16ème législature

Question N° 4454
de M. Philippe Guillemard (Renaissance - Meurthe-et-Moselle )
Question écrite
Ministère interrogé > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique
Ministère attributaire > Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Rubrique > marchés publics

Titre > Avancées en matière de réciprocité d'accès aux marchés publics

Question publiée au JO le : 27/12/2022 page : 6603
Réponse publiée au JO le : 13/06/2023 page : 5343
Date de signalement: 07/03/2023

Texte de la question

M. Philippe Guillemard interroge M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur les avancées réalisées et celles à venir dans le cadre des négociations européennes en matière de réciprocité d'accès aux marchés publics engagés lors de la présidence française de l'Union européenne. Préoccupation majeure des industriels français, l'état actuel du droit prévoit à l'article L. 2153-1 du code de la commande publique que l'acheteur public garantit aux opérateurs économiques un égal accès aux marchés publics. Cependant, le droit français n'est pas l'exemple suivi à l'étranger puisque de nombreux pays refusent à certaines entreprises françaises le droit de candidater à leurs appels d'offre. De fait, cette situation crée une asymétrie qui tend à accentuer une forme de concurrence déloyale dans la mesure ou les prestataires étrangers ne sont en rien empêchés de soumettre leur candidature à un appel d'offres en France, ce qui crée des mesures de dumping. Cette situation interpelle d'autant plus M. le député puisqu'il a pu visiter récemment les installations de l'entreprise Saint-Gobain PAM, véritable fleuron de l'industrie française basé dans son département et qui fait face à ces problèmes dans le développement de ses activités à l'étranger. Ce déséquilibre juridique prend une dimension importante en ce qu'elle touche à des secteurs stratégiques particulièrement impactés et impactants dans la crise que l'on traverse actuellement. C'est notamment le cas des activités liées à l'eau, l'énergie ou encore les transports. L'adoption d'un instrument visant à diffuser des bonnes pratiques et ainsi poursuivre l'ouverture aux entreprises françaises de possibilités nouvelles de soumettre des candidatures dans le cadre d'appels d'offres à l'étranger est un premier pas encourageant. Si ce guide répond à de nombreuses interrogations auxquelles pourraient faire face les industriels, M. le député appelle à des évolutions à moyen et long terme, en matière de négociations notamment, pour permettre à la France de continuer à exporter des savoir-faire et contribuer à son rayonnement dans le domaine industriel à échelle européenne et plus généralement à échelle mondiale. Il souhaite donc connaître dans quelle mesure le Gouvernement entend généraliser le guide des bonnes pratiques en matière de marchés publics de fourniture dans les industries de réseaux et, outre cette généralisation, comment la France entend à peser aux côtés de ses partenaires européens pour garantir une concurrence saine quant à l'attribution de marchés publics.

Texte de la réponse

L'Union européenne (UE) est le marché le plus ouvert au monde ; pourtant, certains États tiers, tout en profitant de l'accès au marché européen, ferment aux entreprises européennes l'accès à leurs propres marchés. Conscient de ces difficultés, le Gouvernement est particulièrement attentif à une réciprocité plus effective en matière de commande publique. L'UE, que ce soit par l'accord sur les marchés publics (AMP), conclu dans le cadre de l'organisation mondiale du commerce (OMC), ou d'autres accords bilatéraux, s'est engagée à accorder aux travaux, aux fournitures et aux services des États signataires, ainsi qu'à leurs opérateurs économiques, un traitement non moins favorable que celui accordé aux opérateurs économiques, aux travaux, aux fournitures et aux services européens (engagements repris aux articles 25 et 43 des directives 2014/24/UE et 2014/25/UE du 26 février 2014). L'article L. 2153-1 du code de la commande publique (CCP) transpose ces dispositions et prévoit, a contrario, la possibilité pour l'acheteur de limiter ou même d'exclure les opérateurs ou les travaux, fournitures ou services issus d'États tiers à l'UE qui ne sont pas liés à celle-ci par des accords internationaux en matière de marchés publics. S'agissant plus particulièrement des « secteurs spéciaux » (eau, énergie, transports et secteurs postaux), l'article L. 2153-2 du CCP, qui transpose le mécanisme de préférence prévu à l'article 85 de la directive 2014/25/UE précitée, permet aux entités adjudicatrices, lors de l'attribution d'un marché de fournitures, de rejeter les offres majoritairement composées de produits originaires des pays tiers avec lesquels l'Union européenne n'a pas conclu d'accord assurant un accès comparable et effectif des entreprises de l'Union européenne aux marchés publics de ces pays. Afin d'accompagner les entités adjudicatrices, un guide des marchés publics de fournitures dans les industries de réseau a été publié en 2021 définissant les modalités pratiques de ce dispositif d'exclusion. Par ailleurs, l'UE vient de se doter, pendant la présidence française, d'un nouvel instrument de politique commerciale visant à garantir aux entreprises de l'UE un accès et des conditions de concurrence équitables au sein des marchés publics de pays tiers, favorisant ainsi une plus grande réciprocité dans l'ouverture des marchés publics. Issu d'un long processus législatif débuté en 2012, le règlement (UE) 2022/1031 du Parlement européen et du Conseil du 23 juin 2022 relatif aux marchés publics internationaux (dit « règlement IPI »), entré en vigueur le 29 août 2022, permet, au cas par cas, de restreindre l'accès à la commande publique européenne aux opérateurs venus d'États tiers (hors accord avec l'Union européenne) appliquant eux-mêmes des mesures restrictives ou discriminatoires à l'égard des entreprises européennes. De la même manière, le règlement (UE) 2022/2560 du 14 décembre 2022 relatif aux subventions étrangères faussant le marché intérieur et dont les dispositions ont été négociées sous la présidence française, permet désormais de contrôler et sanctionner les subventions étrangères qui influencent des décisions d'investissement, facilitent l'acquisition d'entreprises européennes (concentrations) et permettent de présenter des offres indûment avantageuses dans les procédures d'attribution des contrats de la commande publique. De nombreuses initiatives ont donc récemment été prises afin d'assurer l'autonomie stratégique de l'Union et des États-membres. Par ailleurs, les discussions européennes sur le sujet de la réciprocité sont toujours en cours et révèlent une volonté nette de la part de nombreux États membres, y compris la France, d'aller encore plus loin dans la recherche d'une plus grande réciprocité dans l'ouverture des marchés.