Projet immobilier "Révélation Lumière" à Noisy-le-Grand (93160)
Question de :
M. Thomas Portes
Seine-Saint-Denis (3e circonscription) - La France insoumise - Nouvelle Union Populaire écologique et sociale
M. Thomas Portes attire l'attention de M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires sur le projet immobilier « Révélation Lumière » envisagé à Noisy-le-Grand (93160). Les experts du GIEC tirent depuis plusieurs années la sonnette d'alarme quant à la dégradation des écosystèmes, le réchauffement climatique et la nécessité urgente d'adopter une politique de bifurcation écologique. Les perturbations climatiques, principalement causées par les émissions massives de gaz à effet de serre résultant des activités humaines, atteignent un seuil critique mettant en péril la survie des espèces. Face à ce défi majeur, il est impératif d'agir sans plus tarder pour protéger les biens communs et assurer la pérennité de l'espèce humaine. En France, la pollution de l'air entraîne chaque année la mort prématurée de plus de 48 000 personnes, représentant 9 % de la mortalité dans le pays. Dans le département de Seine-Saint-Denis, la qualité de l'air est particulièrement dégradée, notamment aux abords des principaux axes autoroutiers. À Noisy-le-Grand, un projet immobilier dit « Révélation Lumière » porté par la BNP-PARIBAS, prévoit la création d'un « éco-quartier » en remplacement du bois Louis Lumière, véritable poumon vert aux portes de Paris. Ce projet entraînera la destruction de 22 200 m2 d'espace boisé, remplacés par un étang et des espaces verts de 8 000 m2. Ce projet, situé entre les quartiers de la Grenouillère, de la Butte Verte, du Champy et du Marnois, est non seulement un non-sens absolu, mais il aura des conséquences irréversibles sur la lutte contre le réchauffement climatique et la préservation de la biodiversité. En effet, l'importance des arbres dans l'absorption du dioxyde de carbone et leur rôle face aux canicules est désormais reconnue. Les bâtiments et les surfaces imperméabilisées concentrent la chaleur en été, créant des îlots de chaleur que les arbres contribuent à atténuer. Les riverains et les collectifs citoyens, fortement opposés, ont lancé plusieurs pétitions en ligne. Deux études ont révélé la présence d'arbres centenaires et de nombreuses espèces protégées et menacées dans ce bois. La Ligue pour la protection des oiseaux (LPO) d'Île-de-France a recensé vingt-quatre espèces d'oiseaux, dont une quinzaine se reproduisent dans le bois. La direction régionale de l'environnement a noté la présence de nombreuses espèces d'oiseaux, de mammifères, de reptiles et d'insectes. L'association Rassemblement pour l'étude de la nature et l'aménagement de Roissy-en-Brie et son district (Renard) a également identifié deux espèces de chauves-souris protégées (Pipistrellus pipistrellus et Pipistrellus nathusii). Alors que l'adoption du plan local d'urbanisme définitif (PLUI) est prévue pour juin 2024, il l'appelle à intervenir dans ce dossier afin de trouver promptement une solution pour mettre un terme à ce projet, incompatible avec l'urgence climatique actuelle.
Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2024
PROJET « RÉVÉLATION LUMIÈRE » DE NOISY-LE-GRAND
M. le président. La parole est à M. Thomas Portes, pour exposer sa question, n° 511, relative au projet immobilier à Noisy-le-Grand.
M. Thomas Portes. Ma question s'adresse au ministre de la transition écologique ; comme il est absent, je m'adresse à vous, madame la ministre.
Depuis plusieurs années, les experts du Giec – le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat – donnent l'alerte quant aux conséquences du réchauffement climatique, et soulignent l'urgence de mener des politiques ambitieuses en matière de bifurcation écologique. Nous le savons, les années à venir sont décisives pour l'humanité. Le changement climatique a commencé, et il est irréversible. Il n'est plus possible d'attendre. Le désastre écologique est multiforme, menace l'avenir du vivant et la survie de l'espèce humaine. Nos biens communs doivent être protégés sans attendre, avant qu'il ne soit trop tard.
En France, chaque année, plus de 48 000 personnes décèdent prématurément en raison de la pollution de l'air. Cela représente 9 % de la mortalité nationale. Dans ma circonscription, en Seine-Saint-Denis, l'état de l'air est particulièrement dégradé, singulièrement autour des axes autoroutiers. Comme souvent, ce sont les habitantes et les habitants les plus fragiles, vivant dans les logements les plus vétustes, qui subissent les conséquences de cette pollution. L'urgence climatique impose de prendre des décisions politiques ambitieuses et de mettre un coup d'arrêt aux projets immobiliers et routiers. Ces derniers constituent des bombes climatiques, mettant en danger à la fois l'avenir de la planète et la vie des habitantes et des habitants.
