerie psychiatrique de la préfecture de police, qui a fait ses preuves, reçoit plus de 1 900 personnes par an. Mme la députée demande aux ministres de préciser quels sont les moyens qui lui sont alloués et de s'engager sur un renforcement de ces moyens. Les autorités publiques ne présentent aucun plan d'action et ne prévoient aucune concertation avec les acteurs associatifs et solidaires. Ce n'est pas acceptable pour Mme la députée qui demande que les associations en charge des plus précaires soient intégrées au comité de pilotage en vue de la préparation des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 afin d'assurer la continuité de la prise en charge des personnes précaires et que l'héritage des jeux soit aussi social et en particulier en faveur des plus exclus. Elle demande enfin quand le Gouvernement prendra la question du sans-abrisme au sérieux et mènera une politique ambitieuse pour assurer le droit au logement.

Texte de la réponse

PERSONNES SANS-ABRI


M. le président. La parole est à Mme Eva Sas, pour exposer sa question, n°  401, relative aux personnes sans-abri.

Mme Eva Sas. Je souhaiterais soulever la question du sans-abrisme et plus largement celle du mal-logement en France. Il est nécessaire de consacrer plus de moyens à l'hébergement d'urgence, mais surtout à la politique du « logement d'abord », qui est la seule réponse durable au sans-abrisme.

Je pourrais vous parler de Mario ou de Mickaël, qui dorment dans la rue dans mon quartier et qui n'ont plus d'espoir d'avoir un hébergement d'urgence, puisque les places sont, du fait de la pénurie, réservées aux enfants, aux femmes et aux familles. Je pourrai vous parler de Zekerya, un petit garçon de 3 ans scolarisé à l'école maternelle Traversière et qui, le soir, dort sous une tente avec sa petite sœur de 6 mois et ses parents.

La rue est le réceptacle des échecs de toutes nos politiques publiques, telles que l'accueil des migrants ou la prise en charge des troubles psychiatriques, qui est très dégradée, comme elle est le lieu de l'errance des jeunes sortis de l'aide sociale à l'enfance. Bref, vous laissez à elles-mêmes les personnes les plus vulnérables de la société.

En Île-de-France, cette situation risque d'empirer à l'occasion des Jeux olympiques. Au reste, soixante-quinze associations se sont réunies dans un collectif nommé Le Revers de la médaille pour dénoncer les risques qui pèsent sur les sans-abri, les exilés, les étudiants et l'ensemble des personnes précarisées, du fait de l'organisation des Jeux.

Vous avez notamment créé des « sas d'accueil temporaires régionaux » pour accueillir dans différentes régions les sans-abri d'Île-de-France où l'hébergement d'urgence est saturé et où les places d'hôtel seront occupées pendant la période des Jeux. Cela pourrait être l'occasion d'un nouveau départ pour les personnes en situation de précarité, malheureusement les conditions d'accompagnement et d'accueil sont très insuffisantes, alors que les transferts ont déjà commencé.

Dès lors, je vous poserai trois questions, madame la ministre déléguée.

D'abord, quel sera le nombre de places en pension de famille et de logements sociaux très accessibles créés en 2024, pour que le « logement d'abord » ne soit pas seulement un slogan ? Ensuite, quel est le bilan des sas régionaux ? Enfin, comment assurer la continuité de la prise en charge par les associations des personnes sans-abri pendant la période des Jeux olympiques ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

Mme Dominique Faure, ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité. La prise en charge des publics sans-abri fait l’objet d’une politique gouvernementale ambitieuse et particulièrement volontariste, qui repose sur le plan « logement d’abord », que vous avez cité, et sur la mise à l’abri dans le parc d’hébergement d’urgence pour répondre aux situations d’urgence et de détresse.

Le plan « logement d'abord » a permis d’engager une transformation du modèle d’action publique pour lutter contre le sans-abrisme et pour favoriser l'accès et le maintien dans le logement en prévenant les expulsions. Cette transformation s’est traduite par des résultats reconnus par l’ensemble des acteurs : plus de 440 000 personnes sans domicile ont accédé au logement depuis 2018.

Malgré ces efforts colossaux, la tension reste forte dans de nombreux territoires, comme vous l'avez dit, madame la députée. C'est pourquoi le Gouvernement a décidé de maintenir le parc d'hébergement d'urgence à un niveau élevé : 203 000 places en 2024.

En ce qui concerne les opérations de mise à l’abri en Île-de-France, dans un contexte de forte saturation des dispositifs d’hébergement locaux, des personnes se voient proposer, sur la base du volontariat, une orientation vers des sas d’accueil temporaire régionaux. Une fois mises à l'abri, les personnes volontaires bénéficient d’une évaluation de leur situation administrative et d’un accompagnement social et sanitaire. Selon leur situation, elles pourront déposer une demande d’asile ou poursuivre leur demande si celle-ci a déjà été déposée. Elles pourront également solliciter un examen ou un réexamen de leur situation.

Le Gouvernement reste pleinement mobilisé pour les plus vulnérables, comme en témoignent les récentes annonces du pacte des solidarités et les moyens considérables alloués à la veille sociale.

M. le président. La parole est à Mme Eva Sas.

Mme Eva Sas. J'ai bien entendu votre réponse. Néanmoins, sachez que nous serons vigilants quant à la prise en charge des personnes sans-abri pendant la période des Jeux olympiques. Les associations attendent notamment la communication des périmètres de sécurité, pour savoir comment elles pourront intervenir pour mieux prendre en charge, pendant la période des Jeux, les personnes sans-abri et les exilés.

Elles attendent également le bilan de l'instauration des sas régionaux. Actuellement, les personnes sans-abri et les exilés sont déplacés pendant trois semaines en région, après quoi elles reviennent à Paris. Ce dispositif n'est pas du tout satisfaisant car il ne constitue pas une situation pérenne. Nous attendons donc que le Gouvernement présente un bilan plus précis sur la prise en charge des personnes sans-abri.