Question orale n° 453 :
Opéra national de Lorraine

16e Législature

Question de : M. Emmanuel Lacresse
Meurthe-et-Moselle (2e circonscription) - Renaissance

M. Emmanuel Lacresse attire l'attention de Mme la ministre de la culture sur les difficultés structurelles éprouvées par l'Opéra national de Lorraine. La crise inflationniste que le pays traverse depuis de longs mois frappe inégalement le secteur culturel. Comme d'autres opéras en France, l'Opéra national de Lorraine a été touché par les crises successives, dont l'équilibre budgétaire a été largement détérioré en raison de l'effet de ciseau résultant de l'augmentation des charges et de la stagnation des subventions. Son directeur général rappelait que le bon fonctionnement et l'avenir de l'Opéra sont aujourd'hui menacés. Malgré l'aide exceptionnelle pour certains établissements culturels qui a été annoncée le 9 février 2023 et qui a été très favorablement accueillie, il est essentiel de ne pas négliger la situation à moyen-long terme. L'Opéra national de Lorraine, dont le budget s'élève cette année à 15 330 000 euros, détient le label « opéra national en région » depuis 2006, ce qui lui permet de bénéficier du soutien de l'État, actuellement représentant 20 % de son budget et de la région Grand Est. Dès lors, il souhaite à cet égard connaître sa position sur la pérennisation du soutien apporté et de quelle manière l'État envisage d'échanger avec la Ville de Nancy, le conseil départemental de Meurthe-et-Moselle et la région Grand Est pour les encourager à renforcer leur soutien dans ce contexte difficile.

Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2023

OPÉRA NATIONAL DE LORRAINE
Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Lacresse, pour exposer sa question, n°  453, relative à l'Opéra national de Lorraine.

M. Emmanuel Lacresse. L'opéra en France et l'art lyrique sont à une période charnière de leur histoire. Le devoir incombe à la nation de transmettre ce patrimoine immatériel grâce auquel la France a tant brillé par ses compositeurs, ses interprètes et ses œuvres. L'État a sélectionné pour cette raison, en 2006, six scènes dans nos régions qui disposent d'un label particulier. L'Opéra national de Lorraine en fait partie avec ceux de Strasbourg, Toulouse, Montpellier, Lyon et Bordeaux. Son rayonnement se prolonge, comme en témoigne la production d'Artaserse en 2012, qui demeure dans les mémoires.

La réponse à l’épisode inflationniste actuel ne peut se traduire uniquement par des gains de productivité pour des maisons auxquelles s'imposent des coûts fixes importants, c'est-à-dire le financement d'un chœur et d'un orchestre. Les gains de productivité ont, semble-t-il, atteint une limite dans les maisons situées à l'extérieur de Paris. Il n'en est pas tout fait de même pour ce qui concerne l'Opéra de Paris. La saison est minée, à l'opéra Bastille, par des grèves et des conflits à répétition. Le sujet est bien connu, mais le contraste entre le soutien aux grandes scènes parisiennes et celui accordé aux scènes régionales est ici réactualisé.

La question de la forme d'exploitation des six maisons en région mérite à ce titre d'être posée, à l'aune de leur diversité et du relatif manque de flexibilité qui les caractérise et qui semble incompréhensible. Peut-être est-ce l'occasion d'en parler.

L'effort de réduction des frais fixes consenti par ces scènes et leur réorganisation n'empêchent pas de débattre du soutien qui leur est accordé. Vous avez annoncé, pour certains établissements, le 9 février 2023 un plan « Mieux produire, mieux diffuser ». Il est essentiel de poursuivre votre action, en interrogeant les paramètres du soutien à long terme des scènes lyriques en dehors de Paris.

Toute la mission de service public à court et moyen terme doit probablement être, dans une certaine mesure, repensée, au moins dans sa quantité, au nom de la transmission de notre patrimoine lyrique, de sa beauté et de la vitalité que ces opéras apportent aux grandes villes.

Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre de la culture.

Mme Rima Abdul-Malak, ministre de la culture. Je trouve formidable d'ouvrir cette matinée en échangeant sur l'opéra. Mon ministère soutient fortement l'Opéra national de Lorraine avec une subvention de 3,1 millions d'euros. Entre 2017 et 2023, nous avons par ailleurs soutenu l'opéra dans la réalisation de travaux, en lien avec la direction régionale des affaires culturelles et le Centre national de la musique.

Ces trois dernières années, nous nous sommes fortement mobilisés, d'abord face à la crise sanitaire puis face à l'inflation, pour soutenir les maisons d'opéra. En 2021, 30 millions d'euros ont été accordés aux opéras, orchestres, ensembles et festivals du territoire. En 2022 et 2023, le Gouvernement s'est mobilisé pour compenser en partie l'augmentation des coûts de l'énergie. L'Opéra national de Lorraine a reçu 70 000 euros d'aides spécifiques pour lutter contre l'inflation, ce qui en fait la structure la plus accompagnée en région Grand Est pour faire face à la hausse du coût des fluides.

La situation actuelle appelle des réponses plus structurelles. D'où le plan intitulé Mieux produire, mieux diffuser, qui doit nous permettre de repenser en profondeur nos modèles de production et de diffusion, de favoriser les coopérations et les coproductions, et d'augmenter le nombre des représentations de chaque production afin de toucher un public plus large et de mutualiser davantage les coûts. Ce travail est bien évidemment effectué en liaison avec les collectivités territoriales, qui financent très majoritairement les institutions lyriques en région. L'enjeu est de tracer avec elles des perspectives financières à moyen terme en vue d'accompagner l'évolution en profondeur du modèle et d'assurer la pérennité de l'opéra. Nos services y travaillent, au moyen d'échanges nourris et réguliers avec les communes, les départements et les régions. Je ne doute pas que des solutions seront dégagées assez rapidement.

Je vous remercie pour votre engagement.

Mme la présidente. La parole est à M. Emmanuel Lacresse.

M. Emmanuel Lacresse. Je vous remercie moi aussi, madame la ministre, pour votre engagement et pour avoir dégagé ces pistes. D'autres structures en région, comme les orchestres philharmoniques et symphoniques ou les ballets, utilisent ces scènes. Les maisons d'opéra ne sont pas destinées au seul art lyrique ; elles accueillent aussi des productions de toutes sortes, et des réorganisations pourraient éventuellement être engagées. En tout cas, nous sommes prêts à participer à la réflexion en cours.

Données clés

Auteur : M. Emmanuel Lacresse

Type de question : Question orale

Rubrique : Arts et spectacles

Ministère interrogé : Culture

Ministère répondant : Culture

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2023

partager