Pour mener ces politiques ambitieuses, nous avons un allié formidable : les forêts. Elles jouent un rôle essentiel dans la régulation du climat et l'atténuation du réchauffement de la planète. Toutefois, à Noisy-le-Grand, certains s'apprêtent à sacrifier cet allié, en soutenant le projet immobilier dit Révélation Lumière – tout un symbole –, porté par BNP Paribas. Il prévoit la création d'un écoquartier en remplacement du bois Louis-Lumière : 22 000 mètres carrés d'espace boisé, et plus de 1 000 arbres, dont certains centenaires, seront rasés pour satisfaire les intérêts financiers de BNP Paribas. Le bois Louis-Lumière est un véritable poumon vert aux portes de Paris, indispensable aux habitantes et habitants de Noisy-le-Grand, de la Seine-Saint-Denis et de la région Île-de-France.
Ce projet, situé entre les quartiers de la Grenouillère, de la Butte Verte, du Champy et du Marnois, est un non-sens absolu ; il aura des conséquences irréversibles, allant à l'encontre de la lutte contre le réchauffement climatique et de la préservation de la biodiversité. Face à la multiplication des fortes canicules, l'arbre est – encore une fois – un précieux allié. En effet, les bâtiments et les sols concentrent la chaleur estivale et constituent autant d'îlots de chaleur. Les arbres permettent d'en absorber une partie, et de rendre les températures de la ville plus supportables. Ce projet met aussi en péril des dizaines d'espèces animales protégées.
Les associations, les élus, les citoyens se mobilisent contre ce projet depuis plusieurs mois. C'est un projet d'un autre siècle, dangereux et inutile, qui va menacer la vie de dizaines d'habitants. Il sacrifiera des dizaines d'hectares de bois, au service d'un programme immobilier de BNP Paribas.
La banque ou le climat, il faut choisir ; les habitantes et les habitants ont choisi, et se mobilisent pour le climat. Madame la ministre, je vous demande, avec votre gouvernement, d'intervenir pour mettre un terme à ce projet, dangereux, inutile et incompatible avec l'urgence climatique à laquelle nous faisons face.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Je vous réponds au nom du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires. Le projet urbain « Révélation Lumière », à proximité de la future gare du Grand Paris Express, prévoit la construction de nombreux logements – dont une part de logements sociaux –, et de divers équipements publics. Il fait néanmoins l'objet d'une contestation locale, liée aux enjeux de préservation de l'environnement, sur lesquels vous appelez très justement notre attention.
Bien que ce projet consiste principalement en la réhabilitation de la friche de l'école Louis-Lumière située sur un foncier appartenant à l'État, il n'appartient pas à ce dernier de se substituer aux collectivités territoriales dans leurs responsabilités en matière d'aménagement.
Par ailleurs, ce projet est lauréat depuis 2019 de l'appel à projets « Inventons la Métropole du Grand Paris », lancé par cette dernière. La responsabilité des services de l'État est de faire respecter, en pratique – à l'échelle des documents de planification locale et de projets –, les principes de conciliation des enjeux de développement et de renouvellement urbain, de sobriété foncière et de respect de la biodiversité.
À cet égard, j'appelle votre attention sur le fait qu'à ce jour, aucune autorisation administrative n'a été délivrée, ni même sollicitée, qu'il s'agisse du défrichement ou du permis de construire. L'avis de l'autorité environnementale, requis par le code de l'environnement, n'a pas non plus été demandé. Je note d'ailleurs que cette contestation locale conduit la ville de Noisy-le-Grand et l'aménageur BNP Paribas Immobilier à poursuivre l'adaptation du projet.
Lorsque les procédures auront été engagées, les services de l'État veilleront, bien évidemment, à ce que le projet prévoie toutes les mesures d'évitement et de réduction des impacts sur les espèces protégées présentes sur le site, et à ce qu'il soit compatible avec l'ensemble des règles d'urbanisme applicables.
Auteur : M. Thomas Portes
Type de question : Question orale
Rubrique : Urbanisme
Ministère interrogé : Transition écologique et cohésion des territoires
Ministère répondant : Transition écologique et cohésion des territoires
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2024