16ème législature

Question N° 4039
de M. Philippe Guillemard (Renaissance - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Écologie
Ministère attributaire > Écologie

Rubrique > mer et littoral

Titre > Le manque de protection dans les aires marines protégées

Question publiée au JO le : 13/12/2022 page : 6150
Réponse publiée au JO le : 07/02/2023 page : 1123

Texte de la question

M. Philippe Guillemard interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur le manque de protection dans les aires marines protégées. La France a fait vœu d'une politique ambitieuse en matière de biodiversité dans la mesure où elle souhaite doter un tiers de son espace terrestre et maritime d'un statut de protection, dont un tiers, à nouveau, en protection forte. Cette catégorie concerne notamment les parcs nationaux et les réserves naturelles en mer ou en forêt. Pour ces sanctuaires naturels qui bénéficient du plus haut niveau d'exigence de la réglementation, ils seront notamment protégés des extractions diverses ou encore de la pêche industrielle. M. le député interpelle néanmoins Mme la ministre quant au décret du 12 avril 2022 censé mettre en œuvre la stratégie nationale biodiversité 2030 en précisant le cadre de cette protection forte voulue par le Gouvernement. En effet, le texte ne semble pas remplir ses objectifs puisqu'il n'évoque pas une restriction totale de toute activité dans ces zones qui devraient être préservées strictement. Le décret définit ces dernières comme des zones géographiques dans lesquelles les pressions engendrées par les activités humaines susceptibles de compromettre la conservation des enjeux écologiques sont « absentes, évitées, supprimées ou fortement limitées ». Le mot « limitées » et non « interdites » porte à confusion. « Une réglementation adaptée associée à un contrôle effectif » est censée garantir la pérennité de ce statut obtenu ou, au contraire, retiré. Mais cette analyse au cas par cas, trop souple et finalement peu contraignante, s'illustre par le fait que seulement 1,6 % du domaine maritime français bénéficie de mesures solides pour préserver la diversité marine, contrairement aux 30 % envisagés. À ceci, on peut rajouter qu'il ne s'agit en réalité que de 0,3 %, le reste des aires maritimes protégées se trouvant dans les outre-mer et les terres australes et antarctiques françaises. À l'heure où la COP15 démarre à Toronto, il souhaite l'interroger sur l'importance d'une protection par la France de ses aires maritimes protégées plus stricte, plus contraignante, sans équivoque et surtout, dénuée de toute ambiguïté.

Texte de la réponse

La Stratégie nationale pour les aires protégées 2030 (SNAP) présente des objectifs quantitatifs de développement du réseau, reposant notamment sur deux cibles (couverture de 30 % du territoire national en aires protégées, dont un tiers sous protection forte), mais aussi qualitatifs (amélioration des outils de gestion, pérennisation des financements, etc.). Le territoire national (terre et mer) est aujourd'hui couvert à 33,4 % par des aires protégées, et à 4,2 % par de la protection forte. Si la contribution de l'outremer en matière de protection forte du milieu marin est en effet majoritaire, cela est le résultat de la part majeure que représentent ces territoires au sein de l'espace maritime français (plus de 90 %). La protection forte est une approche de labellisation, visant à rendre compte d'un niveau de protection exigeant. La protection forte se distingue de la protection stricte dans le sens où elle vise à concilier les activités humaines compatibles avec les objectifs de protection. Le décret n° 2022-527 du 12 avril 2022 définit la notion de protection forte et ses modalités de mise en œuvre. Concernant les espaces maritimes, différentes modalités de reconnaissance sont prévues. Ainsi, certaines catégories d'aires marines protégées particulièrement protectrices sont reconnues par nature comme zones de protection forte (comme par exemple des zones de protection renforcée des réserves naturelles nationales). En dehors de ce cas, tout espace peut faire l'objet d'une reconnaissance en protection forte, sous réserve d'analyse au cas par cas du respect des critères cumulatifs de l'article 4 du décret.  L'approche retenue est alors celle d'une démarche basée sur les meilleures connaissances scientifiques disponibles, permettant d'apprécier au cas par cas le niveau de protection effectivement apporté en fonction de la nature des activités présentes et de la sensibilité aux pressions qu'elles exercent des enjeux écologiques faisant l'objet de la protection. À l'issue de ces analyses, à l'aide de la meilleure connaissance disponible, seules les activités ne générant pas de pression significative pourront être envisagées et, le cas échéant, maintenues dans zones candidates à la reconnaissance en protection forte. Les autres devront être encadrées voire interdites. À défaut, le label ne pourra être attribué. Une instruction aux services de l'État est en cours de préparation pour préciser les modalités d'application du décret, notamment l'analyse des pressions exercées par les activités humaines qui seraient jugées compatibles avec les enjeux écologiques protégés.