ASSURANCE DES PROFESSIONNELS DE SANTÉ
M. le président. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour exposer sa question, n° 420, relative à l'assurance des professionnels de santé.
Mme Patricia Lemoine. Madame la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé, je souhaite vous interroger sur les conséquences du développement de la téléconsultation sur la prime de responsabilité des professionnels de santé. Depuis plusieurs années, le recours à la téléconsultation est encouragé par les pouvoirs publics en tant que réponse à la désertification médicale qui frappe notre pays.
Les modalités de consultation à distance ont été assouplies par décret dès 2018 et de nombreuses collectivités ont investi dans des cabines de téléconsultation – c'est le cas dans ma circonscription en Seine-et-Marne. La crise sanitaire a accentué cette dynamique en démocratisant la pratique pour un grand nombre de Français et de généralistes.
Cependant, le développement de la téléconsultation ne doit pas se faire au détriment de la situation économique des médecins. Dans mon département de Seine-et-Marne, l'un des plus sous-dotés de France métropolitaine en médecins généralistes, de premiers effets néfastes sont déjà observés sur leurs cotisations d'assurance. Les assureurs ont en effet relevé leur prime de responsabilité civile en mentionnant explicitement l'aggravation de la sinistralité entraînée par l'exercice en téléconsultation. D'après des études menées par le secteur assurantiel, les rendez-vous à distance présenteraient des risques accrus de mise en cause du praticien, nécessitant l'intervention de l'assureur.
Parmi les motifs de litiges les plus réguliers figurent la sous-évaluation de la gravité de l'état de santé du patient à distance et la prescription de traitements inappropriés. Alors qu'il s'agissait d'améliorer l'offre de soins, le relèvement des primes risque de fragiliser les professionnels qui s'engagent dans les téléconsultations en aggravant leurs charges. Ce problème est-il identifié par votre ministère et, le cas échéant, des mesures sont-elles envisagées pour éviter que la téléconsultation ne dégrade la prime d'assurance des médecins ?
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Nous partageons la volonté de tout mettre en œuvre pour favoriser l'accès aux soins à nos concitoyens. Nous avions d'ailleurs soutenu ensemble plusieurs initiatives en ce sens lors du précédent quinquennat. La téléconsultation fait partie des leviers qu'il nous faut mobiliser, tout en veillant à l'encadrement et à la régulation de son déploiement. Vous m'interrogez sur les pratiques de certains assureurs dans votre circonscription et sur l'augmentation des primes de responsabilité civile des médecins réalisant une partie de leur activité en téléconsultation. Votre question recouvre une interrogation plus large, celle de l'encadrement de cette pratique utile et nécessaire pour favoriser l'accès aux soins et de la lutte contre d'éventuelles dérives.
Tout d'abord, la téléconsultation n'est pas censée représenter un risque plus important qu'une consultation en présentiel. Elle est en effet conçue comme une pratique alternative et complémentaire, et ne peut constituer plus de 20 % du volume d'activité du médecin. Le recours à la téléconsultation relève, en outre, de la seule décision du médecin traitant ou correspondant, qui juge de la pertinence d'une prise en charge médicale à distance plutôt qu'en face-à-face. La téléconsultation est donc impossible pour toute consultation complexe ou toute pathologie ne permettant pas un suivi à distance.
En outre, afin de mieux structurer l'offre de téléconsultation au profit des patients, la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2023 a renforcé l'encadrement des sociétés de téléconsultation par une procédure d'agrément, dont les textes d'application seront publiés d'ici la fin de l'année. Il s'agit d'éviter toute dérive préjudiciable aux patients et de garantir la qualité des soins dans le respect des exigences de déontologie et d'éthique.
D'après mes services, nous n'avons pas de remontées faisant état de difficultés particulières en lien avec la responsabilité civile médicale. Quant aux cas précis que vous évoquez, je propose que nous y travaillions ensemble.
M. le président. La parole est à Mme Patricia Lemoine.
Mme Patricia Lemoine. Je vous remercie pour cette réponse. Je partage en tout point votre analyse et votre diagnostic. Comme vous m'y invitez, je vous transmettrai les informations relatives aux cas concrets dont j'ai eu connaissance, afin que vos services puissent les analyser.