16ème législature

Question N° 466
de M. Hervé Saulignac (Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) - Ardèche )
Question écrite
Ministère interrogé > Éducation nationale et jeunesse
Ministère attributaire > Éducation nationale et jeunesse

Rubrique > enseignement

Titre > Difficultés d'application de la loi concernant l'instruction en famille

Question publiée au JO le : 02/08/2022 page : 3616
Réponse publiée au JO le : 25/10/2022 page : 4895

Texte de la question

M. Hervé Saulignac appelle l'attention du M. le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse s'agissant des difficultés d'application de la loi confortant le respect des principes de la République concernant l'instruction en famille (IEF). L'IEF n'est plus soumise comme auparavant à déclaration auprès de la mairie, mais à demande d'autorisation auprès des services départementaux de l'éducation nationale. Quatre motifs permettent de déterminer les raisons qui poussent une famille à instruire leur enfant : état de santé ou situation de handicap ; pratique intensive d'une activité sportive ou artistique ; itinérance de la famille ou éloignement géographique de tout établissement scolaire public ; existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif. S'agissant du dernier motif, il a pu être observé que plusieurs académies, dont celle de Grenoble, opposent un refus systématique des demandes d'autorisation au prétexte que le dossier ne permet pas d'établir de situation propre à l'enfant. Or ni l'article R. 131-11-5 du code de l'éducation, ni même la notice CERFA de demande d'autorisation ne font mention de la nécessité d'établir la nature de la situation propre de l'enfant motivant le projet éducatif, comme ce risque avait été discuté lors des débats parlementaires. Le Conseil constitutionnel avait lui-même indiqué dans sa décision n° 2021-823DC que « la situation propre de l'enfant » signifie, d'une part, de s'assurer que l'instructeur est « en mesure de permettre à l'enfant d'acquérir le socle commun de connaissances, de compétences et de culture » tel que défini dans le code de l'éducation. Il s'agit, d'autre part, que « le projet d'IEF comporte des éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme de l'apprentissage de l'enfant ». Aussi, il lui demande ce qu'entend faire le ministère pour que l'ensemble des services déconcentrés de l'État instructeurs des demandes d'IEF fassent appliquer la loi et cela, de façon homogène sur l'ensemble du territoire français.

Texte de la réponse

La loi n° 2021-1109 du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République (dite loi CRPR) vise à garantir une plus grande protection des enfants et des jeunes, d'une part, en posant le principe de la scolarisation obligatoire dans un établissement scolaire public ou privé de l'ensemble des enfants soumis à l'obligation d'instruction (i.e. âgés de trois à seize ans) et, d'autre part, en substituant au régime de déclaration d'instruction dans la famille un régime d'autorisation. Ainsi, à compter de la rentrée scolaire 2022, il ne pourra être dérogé à cette obligation de scolarisation que sur autorisation préalable délivrée par les services académiques, pour des motifs tirés de la situation de l'enfant et limitativement définis par la loi, au nombre desquels figure l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif. Le Conseil constitutionnel, dans sa décision n° 2021-823 DC du 13 août 2021 (point 76), jugeant de la constitutionnalité de ce dispositif, a relevé que : « en prévoyant que cette autorisation est accordée en raison de "l'existence d'une situation propre à l'enfant motivant le projet éducatif", le législateur a entendu que l'autorité administrative s'assure que le projet d'instruction en famille comporte les éléments essentiels de l'enseignement et de la pédagogie adaptés aux capacités et au rythme d'apprentissage de l'enfant. » Il en résulte que les responsables légaux sollicitant une autorisation d'instruction dans la famille pour ce motif ne doivent pas seulement justifier de la situation propre de leur enfant et présenter un projet éducatif. Les critères portent sur la conception du projet éducatif qui doit être adapté à la situation de l'enfant afin que celui-ci puisse bénéficier d'un enseignement conforme à l'objet de l'instruction obligatoire. En tout état de cause, en cas de décision de refus d'autorisation d'instruction dans la famille, les personnes responsables de l'enfant ont la possibilité de former un recours administratif préalable obligatoire devant une commission présidée par le recteur d'académie, laquelle est composée d'une équipe pluridisciplinaire qui pourra se prononcer aussi bien sur des aspects pédagogiques que médicaux dans l'intérêt de l'enfant. Les recours administratifs préalables obligatoires représentent ainsi un levier d'harmonisation des décisions nées de l'instruction des demandes d'autorisation d'instruction dans la famille à l'échelle académique. Le Gouvernement entend bien garantir l'application de la loi CRPR dans le respect de l'intérêt supérieur de l'enfant et de ses droits, notamment son droit à l'instruction. À cet égard, les services du ministère chargé de l'éducation nationale accompagnent les services académiques dans la mise en œuvre du nouveau régime d'autorisation d'instruction dans la famille.