16ème législature

Question N° 450
de Mme Josiane Corneloup (Les Républicains - Saône-et-Loire )
Question orale sans débat
Ministère interrogé > Santé et prévention
Ministère attributaire > Santé et prévention

Rubrique > dépendance

Titre > Prise en charge à domicile et statut des aidants familiaux

Question publiée au JO le : 05/12/2023
Réponse publiée au JO le : 13/12/2023 page : 11243

Texte de la question

Mme Josiane Corneloup interroge M. le ministre de la santé et de la prévention à propos du plan d'action nécessaire à la prise en charge à domicile des compatriotes en perte d'autonomie qui sont plus de 80 % à vouloir vieillir chez eux. Aujourd'hui, de nombreux services d'aide à domicile, associatifs et privés, sont dans l'obligation de réduire leurs interventions auprès des patients faute de personnel. La crise sanitaire a réaffirmé combien les métiers du secteur d'aide à la personne sont essentiels et constituent un enjeu de société majeur eu égard à l'augmentation de l'espérance de vie. Afin que les 300 000 emplois à pourvoir d'ici 2030 trouvent preneurs, la formation à ces métiers est essentielle pour offrir une qualification valorisée et des évolutions de carrière qui font défaut aujourd'hui. Une reconnaissance salariale et sociale conférant un véritable statut à ces professionnels pourrait en outre attirer de nombreux aidants familiaux parmi les 9,3 millions de personnes qui, déjà, soutiennent au quotidien un proche en perte d'autonomie ou en situation de handicap ; cela favoriserait la mobilisation de ressources humaines suffisantes à même de répondre aux attentes d'une large majorité des Françaises et des Français désirant vieillir le plus longtemps possible dans le cadre de leur domicile. Elle souhaite connaître sa position sur le sujet.

Texte de la réponse

STATUT DES AIDANTS FAMILIAUX


Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour exposer sa question, n°  450, relative au statut des aidants familiaux.

Mme Josiane Corneloup. En 2030, la France comptera 21 millions de seniors de 60 ans ou plus, soit 3 millions de plus qu'en 2019. Plus de 80 % des Français souhaitent pouvoir vieillir à leur domicile.

D'ici à 2030, du fait du vieillissement de la population et des départs à la retraite, près de 600 000 aides à domicile et aides-soignantes seront nécessaires pour répondre aux besoins des 2,5 millions de seniors dépendants. Or, actuellement, faute d'effectifs suffisants, les services de soins à domicile sont déjà contraints de réduire les plans d'aide des personnes qu'ils accompagnent.

Dans ma circonscription, en Saône-et-Loire, il n'est pas un employeur, associatif ou privé, qui ne m'alerte sur la quasi-impossibilité de recruter. La faiblesse des rémunérations ne saurait, à elle seule, expliquer le manque d'attractivité de ce secteur.

Bien d'autres facteurs, tout aussi importants, sont à l'origine de ce désintérêt. Je pense notamment à l'image sociale associée aux métiers d'aide à la personne depuis les années 1990, mais aussi à l'absence d'autonomie accordée aux professionnels et à leur obligation d'être toujours plus productifs aux dépens du bien-être de la personne âgée. En outre, ce problème survient alors que les salariés recherchent, de plus en plus, un équilibre entre vie privée et vie professionnelle, parfois difficiles à concilier pour les auxiliaires de vie et les aides-soignantes.

Il me semble urgent de proposer moins de contraintes et plus de souplesse, moins de travail administratif et plus de relation humaine. Il faut donner à ces personnels une perspective de carrière et d'évolution ; instaurer des formations spécialisées valorisantes, offrant tout au long d'une carrière des passerelles entre les différents métiers de la filière ; mieux prendre en considération la qualité de vie au travail et améliorer les conditions de travail, notamment en matière de mobilité ; développer l'apprentissage ; amplifier et simplifier le dispositif de validation des acquis de l'expérience pour reconnaître non seulement les compétences des auxiliaires de vie, mais aussi celles des 9 millions d'aidants qui soutiennent quotidiennement un proche en perte d'autonomie ou en situation de handicap.

