Don du sang pour les personnes ayant subi une transfusion sanguine
Question de :
M. Gérard Leseul
Seine-Maritime (5e circonscription) - Socialistes et apparentés
M. Gérard Leseul attire l'attention de M. le ministre de la santé et de la prévention au sujet de l'exclusion du don du sang des personnes ayant subi une transfusion sanguine. Chaque année, de nombreux patients bénéficient d'une transfusion sanguine dans le cadre d'une intervention chirurgicale et cela grâce aux dons de sang effectués. Chaque année, l'Établissement français du sang (EFS) alerte sur le manque de donneurs et sur le risque de pénurie des produits sanguins à certaines périodes de l'année. Malgré des avancées notables ces dernières années avec notamment l'ouverture du don du sang aux hommes homosexuels depuis le 16 mars 2022, les critères d'accès au don restent restrictifs. C'est tout particulièrement le cas pour ceux qui ont bénéficié d'une transfusion sanguine une fois dans leur vie et qui sont exclus du don sur ce critère. Cette interdiction a été mise en place en 1997 dans le contexte de refonte de la filière du sang en France. Depuis, l'EFS dépiste plusieurs agents infectieux avec des techniques de plus en plus sensibles et performantes. L'évolution régulière de la sécurité du don vient donc mettre en question la pertinence du maintien de cette interdiction. À titre d'exemple, plusieurs pays autorisent le don du sang pour les personnes qui ont bénéficié d'une transfusion sanguine après un délai de précaution de 6 mois. Il aimerait par conséquent connaître la position et l'expertise du Gouvernement sur cette proposition d'ouverture du don du sang pour les personnes qui ont subi une transfusion sanguine.
Réponse en séance, et publiée le 13 décembre 2023
DON DU SANG
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Leseul, pour exposer sa question, n° 465, relative au don du sang.
M. Gérard Leseul. Chaque année, grâce au don du sang, de nombreux patients bénéficient d'une transfusion sanguine lors d'une intervention chirurgicale ; d'autres sont soignés indirectement grâce à des médicaments dérivés du sang, issus du don de plasma. Il convient d'ailleurs de saluer notre modèle national, fondé sur la gratuité du don. Chaque année, néanmoins, l'Établissement français du sang (EFS) nous alerte sur le manque de donneurs et sur le risque de pénurie de produits sanguins à certaines périodes de l'année. Nous le savons, l'EFS a besoin en moyenne de 10 000 dons par jour.
Malgré des avancées notables au cours des dernières années, notamment l'ouverture aux hommes homosexuels de la possibilité de donner leur sang, intervenue le 16 mars 2022, les critères d'accès au don restent restrictifs. C'est tout particulièrement le cas pour ceux qui ont bénéficié d'une transfusion sanguine une fois dans leur vie – à la naissance, après un accident ou lors d'une intervention chirurgicale. Ils sont, de fait, exclus définitivement du don, sur le fondement de ce seul critère. Cette interdiction a été édictée en 1997, dans le contexte de la refonte de la filière du sang en France.
Grâce à des techniques de plus en plus sensibles et performantes, l'EFS dépiste désormais de nombreux agents infectieux : les virus du sida, des hépatites B et C, de la syphilis, ainsi que les pathologies associées au virus T-lymphotrope humain (HTLV). Des tests sont aussi possibles, entre autres, pour la toxoplasmose, pour le virus zika et pour la leptospirose. Cette évolution régulière de la sécurité du don remet en question la pertinence de l'interdiction que j'ai évoquée. Celle-ci touche de nombreuses personnes, dont beaucoup souhaiteraient aider à leur tour leurs concitoyens en donnant leur sang.
Plusieurs pays occidentaux autorisent les personnes ayant bénéficié d'une transfusion sanguine à donner leur sang après un délai de précaution de six mois. En France, il s'agit d'un délai à vie ! Face à ce constat, j'ai déposé une proposition de loi visant à ouvrir le don du sang aux personnes ayant un antécédent de transfusion sanguine. Celles-ci pourraient donner leur sang après un délai de précaution fixé par décret, après avis de la Haute Autorité de santé (HAS). Selon moi, ce délai pourrait être de trois ans. Quelle est la position du Gouvernement à ce sujet ? Pouvez-vous nous faire part de son expertise en la matière ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. Vous m'interrogez sur l'exclusion définitive du don du sang de toute personne ayant bénéficié d'une transfusion. Permettez-moi tout d'abord de saluer votre engagement à ce sujet. Nous avions d'ailleurs eu des échanges riches à propos des critères du don du sang lors des débats sur le projet de loi relatif à la bioéthique. Il est sain et légitime que nous nous interrogions collectivement sur des pratiques qui peuvent parfois apparaître comme discriminatoires et dépassées, sans pour autant remettre en cause la nécessaire protection du donneur et du receveur du don.
Vous l'avez souligné, depuis septembre 1997, les personnes ayant subi une transfusion sanguine ne sont pas éligibles au don du sang. Cette interdiction repose avant tout sur un principe de précaution qui vise à protéger, en l'état actuel des connaissances médicales, la santé des patients receveurs. Le principal risque serait de favoriser l'apparition d'une nouvelle infection dangereuse pour l'homme, à la suite d'une mutation due à des passages successifs d'un individu à un autre.
Selon les dernières études menées par l'Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM), l'exclusion des anciens transfusés reste une mesure efficace et proportionnée ; elle ne peut être remise en cause, quelle que soit la date de transfusion du candidat au don. En conséquence, le ministère de la santé et de la prévention maintient à ce stade l'interdiction de donner leur sang opposée aux transfusés sanguins.
Lors de la dernière réunion du comité de suivi annuel des critères de sélection des donneurs de sang, le 5 décembre 2023, la direction générale de la santé (DGS) a annoncé le lancement prochain de travaux sur l'évolution des critères du don du sang, qui porteront notamment sur l'interdiction opposée aux transfusés sanguins. Je ne manquerai pas de vous tenir informé de l'évolution de ce dossier.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Leseul.
M. Gérard Leseul. Merci de cette réponse, madame la ministre déléguée. Je ne suis pas certain que l'interdiction soit « proportionnée », pour reprendre le terme que vous avez employé au cours de votre explication. Je note néanmoins que des travaux vont être engagés. Pouvez-vous nous en préciser le calendrier ? Il convient désormais d'avancer rapidement sur cette question. Nous aurions dû rouvrir le dossier il y a bien longtemps. Je suggère – nous en avons déjà discuté ensemble – que nous le fassions sérieusement et selon un calendrier raisonnable.
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée. Je n'aime pas prendre des engagements que je ne serai pas en mesure de tenir : celui que je peux prendre devant vous, c'est de vous répondre par écrit, de vous tenir informé de l'évolution des travaux du comité de suivi, qui ont repris le 5 décembre, voire de vous y associer, lorsqu'ils seront ouverts aux personnes extérieures à la DGS.
Mme la présidente. La parole est à M. Gérard Leseul.
M. Gérard Leseul. Madame la ministre déléguée, je vous remercie pour cette invitation.
Auteur : M. Gérard Leseul
Type de question : Question orale
Rubrique : Sang et organes humains
Ministère interrogé : Santé et prévention
Ministère répondant : Santé et prévention
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 5 décembre 2023