Question orale n° 509 :
Difficultés rencontrées par plusieurs établissements scolaires du Val-d'Oise

16e Législature

Question de : Mme Naïma Moutchou
Val-d'Oise (4e circonscription) - Horizons et apparentés

Mme Naïma Moutchou alerte Mme la ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques sur les difficultés rencontrées par plusieurs établissements scolaires de sa circonscription. L'école ne va pas bien, l'école est en crise, c'est une opinion partagée, indiscutée, caractérisée. Bien heureusement tous les élèves ne sont pas en échec mais le niveau scolaire s'affaisse et les inégalités s'aggravent. Cette situation n'est pas nouvelle mais elle s'aggrave. Et c'est concret : dans plusieurs établissements de la 4e circonscription du Val-d'Oise, on constate une pénurie de professeurs. Quelques exemples : à l'école Léon Gambetta de Saint-Prix, 3 professeurs sur 8 sont absents. 70 élèves se retrouvent sans enseignements, répartis dans d'autres classes dont les effectifs peuvent alors grimper jusqu'à 41 élèves, ce qui n'est pas propice à un enseignement de qualité. À l'école Lucien Bunel de Monlignon, une classe de CM2 (qui prépare donc le passage des élèves à la 6e) est sans professeur depuis le 29 septembre 2023. Sur 10 semaines d'absence, seulement 10 jours de remplacement ont été assurés et de façon discontinue. À l'école Paul-Bert d'Eaubonne, une classe de CE1 n'a eu que 15 jours de classe depuis la rentrée 2023, avec un remplaçant qui n'est présent qu'à mi-temps. Et les exemples de ce type sont nombreux car bien d'autres établissements du Val-d'Oise sont touchés. On n'a jamais connu de tels déficits : même s'il y a eu des renforts de contractuels à la demande de l'État, la situation est grave pour les enfants. En plus des postes non pourvus, Mme la députée voudrait évoquer le cas du collège Saint-Exupéry d'Ermont, à propos duquel elle a déjà interpellé le ministère de l'éducation nationale à plusieurs reprises, notamment sur le problème de mixité sociale. Aujourd'hui les élèves y sont confrontés à des faits de violence : violence verbale, violence physique et, ce que le collectif de parents d'élèves du collège dénonce et nomme, à raison, comme une 3e violence : celle numérique, celle des réseaux sociaux. Ils ont raison : la légitimité de la culture scolaire et de l'autorité est mise à mal par le rôle des écrans auxquels les élèves consacrent beaucoup trop de temps, plus de temps qu'à la classe ou à leurs leçons. L'influence des réseaux sociaux est délétère, sur le niveau et sur le comportement des enfants. Harcèlement, menaces, incivilités, décrochage, voilà ce à quoi on assiste et l'établissement n'est plus un lieu sûr. Et pourtant, ces collégiens que Mme la députée a rencontrés à plusieurs reprises ne sont pas moins capables ou moins méritants que les autres. Il ne s'agit pas de pointer la responsabilité de tel ou tel, tout le monde est concerné par ce qui est désormais un fait de société. Voilà la réalité d'une partie du territoire dont Mme la députée souhaite attirer l'attention de Mme la ministre. Ces jeunes générations de Saint-Prix, de Montlignon, d'Eaubonne, d'Ermont et d'ailleurs sont l'avenir de la Nation. On ne peut pas les laisser sans enseignements, sans repères, ou en proie à la violence. On ne peut pas laisser les professeurs des écoles seuls face à ces défis et sans reconnaissance, ni les parents sans aide. Elle souhaite l'interroger sur les solutions qu'elle envisage d'apporter afin d'améliorer la situation.

Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2024

ÉTABLISSEMENTS SCOLAIRES DU VAL-D'OISE
M. le président. La parole est à Mme Naïma Moutchou, pour exposer sa question, n°  509, relative aux établissements scolaires du Val-d'Oise.

Mme Naïma Moutchou. L'école ne va pas bien ; l'école est en crise : cette opinion, largement partagée, n'est plus discutée. Fort heureusement, tous les élèves ne sont pas en situation d'échec, mais le niveau scolaire s'affaisse et les inégalités s'aggravent. Si cette crise n'est pas nouvelle, elle revêt actuellement une acuité particulière et a des conséquences concrètes sur le terrain. J'en donnerai quelques exemples.

Dans ma circonscription, et plus largement dans le département du Val-d'Oise, nous manquons d'éducateurs, d'accompagnants d’élèves en situation de handicap (AESH) et d'enseignants. À l'école Léon-Gambetta de Saint-Prix, trois professeurs sur huit sont absents, et soixante-dix élèves se retrouvent sans enseignement ; ils sont répartis dans des classes dont les effectifs peuvent grimper jusqu'à quarante et un élèves, ce qui n'est propice à rien – ou en tout cas, à pas grand-chose. À l'école Lucien-Bunel de Montlignon, une classe de CM2, où se prépare le passage en sixième, n'a pas de professeur depuis le 29 septembre 2023 ; sur dix semaines d'absence, seuls dix jours de remplacement ont été assurés, de façon discontinue. À l'école Paul-Bert d'Eaubonne, une classe de CE1 n'a eu que quinze jours d'enseignement depuis la rentrée scolaire de l'année dernière, avec un remplaçant qui n'est présent qu'à mi-temps.

