Question au Gouvernement n°460 : RÉFORME DES RETRAITES

16ème Législature

Question de : Mme Claudia Rouaux (Bretagne - Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES)), posée en séance, et publiée le 18 janvier 2023


RÉFORME DES RETRAITES

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudia Rouaux.

Mme Claudia Rouaux. Madame la Première ministre, en mars 2020, à la suite d’une forte mobilisation sociale marquée par des grèves et des manifestations d’ampleur ainsi que par un passage en force à l'Assemblée par le biais d'un 49.3 et à l’aube d’une pandémie, le projet de réforme des retraites a été suspendu. Depuis trois ans, notre pays a connu une succession de crises : crise sanitaire, choc de la guerre en Ukraine, crise énergétique, pénurie de médicaments et de matières premières, inflation. Ce contexte, dont les médias se font le relais incessant, est particulièrement anxiogène : nombreux sont nos concitoyens qui expriment une grande lassitude.

Pourtant, le 23 janvier prochain, l'exécutif entend amorcer une nouvelle réforme des retraites reportant l’âge légal de départ à 64 ans, en dépit du refus unanime de l'ensemble des syndicats et d'un rejet exprimé par sept Français sur dix. Votre prétendue réforme est profondément injuste, car elle cible les salariés les plus modestes, notamment ceux qui ont commencé à travailler tôt et les actifs qui s'apprêtent à prendre leur retraite. Un report unilatéral de l’âge de départ à la retraite à 64 ans, sans mesure de justice sociale, apparaît brutal. Des inégalités en matière d’espérance de vie et de pénibilité au travail existent. Cette réforme est une atteinte aux droits des travailleurs, à qui l’on a demandé tant d’efforts, notamment pendant la crise sanitaire, et qui peinent à vivre dignement aujourd'hui en raison de la hausse des prix. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)

Madame la Première ministre, trouvez-vous juste de demander à un ouvrier qui travaille dans une entreprise agroalimentaire, dans le froid, en horaires décalés et dont le corps est usé par la tâche, de travailler plus longtemps ? Entendez la souffrance de nos compatriotes qui ont déjà donné les plus belles années de leur vie à leur travail et qui aspirent enfin à profiter d'une retraite bien méritée ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

Mme la présidente. La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

M. Fabien Di Filippo. C'est sa fête, aujourd'hui !

M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion. Madame la députée, vous demandez s'il est juste qu'un ouvrier d'une entreprise agroalimentaire travaille plus longtemps, dans le froid, en exécutant des gestes répétitifs. Bien entendu, la réponse est non. C'est la raison pour laquelle nous avons, à l'issue des concertations menées avec les organisations syndicales, modifié le compte professionnel de la prévention. Pourquoi ? Pour diminuer le nombre de nuits travaillées et faire que, les gestes répétitifs étant mieux pris en compte, le salarié que vous citez en exemple puisse acquérir plus de points au titre de la pénibilité et ainsi partir plus tôt.

C'est la démonstration que l'augmentation progressive de l'âge légal de départ à la retraite, que nous entendons mettre en œuvre pour assurer l'équilibre du système, est bien accompagnée de mesures sociales visant à protéger les plus fragiles, c'est-à-dire ceux qui sont exposés à la pénibilité et ceux qui ont commencé à travailler plus tôt.

Concernant les carrières longues, un dispositif spécifique permet le départ anticipé des individus qui ont commencé à travailler avant d'avoir 20 ans ; un autre, très peu utilisé, s'applique à ceux qui sont entrés dans la vie professionnelle avant 18 ans. Nous en créerons un troisième pour ceux qui, comme les apprentis, ont également commencé à travailler avant 18 ans.

Nous progressons sur chacun des éléments que vous avez évoqués et avançons des droits. En travaillant tous un peu plus, nous rééquilibrerons le système de retraites tout en l'améliorant. Nous répondrons ainsi, j'en suis sûr, à vos inquiétudes. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe RE.)

Mme la présidente. La parole est à Mme Claudia Rouaux.

Mme Claudia Rouaux. Je vous invite, monsieur le ministre, à venir passer une semaine dans ma circonscription, à la Cooperl, une coopérative agroalimentaire. Vous verrez que ces salariés, à qui vous demandez de travailler quarante-quatre ans, sont pour 40 % d'entre eux inaptes à toute fonction dès qu'ils atteignent 55 ou 56 ans. Peut-être cela vous fera-t-il reconsidérer votre réforme ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

Données clés

Auteur : Mme Claudia Rouaux (Bretagne - Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES))

Type de question : Question au Gouvernement

Rubrique : Retraites : généralités

Ministère interrogé : Travail, plein emploi et insertion

Ministère répondant : Travail, plein emploi et insertion

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 18 janvier 2023

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