16ème législature

Question N° 4073
de M. Loïc Prud'homme (La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale - Gironde )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Transition écologique et cohésion des territoires

Rubrique > produits dangereux

Titre > Révision de la réglementation REACh

Question publiée au JO le : 13/12/2022 page : 6159
Réponse publiée au JO le : 17/01/2023 page : 510
Date de changement d'attribution: 20/12/2022

Texte de la question

M. Loïc Prud'homme alerte M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la révision en cours de la réglementation cadre sur les substances chimiques : REACh (Registration, evaluation, authorization and restriction of chemicals) Cette réglementation en vigueur depuis 2007 a montré de nombreuses failles et n'a pas rempli jusqu'à maintenant ses objectifs de protection de la santé humaine et de l'environnement. La révision actuelle doit rectifier le tir et permettre d'avoir un contrôle plus strict et efficace des dossiers d'enregistrement, de rendre le processus d'évaluation des substances moins long, de mieux identifier les substances dangereuses, d'intégrer enfin la notion d'effet cocktail et de limiter considérablement l'exposition aux substances identifiées comme dangereuses. Cependant, cette révision indispensable est mise en danger par l'action des lobbies qui n'ont d'intérêts que dans le rendement économique et voient d'un mauvais œil la protection de la santé publique et de l'environnement. Ils tentent de la faire repousser à 2024 pour continuer d'empoisonner en toute impunité. La Commission européenne semble reculer face à ces lobbies, tout comme le gouvernement français. Pourtant, près de 40 % des Européens sont confrontés à des cancers en partie causés par l'exposition aux polluants chimiques. Cela représente un coût de 157 et 270 milliards d'euros en matière de dépenses de santé et de perte de revenus potentiels chaque année pour les États membres. Il n'est plus temps de ménager les intérêts financiers des multinationales de l'agrochimie. Il lui demande s'il compte prendre toutes les mesures pour faire adopter au plus vite la révision de la réglementation REACh.

Texte de la réponse

REACH est l'acronyme utilisé pour désigner le règlement concernant l'enregistrement, l'évaluation et l'autorisation des substances chimiques, ainsi que les restrictions applicables à ces substances (en anglais : Registration, Evaluation, Authorisation and Restriction of Chemicals). Le règlement REACH est un règlement clé sur les produits chimiques entré en vigueur en 2006 pour mieux protéger la santé humaine et l'environnement contre les risques liés aux substances chimiques, tout en favorisant la compétitivité de l'industrie chimique de l'Union européenne. ll a été créé pour réguler de manière uniforme en Europe les substances dangereuses, en instaurant des procédures d'autorisation et de restriction) : celles qui sont utilisées, non seulement dans les processus industriels, mais aussi dans notre vie quotidienne, par exemple dans les produits de nettoyage, les peintures ainsi que dans des articles tels que les vêtements, les meubles et les appareils électriques. Après plus de 15 ans d'application du règlement REACH, le retour d'expérience fait apparaître des points d'amélioration souhaitables pour le disposition. Par exemple, il subsiste des incohérences entre les décisions prises pour une même substance, car les méthodes d'évaluation diffèrent entre les différentes réglementations sectorielles. Une même substance peut ainsi être interdite dans la réglementation sur les pesticides, mais n'est pas régulée dans les jouets ou les couches pour bébé. Deux cent vingt-trois substances sont ainsi identifiées comme extrêmement préoccupantes au niveau européen mais seulement cinquante-neuf sont interdites. Les études de biosurveillance (notamment celles de Santé publique France), qui appellent l'attention les Français aujourd'hui, mettent en évidence l'imprégnation de la population européenne par des substances chimiques néfastes, telles que les PFAS ou les phtalates qui ont des propriétés toxiques pour l'homme et les écosystèmes. Or, les mécanismes d'évaluation prennent énormément de temps ; des substances dangereuses peuvent ainsi être présentes dans des objets du quotidien, comme les bisphénols, dont seul le bisphénol A est régulé, alors que les autres sont autorisées. A contrario, le processus actuel conduit par ailleurs à ce que des industriels déposent des centaines de dossiers de demandes de dérogations pour des substances interdites, alors que, pour des usages essentiels, il n'y a aucun doute sur le fait qu'elles seront autorisées, moyennant des précautions d'usage « standard ».  Il y a donc urgence à adapter la règlementation sur les substances chimiques et la révision de REACH. C'est le sens de la démarche que pousse le Gouvernement français au niveau européen. Cette révision devra permettre d'accélérer la sortie du marché des substances les plus dangereuses en les interdisant dans les produits de consommation courante, sauf pour des usages essentiels pour la société, qui sont en cours de définition au niveau européen (et pourraient tenir compte des enjeux sociétaux ainsi que ceux d'indépendance et d'autonomie stratégique). La révision devra également permettre de résoudre le problème de manque de données sur les substances qui sont aujourd'hui sur le marché européen. Concrètement, avec la révision du règlement REACH il sera possible de demander plus systématiquement aux industriels de tester si leurs produits ont des propriétés de perturbation endocrinienne, ce qui est une demande de longue date de la France.