Je pourrais malheureusement multiplier les exemples, car bien d'autres établissements du Val-d'Oise sont touchés. Nous n'avons jamais connu de tels dysfonctionnements – je peux en témoigner, ayant moi-même bénéficié de l'école publique dans ce département. Certes, il y a eu des renforts grâce à l'aide de contractuels, à la demande de l'État. Le lien est fluide – je tiens à le souligner – avec le directeur académique des services de l’éducation nationale (Dasen), qui réalise un travail important. Pourtant, la situation reste grave pour certains enfants.

Au-delà des problèmes de postes non pourvus, je voudrais évoquer la situation du collège Saint-Exupéry d'Ermont – j'ai déjà interpellé votre ministère à plusieurs reprises à son sujet, notamment concernant la mixité sociale. Les élèves de cet établissement sont confrontés à de nouvelles formes de violence, comme en témoignent les parents eux-mêmes. Après les violences verbales et physiques, une troisième forme de violence s'exerce sur les réseaux sociaux. Les parents ont raison d'être inquiets, puisque la légitimité même de la culture scolaire et de l'autorité est mise à mal par les écrans, auxquels les élèves consacrent bien plus de temps qu'à la classe et aux leçons. L'influence des réseaux sociaux, particulièrement délétère, a des conséquences sur le niveau des enfants et sur leur comportement : harcèlement, incivilités, menaces, décrochage scolaire. Voilà ce à quoi nous assistons. Le collège Saint-Exupéry n'est plus tout à fait un lieu sûr. Pourtant, ses élèves – que je rencontre fréquemment – ne sont ni moins capables, ni moins méritants que les autres. Il ne s'agit pas ici de pointer la responsabilité de tel ou tel – la direction, les enseignants et les parents d'élèves font ce qu'ils peuvent.

Je tiens à vous alerter sur cette situation dont souffre une partie de mon territoire. Les jeunes générations de Saint-Prix, Montlignon, Eaubonne et Ermont – mais aussi de Franconville, de Saint-Leu-la-Forêt ou d'ailleurs – sont l'avenir de la nation. Nous ne pouvons pas les laisser sans enseignement et sans repères ; nous ne pouvons pas les laisser en proie à la violence. Nous ne pouvons pas laisser les enseignants sans formation ni reconnaissance, et nous ne pouvons pas laisser les parents sans aide. Madame la ministre, comment agir concrètement pour remédier aux situations que je viens de décrire ?

M. le président. La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques et paralympiques.

Mme Amélie Oudéa-Castéra, ministre de l’éducation nationale, de la jeunesse, des sports et des Jeux olympiques et paralympiques. Le remplacement des professeurs absents constitue une priorité du service public de l'éducation nationale. Chaque élève, où qu'il soit, doit bénéficier des heures d'enseignement prévues. La mobilisation générale autour du chantier prioritaire du remplacement de courte durée commence à porter ses fruits. Le ministère a instauré un plan visant à réduire le nombre d'absences prévisibles afin d'en limiter l'impact sur le temps d'enseignement dû aux élèves. Il s'agit d'améliorer le taux de remplacement par une mobilisation des heures supplémentaires, qu'elles soient financées en tant que telles ou dans le cadre du pacte enseignant, et par la diffusion d'une nouvelle culture du remplacement, que nous devons continuer de faire progresser.

Par ailleurs, le ministère a engagé un important travail pour renforcer l'attractivité du métier d'enseignant – un enjeu essentiel s'agissant du remplacement –, en facilitant le recrutement grâce à la revalorisation des rémunérations, des carrières et des missions des professeurs. En complément, d'autres leviers sont mobilisés aux niveaux académique et départemental pour répondre aux besoins qui pourraient ne pas être couverts, notamment le renouvellement des contrats des agents qui ont donné toute satisfaction et l'accompagnement des nouveaux dans leur prise de poste et en matière de formation.

S'agissant des situations particulières sur lesquelles vous nous interpellez, celles du collège Saint-Exupéry et des écoles du département du Val-d'Oise, les services académiques en charge de la gestion des remplacements mettent tout en œuvre pour répondre aux besoins identifiés. Dans ce collège comme dans les établissements de Saint-Prix, de Montlignon, d'Eaubonne et d'Ermont, nous devons, vous avez raison, apporter une réponse durable en proposant une offre éducative de qualité et de proximité dans le cadre d'une action coordonnée et renforcée de l'ensemble des acteurs, notamment en matière de recrutement, de fidélisation et de mobilisation des ressources humaines.

Données clés

Auteur : Mme Naïma Moutchou

Type de question : Question orale

Rubrique : Enseignement

Ministère interrogé : Éducation nationale, jeunesse, sports, jeux Olympiques et Paralympiques

Ministère répondant : Éducation nationale, jeunesse, sports, jeux Olympiques et Paralympiques

Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2024

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