Question écrite n° 4128 :
Mise en place d'un plan national de lutte contre le frelon asiatique

16e Législature

Question de : Mme Emmanuelle Ménard
Hérault (6e circonscription) - Non inscrit

Mme Emmanuelle Ménard alerte M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur l'urgence de définir une stratégie nationale de lutte contre la prolifération du frelon asiatique. Découvert en France en 2004, le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax) est classé dans la liste des dangers sanitaires de deuxième catégorie pour l'abeille domestique (Apis mellifera) sur tout le territoire français depuis l'arrêté du 26 décembre 2012 relatif au classement dans la liste des dangers sanitaires du frelon asiatique. Ce classement implique que l'élaboration et le déploiement d'une stratégie nationale de prévention, de surveillance et de lutte contre ce danger sanitaire est de la responsabilité de la filière apicole, l'État pouvant apporter son appui sur le plan réglementaire. Cet insecte est pourtant un fléau pour l'apiculture et pour la biodiversité. Quelques individus peuvent décimer un rûcher complet en quelques jours et la filière apicole s'inquiète des très nombreuses pertes de colonies d'abeilles. L'arrêté ministériel du 14 février 2018 relatif à la prévention de l'introduction et de la propagation des espèces animales exotiques envahissantes sur le territoire métropolitain inscrit le frelon asiatique comme espèce réglementée au titre de l'article L. 411-6 du code de l'environnement. Il abroge l'arrêté du 22 janvier 2013 qui interdisait l'introduction volontaire du frelon asiatique sur le territoire national et renforce de fait la réglementation afférente à cette espèce. Or aucune politique coordonnée et efficace n'a été décidée contre cette menace. Si l'article L. 411-8 du code de l'environnement permet au préfet de faire procéder à la capture, au prélèvement ou à la destruction des espèces exotiques envahissantes, de telles opérations sont conseillées sans être obligatoires. En outre, la destruction d'un nid a un coût non négligeable pour les particuliers et l'absence d'indemnisation financière les dissuade souvent d'agir. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation 2021-2026 préconise la seule surveillance accrue de la colonisation du territoire par le frelon asiatique sans proposer de solutions concrètes pour lutter contre sa propagation. C'est pourquoi elle lui demande les mesures qu'il entend mettre en place pour lutter efficacement contre le frelon asiatique et protéger les abeilles et les apiculteurs français.

Réponse publiée le 17 janvier 2023

La lutte contre le frelon asiatique (Vespa velutina nigrithorax), espèce ayant connu une expansion rapide dès son introduction accidentelle en Aquitaine en 2004, est encadrée par un corpus législatif et réglementaire complet et détaillé ci-après. Le plan national en faveur des insectes pollinisateurs et de la pollinisation qui a été lancé conjointement par les ministères de la transition écologique et de l'agriculture en novembre 2021 est de nature à soutenir une bonne application des moyens de lutte (action 4.4.4 du plan, disponible ici : https://agriculture.gouv.fr/plan-national-en-faveur-des-insectes-pollinisateurs-et-de-la-pollinisation-2021-2026-DP). Depuis fin avril 2021, une seule réglementation concourt à la lutte contre cette espèce : celle portant sur les espèces exotiques envahissantes (EEE) pilotée par le ministère de la transition écologique et de la cohésion des territoires (MTECT). Celle portant sur les organismes de quarantaine, pilotée par le ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire (MASA), a exclu le frelon asiatique au regard de la nouvelle législation européenne dite "loi de santé animale » (Cf ci-après). Concernant la réglementation spécifique sur les EEE, la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages a complété le code de l'environnement pour intégrer des dispositions législatives permettant d'agir contre les EEE (articles L. 411-5 et suivants). Au regard de l'intérêt de préservation du patrimoine biologique, des milieux naturels et des usages associés, l'article L.411-6 de du code de l'environnement interdit sur le territoire national, l'introduction, la détention, le transport, le colportage, l'utilisation, l'échange, la vente ou l'achat de tout spécimen vivant d'EEE, dont la liste est fixée par l'arrêté interministériel du 14 février 2018. Le frelon asiatique est inscrit sur cette liste. Les opérations de lutte sont définies à l'article L.411-8 du code de l'environnement. Ainsi, dès constat de la présence dans le milieu d'une EEE, le préfet de département peut « procéder ou faire procéder (…) à la capture, au prélèvement, à la garde ou à la destruction de spécimens » d'EEE. Un arrêté préfectoral précise alors les conditions de réalisation de ces opérations. Les préfets peuvent notamment ordonner la destruction de nids sur des propriétés privées. Le financement des opérations de lutte contre le frelon n'est pas pris en charge par l'État, au regard du degré très large d'envahissement du territoire métropolitain par l'espèce. La destruction des nids reste à la charge des particuliers et ses coûts peuvent être, le cas échéant, pris en charge en tout ou partie par des financements locaux émanant de collectivités territoriales Parallèlement, la direction générale de l'alimentation du MASA accompagne financièrement l'Institut technique et scientifique de l'apiculture et de la pollinisation (ITSAP – Institut de l'Abeille) et le MNHN (Muséum national d'Histoire naturelle) pour leurs actions techniques et scientifiques relatives à l'identification et à la validation des outils de lutte contre le frelon asiatique. Les actions financées comportent deux volets : une méthode concernant le piégeage des fondatrices au printemps et le développement d'un protocole pour la destruction de nids par appâts empoisonnés. Le premier volet des travaux concernant le piégeage est arrivé à son terme et a montré que le nombre de nids du frelon asiatique décroît significativement lorsque la méthode est conduite durant plusieurs printemps successifs, avec un maillage spatial fin et régulier (plus de 200 pièges répartis de façon homogène sur environ 10 km2 autour d'un rucher à protéger). Un complément d'étude est envisagé sur 2023, afin d'approfondir les résultats. Le second volet vise à vérifier l'efficacité d'appâts empoisonnés et leurs impacts sur l'environnement. Dans le cas où la méthode se montrerait efficace, il reviendra à la filière et/ou à un industriel de réaliser les démarches d'obtention des autorisations « substances biocides », puis « produits ». Ce projet devrait également permettre de proposer une méthode alternative au fipronil (hautement toxique) utilisé sans autorisation pour lutter contre les frelons. Enfin, il est à noter que le frelon asiatique n'est pas réglementé par le ministère de la santé et des solidarités au titre des espèces nuisibles pour la santé humaine car il s'avère, au regard des données des centres anti-poisons, que l'espèce ne présente pas de danger supérieur par rapport d'autres hyménoptères (frelon européen, guêpes, etc). Si cette situation venait à changer du fait de l'extension de l'espèce, la question de sa réglementation serait à réexaminer.

Données clés

Auteur : Mme Emmanuelle Ménard

Type de question : Question écrite

Rubrique : Animaux

Ministère interrogé : Agriculture et souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Écologie

Dates :
Question publiée le 20 décembre 2022
Réponse publiée le 17 janvier 2023

partager