Ces idées constituent des leviers d'action intéressants, susceptibles de convaincre des hommes et des femmes, désireux de se mettre au service des autres.

J'ajoute – et c'est peut-être le levier le plus important si j'en juge par le nombre de fois où cette demande a été exprimée – le besoin d'autonomie des professionnels, souvent régis par un protocole strict qui passe sous silence la dimension relationnelle, pourtant fondamentale. Il faut remettre cette valeur au centre des pratiques. Or, aujourd'hui, aucune évaluation du bonheur des patients n'est effectuée. C'est pourtant la clé si l'on souhaite redonner du sens au travail.

Madame la ministre déléguée, sans auxiliaire de vie ni aide-soignante, il n'y a pas de maintien à domicile. Nous l'avons d'ailleurs constaté pendant la crise sanitaire : c'est à elles que nous avons demandé de continuer à travailler comme si de rien n'était. Ce métier d'avenir, porteur de sens, doit occuper une place de premier choix dans l'action publique.

Face à ce défi sociétal majeur, quel plan d'envergure comptez-vous mettre en œuvre pour donner enfin ses lettres de noblesse aux métiers ô combien essentiels du service à la personne et permettre ainsi à une majorité de Français de rester le plus longtemps possible chez eux ?

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Vous interrogez la ministre des solidarités et des familles sur la reconnaissance des métiers du secteur de l'aide à la personne.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024 comprend la création de 50 000 postes supplémentaires d'aides-soignants et d'infirmiers dans les Ehpad. Cette mesure vise à renforcer la qualité de l'accompagnement des personnes âgées en établissement en lui consacrant un budget supérieur à celui de 2023, qui permettra le recrutement de 6 000 professionnels supplémentaires.

Parallèlement, des efforts significatifs ont été déployés pour revaloriser les salaires des professionnels de santé afin d'accroître l'attractivité du secteur. Les réformes en cours relatives à la convention collective nationale unique étendue dans le secteur de l'action sociale visent à améliorer la mobilité professionnelle et à rendre les carrières plus attractives grâce à l’augmentation des bas salaires dans le secteur médico-social, avec un soutien financier de l’État.

Un plan est également en cours pour résoudre la question des « faisant fonction ». Il vise à améliorer l’organisation du travail et à encourager une meilleure qualification pour ces professionnels.

Pour les structures rencontrant des difficultés de recrutement, la poursuite du déploiement des plateformes départementales des métiers de l'autonomie est envisagée afin d'assurer une gestion efficace des besoins en ressources humaines. En vue de revitaliser les recrutements, une campagne de communication est prévue pour promouvoir les carrières dans le secteur de la santé à l'heure où 9 millions de Français sont aidants familiaux.

Les aidants aspirent à offrir à leur proche un accompagnement de qualité et à concilier l'aide qu'ils leur apportent avec leurs propres besoins – et, pour les actifs, avec leur carrière. Dans le cadre de la deuxième stratégie nationale pluriannuelle Agir pour les aidants, annoncée le 6 octobre dernier, nous travaillerons à garantir une meilleure conciliation entre vie professionnelle et activité d'aide. Par ailleurs, parce que le fait d'aider un proche procure des compétences aux aidants et que ces derniers peuvent choisir des métiers du soin, nous avons ouvert la validation des acquis de l'expérience aux aidants pour leur permettre notamment d'accéder à des diplômes requis dans le secteur.

Ces mesures marquent une avancée majeure dans le soutien aux aidants et aux professionnels de santé, reflétant l’engagement de l’État en faveur d'une société plus inclusive et solidaire.

Mme la présidente. La parole est à Mme Josiane Corneloup.

Mme Josiane Corneloup. J'entends votre annonce de 50 000 nouveaux postes. Encore faut-il trouver ces personnels, qui manquent cruellement aujourd'hui. Je suis évidemment totalement favorable à une revalorisation des salaires et à une amélioration de la mobilité. Cependant, nous devons réfléchir à la dimension humaine en remettant la valeur relationnelle au centre des pratiques et en évaluant le bonheur des patients, un indicateur qui n'est pas du tout pris en compte actuellement.