Question écrite n° 4755 :
Pollution des incinérateurs - renforcement de la protection de la population

16e Législature

Question de : Mme Christine Arrighi
Haute-Garonne (9e circonscription) - Écologiste - NUPES

Mme Christine Arrighi interroge Mme la secrétaire d'État auprès du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée de l'écologie, sur la pollution des incinérateurs et le renforcement de la protection des populations à cet égard. En effet, malgré des améliorations récentes dans le traitement des rejets des incinérateurs, l'incinération des déchets reste une activité polluante et génératrice de nuisances. Le processus d'incinération des déchets génère notamment l'émission de CO2, des résidus solides résultant du processus de combustion appelés mâchefers ainsi que des résidus toxiques issus du processus de nettoyage des fumées, les résidus d'épuration des fumées d'incinération des ordures ménagères (REFIOM) ou encore des rejets liquides issus du processus d'incinération et de nettoyage des fumées et des mâchefers. À la suite du scandale de la contamination à la dioxine par l'incinérateur de Gilly-sur-Isère au début des années 2000, les incinérateurs, dont les émissions n'étaient pas contrôlées jusque-là, ont commencé à se voir imposer des limitations. Ainsi, un premier arrêté est pris en 2002 qui vient fixer des normes d'émissions contraignantes aux incinérateurs. Depuis, des normes d'émissions de rejets gazeux de plus en plus strictes leurs sont imposées. Les émissions de l'incinérateur sont surveillées par l'opérateur lui-même qui rend compte des résultats dans son rapport d'activité et par ATMO Occitanie qui publie chaque année un rapport dédié à ce sujet. Il ressort de cette surveillance que les émissions des divers polluants mesurés respectent globalement les normes d'émission fixées par l'arrêté préfectoral du 28 septembre 2012. Il convient cependant de rappeler que, par définition, ne sont surveillés que les polluants que l'on est en capacité de mesurer. L'incinération de produits contenant des nanoparticules, par exemple, génère des nano-déchets dont le rejet n'est pas mesuré actuellement, ni leur toxicité pour les êtres vivants évaluée. De plus, si les normes sont régulièrement abaissées, c'est également à cause de la prise en compte récente des risques dus à une exposition prolongée à des substances dangereuses même à faible dose, ainsi que des potentiels effets « cocktails » dus à une combinaison de substances considérées comme peu nocives prises chacune séparément. Le code de l'environnement définit le cadre réglementaire dans lequel s'inscrivent les activités de traitement des déchets telles que l'incinération. Il oblige notamment les incinérateurs à respecter un « principe d'action préventive et de correction, par priorité à la source, des atteintes à l'environnement, en utilisant les meilleures techniques disponibles à un coût économiquement acceptable ». En accord avec ce principe, les normes d'émissions polluantes appliquées aux incinérateurs ne sont donc pas uniquement déterminées par des considérations de santé publique mais plutôt le fruit de compromis entre la nécessité de protéger la population de la pollution qu'ils génèrent et la faisabilité technique et économique des mesures de protection. Les normes d'émissions évoluent ainsi en fonction des connaissances en toxicologie et des évolutions technologiques mais aussi, malheureusement, de « l'acceptabilité sociale » des risques liés à l'exploitation de ces unités de traitement. Or, à Toulouse, l'ensemble des rejets représente 311 000 tonnes, soit 27 000 tonnes de plus que le tonnage de déchets incinéré, cet écart correspondant aux matières ajoutées lors du processus de nettoyage des fumées. On peut également ajouter à ce tableau les nuisances pour les habitants, liées notamment au transport : bruit, trafic lié aux camions, odeurs, poussières... De plus, parmi les 11 incinérateurs avec les plus importantes capacités d'incinération en France, celui de Toulouse est, de loin, celui qui émettait le plus d'oxydes d'azote en moyennes journalières en 2020, avec 188 mg/Nm3 contre 73 mg/Nm3 pour celui de Nice, deuxième de ce classement. Pour autant, l'ensemble de ces incinérateurs respectait, cette année-là, les valeurs limites d'émission qui leur étaient imposées par leur arrêté préfectoral respectif, celles de Toulouse étant fixé à 200 mg/Nm3 (!!) contre 70 à 80 mg/Nm3 pour tous les autres. Aussi, il est aujourd'hui scandaleux que l'on puisse à Toulouse se contenter de respecter a minima les normes, pendant que tous les autres incinérateurs ont divisé par 2 ou 3 leurs émissions. Comment se fait-il que l'on puisse consentir à des valeurs limites « maximales » à 200 mg/Nm3 pour ces deux incinérateurs à Toulouse alors que quasiment tous les autres en France se voient fixer des valeurs limites à 80 mg/Nm3 ou moins ? Comment se fait-il que cette situation perdure encore à l'heure actuelle, puisque, quand la norme vient d'être abaissée à 80 mg/Nm3 (ce qui n'a aucun impact sur la plupart des incinérateurs qui la respectaient déjà), le préfet a encore une fois autorisé une dérogation à cette norme avec une valeur limite de 150 mg/Nm3 ? Comparativement aux autres incinérateurs, celui de Toulouse devrait être plus exemplaire, car situé en pleine ville et disposant d'une très grosse capacité ; or c'est l'inverse qui se produit, avec l'aval de l'État. C'est pourquoi elle lui demande comment elle entend porter une nouvelle règlementation pour prendre en compte l'ensemble des émissions polluantes directes et indirectes de l'incinération et renforcer les limitations de celles-ci, ainsi que le contrôle de cette règlementation, afin de protéger la santé des populations.

Réponse publiée le 26 septembre 2023

L'incinérateur de Toulouse est actuellement à l'arrêt pour réaliser les travaux de maintenance. Les travaux de remise en conformité ont débuté le 21 août et se termineront à l'été 2024. Le projet d'arrêté permettant de baisser la valeur limite d'oxyde d'azote est en cours de préparation et sera pris d'ici la fin de l'année 2023. Il est prévu à ce stade de fixer une valeur limite de rejet de 150 mg/m3. L'établissement public chargé du traitement des déchets lance en parallèle les démarches nécessaires à la construction d'une nouvelle usine ou la rénovation profonde de l'incinérateur existant. Cette démarche devra tenir compte des progrès attendus en matière de prévention des déchets. En effet, le renforcement de la prévention des déchets des ménages passe par un rehaussement des ambitions du cahier des charges des metteurs en marché d'emballages pour atteindre les objectifs fixés dans la loi anti-gaspillage de février 2020 et dans la stratégie de réduction, réemploi et recyclage des emballages à usage unique en plastique. Ce travail est en cours au niveau national et devrait aboutir d'ici la fin de l'année.

Données clés

Auteur : Mme Christine Arrighi

Type de question : Question écrite

Rubrique : Pollution

Ministère interrogé : Écologie

Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires

Dates :
Question publiée le 17 janvier 2023
Réponse publiée le 26 septembre 2023

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