Question de : M. Denis Masséglia (Pays de la Loire - Renaissance)

M. Denis Masséglia appelle l'attention de M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique sur la conformité des dispositions de l'article L 136-7 du code de la sécurité sociale avec l'article 8 de la directive fusion (directive 2009/133/CE du conseil du 19 octobre 2009) en ce qu'elles soumettent aux prélèvements sociaux les gains réalisés dans un plan d'épargne en actions (PEA) lors de la clôture de ce PEA et que cette clôture est provoquée par une opération d'apport de titres placés sous PEA à une société dont le titulaire du plan se retrouve, à l'issue de l'apport, détenir plus de 25 % des droits dans les bénéfices sociaux de la société bénéficiaire de cet apport. Or l'article 8 de la directive précitée prévoit que « l'attribution, à l'occasion (...) d'un échange d'actions, de titres représentatifs du capital social de la société bénéficiaire ou acquérant à un associé de la société apporteuse ou acquise, en échange de titres représentatifs du capital social de cette dernière société, ne doit, par elle-même, entraîner aucune imposition sur le revenu, les bénéfices ou les plus-values de cet associé. (...) L'application des paragraphes 1, 2 et 3 n'empêche pas les États membres d'imposer le profit résultant de la cession ultérieure des titres reçus de la même manière que le profit qui résulte de la cession des titres existant avant l'acquisition ». Aussi, il lui demande si la directive fusion ne fait pas obstacle à l'application de l'article L 136-7 du code de la sécurité sociale.

Réponse publiée le 4 juin 2024

À titre liminaire, il convient de rappeler que l'objectif de la directive n° 2009/133/CE du conseil du 19 octobre 2009 dite fusions est de supprimer les entraves fiscales à certaines opérations de restructuration transfrontalières de sociétés de deux ou plusieurs États membres. À cet effet, son article 8, paragraphe 1, prévoit qu'une opération d'échange d'actions ou de titres « ne doit, par elle-même, entraîner aucune imposition ». Le champ d'application matériel de la directive prévu au e) de son article 2 définit l'échange d'actions comme l'opération par laquelle une société acquiert, dans le capital social d'une autre société, une participation ayant pour effet de lui conférer la majorité des droits de vote de cette société, ou, si elle détient déjà une telle majorité, acquiert une nouvelle participation moyennant l'attribution aux associés de l'autre société, en échange de leurs titres, de titres représentatifs du capital social de la première société et, éventuellement, d'une soulte en espèces ne dépassant pas 10 % de la valeur nominale ou, à défaut de valeur nominale, du pair comptable des titres qui sont remis en échange. Par ailleurs, il résulte du a du 5° du II de l'article L. 136-7 du code de la sécurité sociale (CSS) qu'est assujetti aux prélèvements sociaux le gain net réalisé lors de la clôture du plan d'épargne en actions (PEA) défini à l'article 163 quinquies D du code général des impôts (CGI). Cette dernière disposition prévoit que le PEA est ouvert et fonctionne conformément aux articles L. 221-30, L. 221-31 et L. 221-32 du code monétaire et financier (CMF), et l'article 1765 du CGI prévoit que si l'une des conditions prévues pour l'application de ces articles du CMF n'est pas remplie, le plan est clos et les cotisations d'impôt résultant de cette clôture sont immédiatement exigibles. Or, le 3° du II de l'article L. 221-31 du CMF dispose que le titulaire du PEA ne doit pas, pendant la durée du plan, détenir plus de 25 % des droits dans les bénéfices des sociétés dont les titres figurent au PEA. Il résulte de ce qui précède que, à supposer que l'opération d'échange envisagée puisse entrer dans le champ d'application matériel et territorial de la directive, celle-ci ne saurait faire échec à l'exigibilité des prélèvements sociaux sur le gain net versé lors de la clôture du PEA. En effet, dans l'hypothèse envisagée, ce n'est pas l'opération d'échange « par elle-même » qui entraîne l'imposition aux prélèvements sociaux, mais le fait que l'associé de la société apporteuse ou acquise ayant reçu en échange plus de 25 % des titres de la société bénéficiaire ou acquérante, avait préalablement à cette opération souscrit ou acquis les titres ainsi apportés ou cédés dans le cadre d'un PEA. En tant que titulaire du PEA, il a ainsi commis à l'occasion de cette opération d'échange un manquement à l'obligation, prévue par le 3° du II de l'article L. 221-31 du CMF, de ne pas détenir plus de 25 % de droits d'une même société dans le PEA. Ce manquement est dissociable de l'attribution à l'occasion de l'échange de titres de la société bénéficiaire ou acquérante à un associé de la société apporteuse ou acquise ; il est inhérent à la qualité de titulaire d'un PEA dans lequel figurent, par suite de l'échange, des titres de la société bénéficiaire ou acquérante détenus à plus de 25 % par le titulaire du PEA, en méconnaissance du 3° du II de l'article L. 221-31, II, 3° du CMF. Aussi l'imposition aux prélèvements sociaux a pour fait générateur la clôture du PEA et n'est pas entraînée, « par elle-même », par l'opération d'échange. À cet égard, il convient de relever que le gain net assujetti aux prélèvements sociaux est « déterminé par différence entre, d'une part, la valeur liquidative du plan (…) et d'autre part, la valeur liquidative (…) au 1er janvier 1997 majorée des versements effectués depuis cette date et diminuée du montant des sommes déjà retenues à ce titre lors des précédents retraits (CSS, art. L. 136-7, II, 5°, a), et non sur la plus-value dégagée à raison des seuls titres échangés. Ainsi, l'assujettissement aux prélèvements sociaux du gain net réalisé lors de la clôture du PEA n'entre aucunement en contradiction avec les dispositions précitées de la directive fusions dès lors que l'imposition a pour fait générateur la clôture du PEA résultant de la méconnaissance des règles de fonctionnement prévues par le CMF et n'est pas entraînée par l'opération d'échange par elle-même.

Données clés

Auteur : M. Denis Masséglia (Pays de la Loire - Renaissance)

Type de question : Question écrite

Rubrique : Impôts et taxes

Ministère interrogé : Économie, finances, souveraineté industrielle et numérique

Ministère répondant : Comptes publics

Dates :
Question publiée le 7 février 2023
Réponse publiée le 4 juin 2024

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