Agenda de l'égalité sociale à Mayotte
Question de :
M. Mansour Kamardine
Mayotte (2e circonscription) - Les Républicains
M. Mansour Kamardine interroge Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités sur l'agenda de l'égalité sociale à Mayotte. Le 101e département est le plus pauvre de France avec un taux de personnes vivant sous le seuil de pauvreté de 77 % selon les données de l'Insee. De plus, il est celui où le coût de la vie est le plus cher, avec un surcoût de 15 % par rapport à la moyenne nationale et un surcoût de 70 % pour le seul « panier de la ménagère ». En outre, les Mahorais subissent une véritable discrimination sociale avec un Smic inférieur de 20 % au Smic national et des prestations et des allocations sociales pour la plupart plafonnées à 50 % du montant de celles appliquées dans tous les autres départements. Ainsi les Français les plus pauvres sont également ceux qui bénéficient le moins de la solidarité nationale. Pourtant, à l'unanimité, toutes tendances politiques confondues, les élus de Mayotte, locaux comme nationaux, demandent, depuis plusieurs années, un alignement social de Mayotte sur les autres départements français, de métropole ou d'outre-mer, pour 2026. Aussi, il lui demande si elle entend mettre un terme à la discrimination sociale indubitable de Mayotte et des Mahorais et de lui indiquer l'agenda d'alignement social de 2024 à 2026.
Réponse en séance, et publiée le 31 janvier 2024
ÉGALITÉ SOCIALE À MAYOTTE
M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine, pour exposer sa question, no 519, relative à l'égalité sociale à Mayotte.
M. Mansour Kamardine. Ma question s'adresse à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités. Puisqu'elle est absente, j'aurai le plaisir de faire découvrir Mayotte à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique et porte-parole du Gouvernement. À Mayotte, 77 % de la population vit sous le seuil de pauvreté, le taux de chômage atteint 40 %, le montant de la plupart des prestations et allocations sociales est plafonné à 50 % de celui observé dans les autres départements et le « panier de la ménagère » accuse un surcoût de 70 % par rapport à la moyenne nationale. Enfin, les promesses faites par les gouvernements qui se sont succédé depuis 2017 n'ont jamais été tenues.
Ma question est donc simple et elle vous est posée par toute la population de Mayotte, ainsi que par ses représentants, quelle que soit leur sensibilité politique, qu'ils soient élus locaux ou députés : à quand la convergence sociale ? Nous souhaitons qu'elle soit réalisée en 2026 au plus tard, cette échéance ne pouvant plus être repoussée. Telle est la question que j'ai l'honneur de soumettre à votre sagacité.
M. le président. La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.
Mme Prisca Thevenot, ministre déléguée chargée du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. La ministre du travail, de la santé et des solidarités m'a chargée de vous répondre en son nom. La départementalisation de Mayotte, décidée en 2011, se fondait sur le principe d'une convergence sociale, qui devait aboutir en vingt-cinq ans. Il a été décidé d'accélérer cette convergence, la collectivité territoriale de Mayotte souhaitant l'atteindre dès 2026.
En décembre dernier, à l'occasion de la visite de la Première ministre dans l'île, il a été confirmé que le projet de loi « Mayotte », annoncé à l'issue du comité interministériel des outre-mer du 18 juillet 2023, traiterait de cette convergence. Le groupe de travail associant des représentants des différentes administrations concernées sera prochainement installé, afin de fixer le calendrier précis de la convergence des droits sociaux – salaire minimum, cotisations et contributions sociales, prestations de solidarité et prestations familiales – et de répondre à l'urgence sociale que vous soulignez, monsieur le député.
Depuis 2018, plusieurs mesures ont été prises pour rapprocher le régime local de sécurité sociale et celui prévu par le droit commun et améliorer les prestations de solidarité, au bénéfice des Mahorais. Je pense notamment à la déconjugalisation de l'allocation adulte handicapé (AAH), à l'extension de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et à l'extension de l'AAH pour les personnes dont le taux d'incapacité est compris entre 50 % et 80 %. Je dois enfin rappeler qu'en 2019, le montant de la prime d'activité versée aux Mahorais a été porté au niveau de celui de la prime d'activité versée dans l'Hexagone.
Depuis le 1er janvier 2024 s'appliquent par ailleurs à Mayotte des prestations importantes, notamment le complément de libre choix du mode de garde (CMG) et la complémentaire santé solidaire.
M. le président. La parole est à M. Mansour Kamardine.
M. Mansour Kamardine. Merci pour ce rappel, qui ne répond pas à ma question. Devant la représentation nationale, je tiens à rappeler que les Mahorais paient les mêmes impôts que tous les Français. Ils devraient par conséquent pouvoir prétendre à la même solidarité et au même soutien.
J'ai bien pris note de vos promesses, que votre majorité nous a déjà faites lorsque j'ai défendu, en juin 2019, la proposition de loi relative à la programmation du rattrapage et au développement durable de Mayotte. En 2002, une ordonnance a été prise pour étendre à Mayotte les régimes de l'Ircantec et de l'Agirc-Arrco : près d'un quart de siècle plus tard, le décret d'application de cette ordonnance est toujours attendu ! Le président Hollande nous promettait encore en 2015 l'égalité salariale, mais celle-ci n'est toujours pas acquise en 2024. Voilà la réalité de Mayotte !
Je veux bien écouter tous vos discours, mais je ne peux croire que ce qui est écrit. Le Gouvernement m'avait d'ailleurs promis que toutes nos demandes seraient satisfaites par le contrat de convergence territoriale (CCT), mais tel n'a pas été le cas. Gageons que la loi « Mayotte » ne sera pas l'occasion de vérifier que la satisfaction de ces revendications est toujours une Arlésienne.
Auteur : M. Mansour Kamardine
Type de question : Question orale
Rubrique : Outre-mer
Ministère interrogé : Travail, santé et solidarités
Ministère répondant : Travail, santé et solidarités
Date de la séance : La question a été posée au Gouvernement en séance, parue dans le journal officiel le 23 janvier 2024